La cellule était envahie par l'obscurité, seul un ilot présentait une faible lumière qui éclairait la seule silhouette qui était à l'intérieur. Des grognements plaintifs atteints ses oreilles, informant Eliza que son esclave devait être dans une grande souffrance. Lors du combat, Thanos n'avait eu aucuns scrupules à enfoncer sa hache dans la cuisse de l'esclave. Pourtant, ce fut cette attaque qui avait rendu Echille irraisonnable. La colère et la douleur s'étaient mélangés et avaient pris possession de lui. Puis sa décision prise, il avait gagné son combat.
Sa voix s'éteignit aussitôt que la porte de la cellule s'ouvrit. Il se leva doucement en prenant soin de reculer de quelques pas avant de s'arrêter pour lui faire face. Echille redoutait la colère de son maître. Maître Leygnis était fou de rage d'avoir perdu cette grosse brute de Thanos, lui qui avait eu l'habitude d'être favorisé au sein de l'arène car le public aimait sa manière de prouver sa puissance lorsqu'il se battait. Combien de fois Thanos avait demandé à leur maître des faveurs, comme retirer le pain de la bouche d'un autre esclave pour être mieux nourri, punir un autre pour lui avoir manqué de respect ou de peur qu'il soit trop fort pour le battre avant leur combat. Et malheur aux filles que Déon détenait en ces lieux et qui attiraient l'œil de cette bête. Elles finissaient par être forcées pour le satisfaire et d'une manière ou d'une autre, elles devenaient faibles de peur qu'elles ne meurent.
« Si tu veux survivre ici, tu devras m'obéir. »
Ces mots qu'il avait si souvent entendu sortir de sa bouche et qui avaient fini par le rendre malade. Et jamais, Déon Leygnis n'avait autorisé leur combat jusqu'à présent car il savait qu'il se serait terminé ainsi. Echille avait donc deviné qu'il serait vendu, il en avait eu des doutes des jours avant alors que sa ration avait été diminuée et que son combat lui avait été informé la veille.
Avant même que la Navarres ne prononce une parole, il émit un ricanement et lui dit :
— Êtes-vous venus jusqu'ici me punir de l'affront que je vous ai causé devant votre public ?
Quelle insolence.
Eliza de Navarres ne put s'empêcher de sourire. Pensait-il que Déon était venu le punir ? Il n'oserait pas depuis qu'ils avaient échangé dans son bureau. Personne ne toucherait au bien d'un Navarres.
Le silence prit place. Elle ne voulut se résoudre à le rompre car cela devait le plonger dans une totale confusion. Il devait sûrement se douter que ce n'était pas son ancien maître car Déon, au vu de son caractère, l'aurait roué de coups au moment même où il aurait daigné lui rire au nez. Se serait-il laissé faire ?
Petit à petit, Eliza s'approcha de lui. Ce dernier commençait à reculer, jusqu'à ce que les lueurs de la lune ne l'éclaire totalement. A ce moment-là, il tressaillit en sentant le contact d'une main qui enveloppait sa joue gauche. Ses sourcils se froncèrent et tous ses muscles se tendirent. Qui était-ce ?
— Tu sembles contenir énormément de colère en toi, lui dit la jeune femme.
— Qui êtes-vous ? demanda-t-il en détournant brusquement le visage sur le côté afin que sa main ne le touche plus.
— Eliza.
Il finit par croiser son regard, du moins de ce qu'il arrivait à percevoir de ses yeux malgré son masque.
— ...Eliza ? souffla-t-il, désorienté.
— Eliza de Navarres.
— Vous êtes la femme du balcon ? s'exclama Echille.
Il n'aurait jamais pensé que sa prochaine maîtresse lui paierait une visite, et ce, dans sa cellule.
— Es-tu étonné que je vienne à toi ?
— ...N'est-ce pas une raison suffisante pour l'être ?
Elle garda le silence un moment avant de lui répondre finalement :
— J'étais venue m'assurer d'une chose.
— Que je sois toujours en vie ?
— Non. J'ai payé pour tes soins, un médecin ne tardera pas à arriver-...
Il lui rit moqueusement au nez.
— Suis-je aussi amusante ?
— Ne voyez-vous pas que les seuls soins que l'on m'apporte sont un vulgaire bout de tissu et de l'alcool ?
La jeune femme ouvrit la bouche mais la referma sans y laisser passer le moindre son. Elle se dirigea immédiatement à l'extérieur de la cellule pour en revenir des secondes après, avec une bougie à la main droite qu'elle tenait grâce au manche d'un support en bois. Elle découvrit alors un banc en bois sur lequel de la paille avait été déposé, semblant être un lit affreusement dur. Puis sur un des bords, elle aperçut une bouteille et un tissu sale.
— Sybel, appela-t-elle d'une voix forte.
Soudain, la soldate apparut à l'intérieur de la pièce.
— Oui madame ?
— A quoi sert l'argent que je vous ai donné ?
Elle ne lui répondit pas. Son maître ne donnait le privilège à aucun esclave d'être soigné par un spécialiste. Ils apprenaient à le faire d'eux-mêmes afin de survivre.
Eliza serra des dents. A quoi lui servirait un esclave mourant après avoir dépensé une fortune pour lui ? Brusquement, son bras s'élança jusqu'à la gardienne et son poing s'abattit violemment sur son visage.
Sybel manqua de tomber face à la force de son coup et se rattrapa contre le mur, une main englobant une partie de sa mâchoire et sa bouche.
— Votre maître a-t-il l'habitude de tromper son entourage ? Croyez-vous que moi, je ne me soucierais pas de l'argent que je dépense et pour qui je le dépense ? Ne vous ai-je pas informé, à vous et à votre maître, que cet esclave est important pour le duc ?
Elle prit un temps avant de reprendre.
— Informez-en votre maître. Demain, je vérifierais la blessure de mon esclave et si je m'aperçois que les points de sutures n'ont pas été correctement faits et que sa plaie n'ait pas commencé à s'infecter à cause du pitoyable endroit dans lequel il loge...Eh bien, je serais ravie de le voir sur l'échafaud.
Immédiatement, la malheureuse se courba devant Eliza en entendant ses mots et se mit à balbutier des excuses.
Était-ce trop demandé de prendre soin d'un esclave blessé ?
— ...Pourquoi ? se mit-il à murmurer dans le vide.
— Pourquoi ? entendit la Navarres dans son dos. Tu es à moi Echille. Tout ce qui est à moi devra être respecté et bien traité.
Echille contracta sa mâchoire. N'était-il à leurs yeux qu'un objet ?
— Pourquoi moi ?
Doucement, elle se mit à pivoter afin de le regarder.
— Parce que je l'en ai décidé ainsi.
Parce qu'il était une âme rebelle qui savait encore pourquoi et à qui prêter allégeance. Qui trahir et qui protéger. Parce que le chevalier des Brumes n'était pas courageux mais inconscient lorsqu'il était question de sa vie lorsqu'il y avait un but précis. Parce qu'Echille saura rendre sa vie moins difficile à vivre lorsqu'il sera à ses côtés.
Et pour cela, Eliza devait d'abord gagner sa confiance en établissant une relation saine. Réussira-t-elle alors que le duc lui avait toujours appris que manipuler était la seule chose dont elle aurait besoin pour se protéger ?
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Holy Queen
Historical FictionDans l'ombre d'une mort subite, des conspirations naissent. Au milieu d'une tragédie, l'amour se déchire. Pour gouverner, il faut de nombreux sacrifices. Haïr est exempté de raison, il ne suffit que d'un acte pour noircir le cœur. La cruauté surgir...