Shut up !

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* Aborde des thèmes sensibles, comme le harcèlement, la violence, mention d'envies suicidaires

Faites attention à vous ♡

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- Because i'm a toy, your toy.

Une fois cette courte phrase prononcée, je leur tourne les talons, l'air décidé, ne voulant plus rester ici ne serait-ce qu'une seconde de plus. Seulement, ils ne sont pas du même avis et surement pas d'accord de me laisser filer si facilement. L'un d'eux m'attrape par le col, me faisant ainsi tomber vers l'arrière, les insultes fusent l'instant d'après, pourtant ça ne me fait plus rien, j'en ai tellement entendu... Puis l'un d'eux vient alors claquer ma joue gauche sans pitié, faisant résonner le bruit de la claque, ça pince, et je comprends rapidement pourquoi, la violence du coup m'a ouvert la pommette. Je déteste mon travail, et encore plus ses hommes. Je ne sais même pas pourquoi ils font ça, quels sont leurs motivations à prendre un tel plaisir à me lyncher dès que l'occasion leur est offerte, j'ai toujours été correct, j'ai toujours détesté les problèmes et même si je n'aime pas mon job, je m'applique à faire ce qu'on me demande et satisfaire mon patron, il me faut bien un salaire pour vivre...

Avec le temps, j'ai appris à me concentrer sur autre chose que sur les coups que recevait mon corps avec fureur, presque à dissocier de mon corps afin de ne pas les sentir. Je n'ai qu'une chose à faire ; attendre qu'ils se lassent de moi, rester un temps à terre, le temps qu'ils partent et être sûrs qu'ils me laissent tranquille pour ce soir avant de pouvoir enfin me relever et rentrer chez moi, soigner les dégâts, me doucher et me coucher. Un quotidien fort peu intéressant.

Ce soir-là n'échappe pas à la règle, je ne sais pas durant combien de temps les coups pleuvent, mais lorsqu'ils s'arrêtent, je ne bouge pas, sur l'instant je ne remarque même pas qu'ils se sont lassés. Puis, peu à peu, j'entends leurs rires s'éloigner jusqu'à disparaitre après de longues minutes. Un profond soupire passe la barrière de mes lèvres, désormais ensanglantées. Doucement, douloureusement, je me redresse, alors que la nuit est désormais bien installée sur la ville, lui donnant un air doux et apaisant, à mes yeux.

Avec le peu de courage et de force qu'il me reste, je pousse sur mes mains afin de me relever de l'asphalte froid et humide, puis je quitte rapidement cette rue, aussi rapidement que mon corps abîmé me le permets, comme une tentative vaine de fuir mes harceleurs. Je presse le pas jusque chez moi où j'ôte à la hâte mes chaussures, une fois bien sûr que la porte est close et bien verrouillée. Ce après quoi je prends le chemin de l'étage avant de me rendre à la salle d'eau où je me fais couler un bon bain bien chaud, rien de mieux pour se détendre après une telle journée. Pendant ce temps, je passe par ma chambre afin d'y prendre quelques affaires pour m'y glisser après mon bain et avoir soigné mes nouvelles plaies ainsi que les plus anciennes, surement réouverte sous la violence des coups.

Une fois cela fait, je me rends à nouveau dans la salle d'eau, réchauffée par la température de l'eau, eau dans laquelle je ne tarde pas à venir me glisser, doucement, très doucement, gémissant de douleur à plusieurs reprises lorsque le liquide bouillant entre en contact avec mes plaies ouvertes, me laissant une sensation plus que désagréable de brûlure. Une fois entièrement entré dans cette étendue d'eau fumante, je m'autorise un soupir, puis quelques larmes, des larmes de douleur, de peurs, d'incompréhension. Je me sens minable.

Apres très certainement une bonne heure, je sors de l'eau, rinçant ma peau alors encore couverte de savon et de sang à demi coagulé. La mort dans l'âme et le corps endoloris, je m'enroule dans un grand peignoir avant de quitter la pièce en un soupire de douleur. Mes jambes me font un mal de chien, je crois bien n'avoir jamais ou alors très rarement eu aussi mal, si bien que je ne pense pas avoir un jour été aussi heureux d'arriver à mon sofa. Seulement, le repos n'est que de courte durée, car la sonnette de la porte vient résonner dans toute la maison et en puissance dix dans mon crâne. Cinq minutes, justes cinq petites minutes de repos, c'est trop demandé ?

Lâchant un juron, je me dirige vers la porte d'entrée, non pas sans difficulté et sans tituber face aux douleurs qui viennent me foudroyer dans tout le corps. Derrière la porte, Romain, mon meilleur ami, il ne manquait plus que ça, pour le coup, je ne veux vraiment pas le voir, je n'ai pas le courage de répondre à son interrogatoire.

- Qu'est-ce que tu fais ici ? On ne t'a jamais dit de prévenir avant de passer ?

- Bah cache ta joie hein, ça fait toujours plaisir...

- Désolé, je suis occupé...

- T'as juste cinq minutes à m'accorder ?

- Romain, ce n'est pas le moment, une autre fois s'il te plait.

- Qu'est-ce que tu caches ?

- Rien, on se voit plus tard, d'accord ?

- Laisse-moi entrer. Déclare-t-il sur un ton autoritaire.

Sachant qu'il ne lâcherait pas l'affaire, quitte à forcer le passage, j'ouvre la porte, le laissant voir les parties de mon corps qui ne sont pas cachées par le peignoir, pourtant le travail n'est pas fameux. Mes jambes sont peintes de nombreux bleus et autres blessures encore saignantes. Ses yeux s'écarquillent alors que sa réaction ne se fait pas attendre.

- Putain, qu'est-ce que tu as fait ? Qui t'as fait ça ? Son regard croise le mien que je ne peux empêcher d'être larmoyant. Donne moi les noms. Ordonne-t-il sèchement.

- Ce n'est rien, je suis juste tombé dans les escaliers au travail, j'étais épuisé... Je tente doucement.

- Bien-sur, tu me prends pour un con Ash, donne- moi les noms, vite.

- Ne fais rien, tu ne ferais qu'empirer la situation. Je sursaute lorsqu'il claque violemment la porte.

- On est à l'abri des regards, maintenant on va se poser et tu vas tout m'expliquer.

- Je ne veux pas t'inquiéter avec ça.

- C'est déjà fait, maintenant explique... parle-moi, reprend-il bien plus doux, je ne veux pas qu'on te face du mal, je veux être là pour toi, te protéger, Ash, explique-moi s'il te plait...

Incapable de lui dire ne serait-ce qu'un mot, je me contente alors de venir me blottir dans ses bras, les larmes coulant d'elles même jusqu'à venir mouiller son pull, le ruinant en un temps record. Heureusement, il me laisse le temps, venant nous installer sur le sofa en caressant, en de doux et rassurants gestes, mon dos, lui aussi meurtri par les coups, attendant patiemment que je me calme. Ce que je fais, une vingtaine de minutes plus tard. Alors, à ce moment, je sais qu'il en sait à la fois trop et pas assez. Alors, appréhendant, je lui raconter tout de A à Z de ce que je vis quasiment chaque jour de ma pauvre existence.

- Je suis un minable hein ? Pas capable de se défendre, ils ont raison, je ferais mieux de mourir. Finis-je en pleurant à nouveau.

- Ferme là, tu m'entends, tu penses vraiment ce que tu viens de dire ? Te rends-tu au moins compte de ce que tu viens de dire ? Tu t'entends parler ?! Je ne veux plus jamais, je dis bien jamais, t'entendre dire de telles choses, surtout à ton sujet... sinon je te promets que je te tue de mes propres mains. C'est clair ?

- Je t'en prie, tu n'as qu'à le faire, plus rien ne me retiens ici.

- T'as fini de dire de la merde comme ça ?

- Donne moi juste une bonne raison de ne pas me foutre en l'air alors ?

- Moi, je suis là moi merde, je tiens à toi, je t'aime, je suis amoureux de toi putain, tu le comprends ? Je n'ai aucune envie de voir l'homme que j'aime ce foutre en l'air à cause d'un groupe de fils de putes. Je veux pouvoir être ta raison de vivre. Je vais arranger tout ça, je te le promets. Ces mecs vont te laisser, plus jamais ils ne te toucheront, j'en fais une affaire personnelle, je ne vais certainement pas laisser ça passer.

Romain n'avait pas menti. Il avait parfaitement tenu sa promesse, ses hommes n'avaient plus jamais levés la main sur moi, ils étaient même venus s'excuser, me laissant sous le choc. De plus, l'homme qui m'a sauvé la vie est devenu le centre de celle-ci ; mon petit ami. Jamais il ne m'a laissé tomber, et je lui en suis reconnaissant à jamais. Il m'a apprit à vivre à nouveau, à vivre sans peur, et pour cela, il a commencé par me convaincre de démissionner, ce que j'ai rapidement fait. Désormais, mes seules peurs étaient de ne plus l'avoir à mes côtés et de ne pas me réveiller un matin.

One Shot AléatoiresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant