Chapitre 11 - La routine

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- Des loups ! Il y a plein de loups !

Assis à table pour le souper du soir, les trois guerriers mahrs buvaient les paroles du grand roux. Ils écoutaient tout en mangeant les yeux émerveillés ou apeurés pour d'autres.

- Des loups tellement immenses que je ressemble à une simple brebis à côté.

Bertolt frissonnait sans retenue. Il était effrayé en s'imaginant ces loups immenses face à la carrure imposante de Warran, alors que les deux blonds se penchaient encore plus en avant buvant toutes les paroles de l'homme à tout faire qui tapait sur la table en bois pour exagérer ses propos. Cette dernière était pleine de monde. Il y avait les trois guerriers mahrs, Licht, Warran, Madame Sonne et une des deux femmes de maison en service ce soir-là. Ils avaient appris qu'elle s'appelait Grete et qu'elle ne travaillait que l'après-midi et la nuit dans la maison ; c'était une autre qui les avait appelé pour le petit-déjeuner.

- Ils ont des mâchoires comportant une multitude de dents aiguisées comme des couteaux. Un croc et vous pouvez dire adieu à la partie de votre corps endommagée. De plus, ils n'ont pas peur de l'être humain et attaquent sans différencier l'homme du mouton.

Madame Sonne soufflait.

- Arrête de les effrayer autant.

Puis, elle se tournait vers les trois jeunes guerriers mahrs en posant un regard bienveillant sur chacun d'eux.

- Ne vous inquiétez pas, tout ce qu'il raconte est faux. Il y a certes des loups, mais ils sont inoffensifs et nous craignent tellement qu'il est difficile de les apercevoir. En plus, vous êtes en totale sécurité ici.

Licht prenait la parole.

- Et puis, si des loups arrivent près de chez nous, on leur balancera Warran. Ça les nourrira pendant au moins un mois.

Ils pouffaient tous de rire, même Grete qui positionnait un mouchoir devant sa bouche pour ne pas se défaire de son visage impassible. Sauf Warran n'avait pas ri et regardait avec des yeux en soucoupe la jeune brune assise à côté de lui.

Cet atmosphère conviviale et familiale réchauffait le cœur de Reiner. Toute cette situation semblait naturelle, vraie et tellement apaisante qu'il se sentait chez lui. C'était bien la première fois de sa vie qu'il avait l'impression d'avoir le droit de vivre sans porter sur ses épaules devenues larges avec le temps le fardeau d'ancêtres qu'il n'avait jamais connu.
Ses yeux devenaient larmoyants de bonheur ; Reiner se sentait tellement bien.

Alors qu'il détournait légèrement sa tête pour ne pas être aperçu dans ce moment que d'autres auraient pu considérer de faiblesse, il croisait un bref instant le regard tendre de Licht ; elle l'avait remarqué.

Les trois enfants avaient été mis en quelque sorte sous la garde de la maison Sonne et n'avaient donc plus l'obligation de travailler sur les terres à défricher. Cependant, pour ne pas s'ennuyer et ne pas passer leurs journées à ne rien faire, ils s'étaient naturellement proposés pour s'occuper des tâches du domaine. Pendant cette première semaine, les guerriers mahrs aidaient Warran avec les moutons ainsi que la grange. Une fois même, les garçons s'étaient retrouvés sur le toit de la maison pour réparer une partie des tuiles qui avec le temps et le vent s'étaient brisées.

Quand ils ne travaillaient pas sur le domaine des Sonne, ils se dirigeaient avec Licht et Warran sur les terres à défricher où les activités avaient repris. Ils distribuaient eau, nourriture et surtout boissons chaudes pour permettre aux réfugiés de continuer ce travail pénible avec un certain confort.

Ils se retrouvaient tous ensemble à table pour souper avec Licht, Warran, Madame Sonne, Grete le soir ou Mins le matin pour le petit-déjeuner ; ils formaient une petite famille.

Après avoir bien mangé, ils s'installaient toujours tous ensemble au salon devant la cheminée où un feu crépitait. C'était une forme de routine, une très belle routine. Licht leur avait appris à jouer aux échecs et les élèves avaient largement dépassé le maître.

- Ce n'est pas possible !

Se frottant le visage de ses mains, la brune se plaignait. Face à elle, Bertolt avait un sourire victorieux.

- Tu perds parce que tu n'es pas autant manipulatrice que lui.

La grande main de Reiner se posait sur l'épaule de Licht. Il s'était positionné derrière elle pour la consoler d'une petite pression sur sa délicate épaule.

- Je te vengerai Licht.

Après avoir entendu les paroles du blond, elle avait retrouvé le sourire aux lèvres en se levant de sa place pour que Reiner s'y assoit. Une partie entre le blond et le brun commençait enfin.

- D'après toi Annie, qui des deux va gagner.

Licht concentrée sur la partie en cours l'avait questionné sans se retourner, et n'ayant pas de réponse, elle retrouvait la blonde assise aux côtés de Madame Sonne qui lui enseignait les bases de la broderie. La petite blonde était tellement concentrée dans sa tâche que ses sourcils clairs se fronçaient.

Grete entrait dans la salle avec un plateau en main.

- Vous aimerez du thé ?

Ils hochaient tous de la tête.

Licht se positionnait derrière Reiner et observait son jeu face au brun. Elle le guidait silencieusement pour les premiers coups puis, elle le laissait se débrouiller et il finissait par gagner la partie.

- Une autre partie. Je veux ma revanche !

N'ayant jamais perdu face au blond, Bertolt semblait touché dans son égo.

- J'ai eu un bon professeur !

Il se retournait vers la brune et souriait de toutes ses dents. Puis, croisant le regard de son adversaire, il lâchait un rictus moqueur.

- De plus, c'est mon petit porte-bonheur.

Là, il ne l'avait pas remarqué mais la brune dans son dos avait rougi, ce qui n'échappait pas aux yeux de Bertolt qui ressentait une forme de jalousie depuis quelques temps.

Après la seconde défaite de Bertolt sans l'aide cette fois de Licht, les garçons avaient joué sans relâche jusqu'à tard le soir avec seulement des défaites du grand brun pendant que les femmes assises proches du chaleureux foyer brodaient ou rapiéçaient certains vêtements.

Alors qu'il se faisait tard et que Warran avait fait sa ronde du soir pour vérifier les moutons et était rentré les rejoindre au salon, Madame Sonne proposait de monter se coucher. Les enfants acceptaient en ressentant enfin le lourd poids du sommeil sur leurs paupières.

Ils montaient en file indienne les longs escaliers en bois quand la porte d'entrée s'ouvrait sur un homme l'air fatigué.

Licht avait dévalé les marches d'escaliers en manquant de s'étaler de tout son long et s'était jetée dans les bras de l'homme qui venait de passer la porte.

- Papa !

Le Soleil à travers la Brume (Reiner Braun x OC) Partie 1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant