I.1

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« Des années plus tôt »

— N'est-elle pas trop vieille pour faire son entrée, père ?

Damiano dévisageait le visage du duc de Navarres depuis de longues minutes déjà, sans l'ombre d'une expression sur son visage, il finit par se dire que leur père ne leur donnerait aucunes réponses. Pas même à leur propre mère dont la venue de ce paria venait de lui être informée en même temps qu'eux.

Soudain, les lèvres du duc s'étirèrent petit à petit pour en former un sourire satisfait. Sa sœur Olivia, qui fulminait à sa gauche et ne cessait de tripoter le coussin en tissu s'exclama impudemment face à lui :

— Comment pouvez-vous l'autoriser à revenir après ce qu'elle a osé me faire ?

Il aurait dû l'en dissuader, car le duc leur aurait finalement donné une réponse. Du moins, une partie. Cependant, l'excès de colère de sa sœur eut comme résultat, le visage fermé de leur père avec pour seule arme une lueur dangereuse au fond de ses pupilles grises.

Olivia hoqueta, effrayée par le regard que le duc posa sur elle. Détournant entièrement son visage sur le côté, ses yeux noisette finirent par fixer un point devant elle. Elle était bien consciente de son affront.

Personne dans cette famille n'était capable de soutenir le regard du duc de Navarres, tant par l'animosité qui s'y reflétait au fond mais aussi par ce dont il était capable.

Leur père méprisait l'insolence à son égard, et lorsqu'il avait l'occasion de leur donner une correction, il n'hésitait pas. Bien qu'Olivia ait dépassé l'âge de la vingtaine, le duc de Navarres ne semblait pas s'embarrasser du fait qu'elle soit trop vieille pour recevoir une punition. Par ailleurs, sa créativité dépassait leurs esprits. Ainsi, il était toujours angoissant de savoir que leur père leur préparait quelque chose.

Pendant ce temps, leur mère ne bougeait pas d'une oreille. Assise sur un fauteuil en cuir marron, elle concentrait son attention sur un objet qu'elle tenait entre ses doigts. L'anxiété se lisait clairement sur son visage mais aucuns d'entre eux ne voulurent en savoir la raison, ils la connaissaient tous. Et elle serait bientôt là pour plonger leur maison dans le chaos.

— Madame, gronda la voix du duc dans la pièce.

Dans un sursaut, la duchesse de Navarres leva rapidement sa tête dans sa direction pour ensuite lui répondre par un « oui » timide, craintif.

— Préparez-lui une chambre à l'étage.

— Bien sûr, votre Grâce, ajouta-t-elle simplement.

Sur ces mots, le duc de Navarres se dirigea vers la sortie du petit salon dans lequel ils étaient tous réunis. A l'excepté de Cesare (prononcé Tchézaré, prononciation italienne), l'ainé de la fratrie, qui avait été envoyé à la cour impériale à la demande de leur père.

— La chambre se doit d'être éloignée des autres.

— Bien entendu.

A la dernière remarque faite à leur mère, Olivia et Damiano s'échangèrent un regard, interloqués. Pourquoi l'éloigner de leurs chambres ? Ils avaient passé l'âge des plaisanteries. Était-ce une demande faite par leur benjamine ?

La porte se referma derrière lui dans un bruit sourd. Puis, lorsque ses pas s'éloignèrent dans le couloir jusqu'à n'entendre qu'un faible claquement sur le sol, leur mère se leva en poussant un petit soupir. Elle serra dans sa main gauche le pendentif en or, qui n'était autre qu'une lettre en majuscule attachée, et se mit à faire les cents pas dans la pièce. Ses allers-retours incessants commencèrent par les inquiéter.

— Votre visage est tiré par l'inquiétude, mère, commenta Damian en passant une main dans sa chevelure châtaine.

Il arqua l'un de ses sourcils en voyant sa mère s'arrêter au milieu du tapis, juste à côté d'une table basse en bois.

— Mes chers enfants, vous serez...étonnés de la revoir.

— Pourquoi sa venue vous rend-t-elle ainsi ? Etes-vous inquiètes que nous la tourmentions ? ajouta sa sœur en grommelant.

La duchesse de Navarres aurait souhaité leur confier une chose qu'ils ne savaient pas. Elle aurait aimé leur dire que la fillette qu'ils avaient eu pour habitude de moquer était devenue une femme qui ne manquait plus d'assurance. Son cher époux avait pris la décision de forger son caractère en l'envoyant dans leur maison de campagne. Pour lui, aucun Navarres ne constituerait un maillon faible. Mais Eliza, sa fille si tendre et affectueuse à l'époque, fut à ses yeux un enfant trop sensible pour leur monde. Lorenzo en avait eu honte...Puis, il avait trouvé un moyen de la rendre aussi insensible que lui.

— Faites attention à ce vous lui direz.

Elle redoutait sa venue plus qu'autre chose. N'avait-elle pas assisté à sa transformation ? Alors que le duc prenait de la décision de se rendre à la campagne, souvent pendant la période hivernale, la duchesse insistait pour l'accompagner. A l'époque, elle avait regretté de ne s'en être pas mieux occuper. De l'avoir abandonné face aux injustices que ses frères et sœurs lui témoignaient, cependant, le duc l'avait défendu de s'en mêler. Un Navarres se défendait seul. Un Navarres se forgeait dans l'humiliation et la douleur. Et pour Lorenzo, ses enfants ne seraient pas la cible de prédateurs.

La duchesse de Navarres avait cru que son mari en avait honte. Car elle était loin d'être aussi redoutable que Damian, ou moins vicieuse qu'Olivia. Avec le temps, sa cruauté avait dépassé celle de Cesare et elle n'avait jamais été autant terrifiée par un enfant que celui-ci. Eliza était devenue une arme dangereuse que son époux avait décidé d'utiliser contre ses ennemis.

Se décidant finalement de prendre congé à son tour, elle laissa derrière elle ses deux enfants en pleine réflexion. Il n'y avait aucune raison de s'inquiéter n'est-ce pas ?

— Je me demande comment Eliza a pu rendre notre mère aussi anxieuse, fit Damiano à l'adresse de sa sœur.

Il se leva du canapé sur lequel il s'était affalé depuis la venue du duc afin de laisser sa sœur, seule dans ses pensées. La curiosité avait définitivement pris le dessus et il était devenu à présent impatient de revoir sa sœur.

Tandis qu'Olivia commença par réellement s'inquiéter de sa présence en ses lieux. En voyant sa mère aussi troublée par sa venue, la jeune femme avait d'abord pensé qu'elle était heureuse qu'Eliza intègre entièrement leur famille. Des années plus tôt, leur père l'avait isolé à cause de son caractère faible. Maintenant, il la faisait revenir pour établir son début à la société malgré l'âge qu'elle avait. A vingt et un an, il était beaucoup trop tard pour une jeune fille née noble de faire son entrée dans le monde. Pourtant, son père avait fait un tel effort pour les préparatifs qu'Olivia ne pouvait s'empêchait de l'envier.

A ce bal, le prince héritier avait été conviée. Il n'était pas concevable qu'il s'éprenne de sa sœur alors qu'elle s'efforçait déjà de lui plaire.

N'hésitez pas à commenter, le chapitre est coupé en deux, premièrement pour réduire le temps d'attente mais aussi pour que je puisse moins me fatiguer de faire le chapitre en une fois x)

Holy QueenOù les histoires vivent. Découvrez maintenant