𝚌𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚑𝚞𝚒𝚝

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Bonne lecture !

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— Je ne comprends pas, déclara Iwaizumi en évitant de peu la lame en bois qui manqua de lui frapper l'épaule.

Sa position légèrement vacillante, il se recula de deux pas pour essayer de replacer une distance de sécurité. Presque immédiatement, Oikawa rompit cet espace en un petit blond rapide : il leva à nouveau son épée d'entraînement et l'abbatit avec force sur celle qu'Iwaizumi leva pour se protéger. Faiblissant derrière le genou, le chevalier se laissa tomber à terre et roula plus loin, à bout de souffle.

Cette fois le prince se contenta de le regarder faire, les lèvres serrées.

— Qu'est-ce que tu ne comprends pas ?

Toute trace d'amusement avait quitté ses traits, et le ton de sa voix était sérieux, sans aucune fioriture. Oikawa avait laissé son sourire d'apparat dans sa chambre avant de descendre les longs escaliers jusqu'aux trois terrains d'entraînement.

À présent, tout son corps était rempli d'une adrénaline rugissante, une rage qui était partie de son ventre pour finalement arriver dans ses bras et ses jambes, ses muscles en feu d'enfin faire de l'exercice.

— Vous vous mettez en danger. Je vous fais confiance, mais je ne comprends pas.

Il releva son épée jusque devant son visage, les bras souples, et Oikawa fondit sur lui : le premier coup fut dur, et le deuxième encore plus. Le soleil commençait à se coucher sur les arbres nus et les vieux bâtiments du palais, et l'obscurité se faisait autour d'eux. Personne n'était passé pour allumer les lampes à huile, et les yeux des deux hommes se faisaient peu à peu à la baisse de luminosité.

L'air froid sur leur chemise pleine de sueur était aussi saisissant que des glaçons sur une peau nue.

— Tu n'as pas besoin de comprendre, grogna Oikawa.

Sa jambe passa derrière celle du chevalier, et il la ramena vers lui pour le déséquilibrer. Iwaizumi serra les dents et lui frappa le mollet pour le faire reculer. Au final, ils se fixèrent quelques secondes, le souffle court.

— Tu as choisi de me suivre, rappela-t-il en commençant à marcher lentement sans briser le contact.

Ils se tournèrent autour.

— Tu as dit que tu me suivais.

— Vous mettez votre vie en danger.

— Ma vie ne valait déjà pas grand-chose avant. Si elle ne peut pas au moins me servir de mise, alors à quoi bon ?

Iwaizumi plissa les yeux, de la colère sur les traits.

— Vous avez un plan que je ne connais pas, et que je ne comprends pas.

— Qui te dit que je ne suis pas en train d'improviser ? Que je joue un jeu auquel je ne comprends rien ?

Il se glissa au ras du sol pour l'attaquer d'en bas : le coup d'Oikawa fut arrêté in extremis. Un vent souffla de plus belle, et le prince afficha une expression étrange. Cela avait toujours été ainsi : entraîné par un combat, il finissait par laisser le reste de côté.

Sa politesse, sa retenue. Tout sortait sous la forme d'une détermination étrange. Ses muscles tiraient si fort qu'il ne pouvait même plus détacher ses doigts de son épée d'entraînement.

— Je ne le pense pas, dit Iwaizumi. C'est tout.

Cette fois, ce fut lui qui attaqua de font. Oikawa para agilement, et fit glisser la lame râpeuse le long de la sienne pour se dégager. Avec ça, il donna un coup de pied qui envoya son chevalier au tapis quelques secondes avant qu'il ne se relève.

Il essuya le coin de sa joue, pleine de terre.

— Je vous fais confiance, répéta-t-il. Mais je veux aussi vous protéger.

Oikawa eut un rictus.

— Je sais me protéger, Hajime. Je n'ai plus quinze ans.

Le chevalier secoua la tête.

— Vous savez vous battre. Vous le faites très bien. Mais vous ne savez pas vous protéger. Vous préservez. Je veux juste pouvoir être là quand vous foncerez vers le danger.

Il lui lança un regard profond, et Oikawa ne put retenir un soupir sincère. Son corps tremblait encore, mais la tension descendit. Il aperçut au dernier moment Iwaizumi se jeter sur lui : il fit un pas de côté, frappa dans l'arrière de son cou tout en levant la jambe pour couper les siennes, et le vit chuter dans la terre un peu humide du terrain.

Il s'assit sur son dos tandis que son protecteur mordait la poussière.

— Vous n'avez pas besoin de tout me dire.

— Je ne le ferais pas, de toute façon.

— Vous avez un plan.

— Oui, Hajime. Mais je préfère me dire qu'il peut disparaître à tout moment.

— C'est suffisant. Je suis votre chevalier : vous aurez au moins toujours une personne de votre côté.

Tandis que personne ne pouvait le voir dans l'obscurité et qu'Iwaizumi avait le visage contre le sol, Oikawa inspira profondément tandis que ses lèvres s'étiraient en un sourire un peu tremblant. Cela ne dura qu'un instant, et le grognement du chevalier attira finalement son attention.

La mâchoire tendue, le prince le vit taper trois fois par terre pour abandonner. Il se dégagea.

— J'ai une dernière question, fit-il en se relevant, le corps sale et les vêtements souillés.

Il croisa son regard, et Oikawa sut ce qu'il allait dire. Il le sut avant même que ses lèvres ne se mettent à remuer lentement.

Son masque désinvolte revint de lui-même et il écouta sagement :

— Est-ce que tout cela.... est-ce ça a un rapport avec les sentiments.... que vous aviez ?

Le prince ne répondit pas. Il l'observa quelques secondes, puis tourna les talons en direction de la petite bâtisse dans laquelle ils avaient trouvé les épées en bois.

La nuit se fit fraîche, tout à coup.

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Ad Vitam Aeternam | UshiOiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant