7° Eject

435 90 39
                                    

E J E C T

Jour 10

18:07

— Ce n'est pas ce vous croyez ! s'empressa de contester Uraraka. Ce n'est pas moi ! Je, j'ai effectivement été dans cette salle, mais, mais je ne l'ai pas tué ! Il faut me croire !

Mais c'était trop tard, et elle le savait. Elle aurait beau se défendre, les autres ne la croiraient pas. Midoriya baissa les yeux, il se sentait coupable. Il ne savait pas s'il avait bien fait de la dénoncer ou non. Il disait la vérité, mais parfois, la vérité est faite pour rester cachée.

— Est-ce que quelqu'un d'autre s'est rendu à la sécurité ou à la salle consacrée à la gestion de l'électricité du vaisseau ce matin ? maugréa Bakugou.

Tout le monde secoua la tête de gauche à droite. Le suspect principal était donc désigné. Était-ce vraiment elle qui avait assassiné Kaminari ? Ils n'en étaient pas sûrs,mais ils n'avaient pas d'autre piste fiable. L'anglaise était piégée comme un rat.

— Vous faites une énorme erreur ! Ce n'est pas moi ! Quelqu'un vous manipule, ou...

— T'es alcoolique hein ? la coupa l'américain.

Elle se raidit instantanément. Elle balbutia, ne sachant que répondre. Les larmes lui montaient aux yeux. Elle détestait se sentir aussi démunie, aussi nue, aussi faible.

— J'ai trouvé la bouteille que tu caches sous ton lit. Rien que ça te vaudrait d'être exclue de l'équipage. C'est une faute grave. Tes mains tremblent, tes pupilles sont dilatées. Même si tu n'as pas tué les Kaminari, tu restes un danger pour tout le monde ici, expliqua durement le capitaine du vaisseau.

Sa vision se faisait de moins en moins nette. Elle voyait trouble, ses yeux étaient trop embués de larmes et sa tête trop embuées de pensées négatives pour y voir clair. L'angoisse lui entravait le gorge, les mots se mourraient sur sa langue avant qu'ils n'aient le temps de franchir ses lèvres.
De toute façon, elle aurait beau leur crier de toutes ses forces qu'il s'agissait d'un malentendu, qu'elle avait beau être alcoolique, ça ne faisait pas d'elle une meurtrière, leur décision était déjà prise.

Il fallait bien trouver un coupable. Uraraka était toute désignée. Il découvriraient vite si elle était réellement l'imposteur ou non. Si les sabotages et les meurtres cessaient, ou se faisaient moins nombreux, ils pourraient en conclure qu'ils avaient éliminé la bonne personne. Mais dans le cas contraire, il leur faudrait voter à nouveau. En espérant que cette fois-ci, ils parviennent à dénicher le véritable traître.

— Bon, on va pas y passer des heures non plus. Que ceux qui votent pour éliminer l'anglaise lève la main, dit Bakugou en prenant l'initiative.

Sans hésiter, Asui et Shigaraki l'imitèrent. Bien que sceptique, Kirishima finit par se joindre à eux, influencé par le regard insistant de l'américain. Uraraka les regardait lever la main un à un, impuissante. Que pouvait-elle faire de toute façon, si ce n'est prier ? Son sort était déjà scellé, il n'y avait plus rien à espérer. Bien que visiblement réticent, Todoroki finit par suivre le mouvement. Il n'y avait que Midoriya qui continuait d'hésiter.

— C'est vraiment la bonne solution ? Je veux dire, on n'est pas tout à fait sûr que ce soit elle, et...

— La ferme le nerd. C'est toi qui l'a dénoncé, maintenant t'assumes.

Il ferma la bouche, et se résolut à voter. La mine décomposée d'Uraraka lui fendit le cœur, mais il était trop tard pour reculer. Le mal était déjà fait.

— Alors c'est comme ça... Je ne vais même pas mourir de la main du tueur, mais de la main de tous mes collègues... Ha... Ha ha...

Elle riait, mais ça n'avait rien d'un rire joyeux. C'était un rire nerveux et désabusé. Elle se laissa tomber à genoux. Les larmes avaient désormais quitté ses yeux, et se répandaient de part et d'autre de son visage. Elle était pitoyable.

— Alors c'est comme ça... Ha... J'espère que le tueur vous fera payer cette erreur très chère. Aller tous brûler en enfer, vous n'êtes que des abrutis ! Je vous hais ! Je vous hais tous !

Elle se laissait peu à peu basculer dans la folie. Elle n'avait plus rien à perdre. Elle allait de toute façon perdre la vie, à quoi bon continuer de s'accrocher à la raison ? Ça n'avait pas de sens. Mais au fond, ces missions sur le vaisseau, avaient-elles un sens ? Ce vote à main levée, était-il raisonnable ? Elle perdait pied, mais elle ne s'était jamais sentie aussi bien, aussi elle-même. Elle montrait son vrai visage. Elle riait sans pouvoir se contrôler, pleurait sans même essayer d'essuyer ses larmes.

— Et toi Bakugou, tu te crois malin ?! Écoute-moi bien, je vais te dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas ! C'est ta propre colère, ta propre folie qui tuera tout le monde ! T'es complètement taré et tout le monde le sait ! Tout le monde te hait ! Tu n'es qu'un...

Bakugou venait de la frapper au visage. Voilà qui n'allait pas arranger son cas. Les yeux écarquillés des passagers du vaisseau étaient désormais dirigés vers lui. Toujours à terre, Ochaco se tenait la joue, comme si le coup qu'elle venait de se prendre l'avait ramené à elle. Elle ne riait plus, mais ses larmes continuaient de couler.

L'américain bouillonnait de colère. Contre Uraraka, contre toutes ces paires d'yeux accusateurs, contre lui-même pour s'être laissé emporter. Mais Bakugou était Bakugou. Le sanguin, le colérique, le belliqueux. C'était dans sa nature de répliquer, de s'énerver. Il avait toujours été ainsi. Alors pourquoi le dévisageaient-ils de la sorte ? Il s'était laissé emporter par sa fureur, il ne fallait pas en faire tout un plat.

— Qu'on l'emmène au sas d'évacuation. Maintenant.

Personne n'osa se rebeller. Ils avaient peur, mais leur peur n'étaient dorénavant plus dirigée vers Uraraka. Les remords les envahissaient tous plus ou moins. Et s'ils venaient de commettre une erreur ? Et si leur véritable ennemi se trouvait en réalité à la tête du vaisseau ?

Mais tous le savaient, il était trop tard pour avoir des regrets. La cosmonaute en combinaison rose bonbon venait d'être balancée dans l'espace comme un vulgaire déchet. Elle avait eu beau se débattre, pleurer et crier comme si sa vie en dépendait - et c'était d'ailleurs le cas - rien n'avait pu les arrêter. Le châtiment avait été prononcé et mis en marche, et aucune parole n'aurait pu l"interrompre.

L'imposteurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant