𝚌𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚟𝚒𝚗𝚐𝚝-𝚜𝚒𝚡

248 45 3
                                    

Bonne lecture !

_________________________

En entrant dans son bain brûlant, Oikawa grimaça.

Il sentit un picotement dans ses jambes, mais insista tout de même jusqu'à être presque entièrement dans l'eau. Ses cheveux furent mouillés, et il resta la tête immergée pendant de longues secondes. Quand il revint à la surface, Tooru ne put que s'allonger avec paresse.

Il regarda le plafond, les yeux plissés, et sentit les gouttes chaudes dans son cou jusqu'à ce que finalement la température devienne agréable.

Et quand ce fut le cas, il se traita mentalement d'imbécile.

Si son corps était un traître, alors son cœur lui était le véritable instigateur d'une révolution. Oikawa était un prince, un prince qui avait eu bien assez de temps pour s'habituer à ne pas vivre, mais survivre. Il savait comment faire, il en était maître : mais ce qu'il avait fait jusqu'à présent, à quoi cela pouvait bien servir s'il se laissait amadouer maintenant ?

Ushijima lui avait volé ses armes. Il l'avait mis à nu avant même de poser un doigt sur lui.

Quand ils étaient plus jeunes, il y avait eu deux occasions.

La première ? Un bal, réunissant les trois souverains les plus influents du continent. Une idée de son père, qui en vérité n'avait pas servi à grand-chose. Pendant ce temps, il avait fait la connaissance d'un garçon de son âge, un garçon qui l'avait suivi dans la ville entière pendant une semaine, jusqu'à son départ.

À leur première rencontre, ils étaient devenus amis.

À leur deuxième, quelques années plus tard, un peu plus que cela.

Il l'avait revu, et leur adolescence commençait à se terminer. Un conseil, encore plus important, alors que la guerre était sur le point de ravager leur monde. Trois royaumes, dont un qui avait déjà décidé de prendre les armes. Les deux princes avaient échangé par lettres, en secret, et avaient à présent plus de muscles, plus d'allure, plus d'assurance. Oikawa avait fait le premier pas, et Ushijima le deuxième. En quelques jours, ils avaient fait plus et plus vite que ce que la bienséance ordonnait.

Oikawa avait senti son cœur battre comme un fou, pour la première fois. Il avait ri devant ses expressions, rougi sous ses caresses, avait ployé face à la force de son rival. Cela avait été incroyable, unique, puis leurs pères s'étaient séparés avec des menaces et Wakatoshi était reparti.

Des années plus tard, il prenait sa capitale avec son armée, et Oikawa était fait prisonnier.

Par la fenêtre, le ciel était presque aussi sombre que le soir, alors qu'il n'était pas si tard. Le prince venait tout juste de se remettre, après deux jours à garder le lit. Et si son corps paraissait encore engourdi, ainsi plongé dans l'eau, il se sentait tout de même mieux.

- Imbécile, murmura-t-il et sa voix fit écho.

Pour la première fois, il se sentait loin d'être intelligent. Il l'avait toujours été, et avait suivi son instinct et sa nature : Oikawa Tooru était imbu de lui-même, égoïste, et faisait passer ses intérêts en priorité. Cela avait toujours été le cas, pour lui et sa survie.

Mais à présent, il déraillait. Son plan, celui qu'il suivait à la lettre en s'adaptant à chaque situation qui se présentait, n'avait pas prévu que ce serait lui le maillon faible.

Celui qui ferait passer ses sentiments avant tout le reste, celui qu'une caresse ou qu'un baiser sur le front serait suffisant pour briser en morceaux. Il était faible, amoureux, et s'il ne se reprenait pas très vite, alors il s'aventurait sur une pente glissante.

Trois coups résonnèrent à sa porte, et il leva les yeux au ciel. Une femme entra dans la salle de bain.

- Ma jolie, vous êtes vous toutes fait passer le mot ? Y a-t-il possiblement un bain que je puisse prendre sans être dérangé ?

Elle ne parut pas plus désolée que cela, et s'avança pour déposer des vêtements propres sur un coffre en bois. Il reconnut la première servante, celle à qui il avait demandé un entretien auprès du roi. Elle avait toujours cet air dans son regard, et il lui offrit un sourire en se prélassant un peu plus.

- Il vous a envoyé ?

- Le roi s'intéresse apparemment à votre santé.

Cela n'avait pas l'air de lui faire plus plaisir que cela. Si elle avait pu donner son avis, nul doute qu'il n'aurait pas été en sa faveur.

- Vous paraissez en pleine forme, remarqua-t-elle.

La jeune femme ne s'approchait pas plus que nécessaire, et soudain elle sembla sur le point de partir. Il l'apostropha :

- J'imagine que vous allez courir lui faire votre rapport. Vous lui direz en même temps que je veux lui parler.

Son visage se crispa et Oikawa rit en rectifiant :

- Pardon, pardon. Pouvez-vous lui transmettre mon humble demande ? Je souhaiterais pouvoir m'adresser à votre grand roi.

Elle renifla avec dédain, mais hocha tout de même la tête. Finalement, elle quitta la pièce sans un mot de plus, et Oikawa laissa son masque de côté pour soupirer de fatigue. Son bain lui faisait du bien, mais à chaque minute qui passait l'eau se faisait un peu moins chaude et finalement son corps se remit à frissonner.

Quand il se leva, le corps perlé de gouttes, son esprit était clair : il fallait faire le dernier pas, et tout de suite. S'il n'avançait pas sa reine sur l'échiquier, alors son roi tomberait immédiatement sur le plateau.

__________________________

👑

Ad Vitam Aeternam | UshiOiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant