Dans la chambre d'hôpital, ma sœur nous raconta son retour de voyage scolaire. Je ne regardais pas, je tentait de penser à autre chose. Oui, le voyage, oui, les anecdotes, raconte ça, voilà, qu'on pense à autre chose. Autre chose que la mort imminente qui pesait dans cette pièce.
Mes grands-parents étaient là, eux aussi. On finit par rentrer de l'hôpital, ma sœur et eux.
A ce moment, j'étais persuadée que mon père allait décéder cette nuit-là, du 17 au 18 février 2017. Je m'endormis dans un état second, comme hypnotisée.
Je me souviens d'une chose précise. Moi dormant sur ce matelas double à même le sol, tenant mon téléphone dans la main, toujours allumé, attendant « l'appel ». Parce que oui, ma mère dormait à l'hôpital avec mon père. Si elle appelait, je savais que ça serait pour la mauvaise et ultime annonce. Alors j'attendais son appel, ne faisais rien d'autre. Je réveillais toutes les heures de la nuit en sursaut pour vérifier un appel manqué. Mais rien, aucune nouvelle.
Le 18 février passa.
Puis le 19 février.
Ce fut, clairement, le weekend le plus long de toute ma vie. Attendre une mauvaise nouvelle que l'on savait imminente, dont on avait presque envie qu'elle arrive maintenant histoire de mettre fin à cette horrible et déchirante attente.
Je ne sais même plus si mon copain de l'époque était avec moi ou pas. Je crois que parfois, il était là.
Une fois, en descendant dans la cuisine, je vis une enveloppe par terre dans l'entrée. Le courrier. Normal. Je la pris. Une banale lettre administrative adressé à mon père. Mais en voyant le nom et le prénom sur l'enveloppe, je réalisais que ce nom disparaitrait bientôt, et que plus aucune lettre adressée à lui ne serait postée dans cette maison. Je m'effondrai en pleurant par terre. En en serrant fort la lettre dans mon poing.
Mon copain descendit les escaliers en me demandant ce qui se passait, je lui tendis l'enveloppe en pleurant, il ne comprit rien.
Ces jours furent si long. Chaque heure, atroce. Chaque fois que je cliquais sur le bouton central de mon Iphone pour vérifier si j'avais reçu un message, une vague de stress intense me traversait. Je n'avais rien à faire, juste attendre.
Mais encore. Ce que vous aviez oublié.
Vendredi 17, j'avais fêté mon anniversaire en avance avec mes amis.
Parce que oui, mon anniversaire était en réalité le mardi 21 février. Et je nous voyais nous rapprocher inlassablement de la date de manière dramatique et terrible. Une seule pensait m'obsédait, chaque minute, chaque heure dès ce weekend « pitié pas le jour de mon anniversaire ».
J'en venais à souhaiter le décès aujourd'hui, le 19 février, juste pour éviter de passer mon anniversaire à me demander si le décès arriverait ou non ce 21. Je voulais mais je ne voulais pas, évidemment. C'était déchirant. Je n'ai jamais eu si peur de mon propre téléphone. J'alternais crise d'angoisse interne où j'étais figée de peur, crise de pleurs soudaines, et maigres tentatives de parler d'autre choses par moment, en vain.
Ce furent, sans aucun doute, les jours les plus longs de toute ma vie.
VOUS LISEZ
Vingt-et-un [TERMINEE]
Non-FictionIl ne s'agit pas d'une histoire d'amour cette fois-ci, mais de mon histoire, véridique et personnelle, vécue en 2017. Désolée par avance, ça ne sera pas joyeux.