12° Kill

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K I L L

Jour 26

09:15

Journal de bord de Shoto Todoroki:

Je ne voudrais pas m'avancer et crier victoire trop vite, mais je ne pense pas qu'il y ait un autre imposteur à bord. Ça fait neuf jours exactement depuis l'expulsion de Tomura Shigaraki, et il ne s'est pas passé un seul événement inquiétant depuis. Pas de sabotage des lumières, pas de meurtre, nous sommes tous bel et bien vivants. Je continue cependant de me méfier de Bakugou, mais j'admets que c'est purement personnel.

Je suis peut-être un poil trop optimiste, mais je pense qu'il y a de grandes chances que nous rentrions tous sains et saufs. Je vois bien que les autres restent toujours sur leur garde, mais je suis pour ma part trop soulagé d'avoir débusqué le coupable du meurtre d'Asui pour continuer à m'inquiéter. Et je me dis que ce n'est pas plus mal, parce que la peur qui les ronge semblent les tuer à petit feu. Ils dépérissent à vue d'oeil.

Voir Bakugou ainsi ne me fait ni chaud ni froid. C'est l'état de Kirishima et d'Izuku qui me préoccupe davantage. Surtout Izuku, pour être honnête. Je crois que je suis trop égoïste pour me soucier de la santé d'autrui pour le moment. Je pense que je vais d'ailleurs passer le voir tout à l'heure, après m'être avancé dans mon travail. Je ne l'ai pas encore mentionné, mais à cause des nombreux morts qui ne peuvent plus effectuer leurs tâches, nous nous retrouvons tous avec une charge de travail colossale.

Nous sommes donc tous fatigués, épuisés. Les autres sont anxieux, et pour ma part, je fais de mon mieux pour conserver mon calme. Il faut tenir. Il ne nous reste que quelques jours avant de rentrer chez nous, ce n'est pas le moment de flancher.

10:43

Journal de bord d'Eijiro Kirishima:

Vivement que ce cauchemar se termine. Quoique, même une fois retourné chez moi, je doute de pouvoir oublier facilement ce qui s'est passé ici. Le visage blême de Denki Kaminari vient me rendre visite chaque nuit, dans mes rêves les plus sombres. Ça fait deux semaines que je me réveille en hurlant, traumatisé par ses yeux vides qui m'observe et me reproche de ne pas être arrivé plus tôt, ce jour-là.

Je ne peux m'empêcher de me dire que si j'avais été plus réactif, si seulement j'avais réagi quelques minutes plus tôt, l'italien serait encore parmi nous. Je sais qu'il n'est jamais bon de ressasser le passé, mais je ne peux pas m'en empêcher. Son fantôme semble décidé à venir hanter mes pensées.

Je devrais me plaindre d'avoir beaucoup de travail, mais personnellement, bosser autant m'arrange. Ça m'aide à me concentrer sur autre chose que sur la mort de Kaminari. Je ne vais d'ailleurs pas tarder à quitter mon poste pour gagner les réacteurs, je dois m'assurer de déverrouiller les collecteurs.

10:59

Eijiro Kirishima traversa la cafétéria pour emprunter le couloir de gauche. Il ne croisa personne, le vaisseau semblait abandonné. Il n'était plus qu'habité par les remords du passé et les spectres en colère qui réclamaient vengeance. Mais l'Australien ne les entendait pas. Ou plutôt, il préfèrait faire la sourde oreille face à leurs plaintes silencieuses.

Mais peut-être aurait-il dû les écouter, cette fois-ci. Les fantômes étaient derrière lui, quand il s'est accroupi pour effectuer son travail et taper le code à dix chiffres. Ils criaient sans faire de bruit. Ils lui chuchotaient de s'en aller, maintenant. De prendre ses jambes à son cou, tant qu'il en était encore temps. Mais Kirishima ne les entendait pas.

Alors il se releva, vérifia ce qu'il avait fait une dernière fois avant de quitter les lieux. Il inspecta chaque détail de la machine pour décréter qu'elle était en parfait état de marche et qu'il avait fini ce qu'il avait à faire ici. Les âmes de ses collègues décédés hurlaient à s'en faire péter leurs cordes vocales fantomatiques. Cours ! Kirishima marchait vers la sortie. Fuis ! Vite ! Il sera bientôt là ! Mais les cris désespérés des fantômes s'éteignirent dans le vaisseau, en même temps que la vie de Kirishima qui venait de se prendre une balle au milieu du cœur.

Le tueur rangea son pistolet silencieux dans sa combinaison, et  disparut par une des trappes de ventilation.

11:35

Journal de bord d'Izuku Midoriya :

Bon, j'ai fini de recevoir les derniers documents à télécharger, je pense que je ne vais pas tarder à me rendre dans la sécurité pour réparer quelques câbles. Je ne vois plus Bakugou en ce moment, et ce n'est pas pour m'en plaindre. Je ne devrais sans doute pas dire ça étant donné les circonstances, mais j'espère qu'il est mort de déshydratation dans sa salle de navigation.

Ce n'est pas une blague de mauvais goût, je le pense sincèrement. Rien ne sert de continuer à cacher ce que je ressens à son égard: c'est de la haine pure et dure. Je crois que je n'ai jamais autant détesté quelqu'un. Je me demande même si j'ai déjà été amené à haïr quelqu'un d'autre que lui.

J'ai l'air d'une horrible personne, à souhaiter ainsi sa mort alors qu'un meurtrier était encore dans le vaisseau une semaine plus tôt. Mais il faut aussi me comprendre. Ce type me harcèle depuis notre première rencontre. Nous étions à bord de la même fusée, je ne lui avait rien fait de spécial, je me contentais de faire mes tâches dans mon coin sans déranger personne.

Et un jour, à la cafétéria, j'ai eu le malheur de poser mes yeux sur lui. Ce fut furtif, je n'avais même pas fait exprès de le regarder. Je mangeais seul, je pensais à autre chose, j'observais les alentours sans grand intérêt. Il n'a pas apprécié le fait que je le "reluque" en train de "bouffer", et m'a engueulé devant tous les astronautes présents. Je n'ai rien dit, j'ai écouté ses insultes en silence, la boule au ventre.

Depuis, il se moque de moi dès qu'il en a l'occasion, me rabaisse dès qu'il me croise, me met la pression dès qu'il le peut. J'avais peur au début, mais ma peur a fini par se transformer en haine. Je ne le tuerai pas, trop de sang a déjà coulé. Je sais me contrôler, contrairement à lui. Ça ne m'étonnerai même pas qu'il ait pété les plombs en navigation et qu'on le retrouve en train d'étrangler Kirishima. Ce type a une case en moins, c'est un vrai danger public. Je ne sais pas qui lui a confié le poste de capitaine, mais il est clair qu'il lui manquait une case aussi.

L'imposteurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant