Chapitre VIII - Les Drones

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Je suis prise d'horreur en voyant Iris. Je vois déjà son corps réduit en lambeaux. Les drones lui font face dorénavant. Je vois sur son visage son expression de surprise et de peur. Sans me laisser un instant de réflexion, je jaillis d'entre les taillis et agite les bras dans tous les sens.

- Hé ! Hé ! C'est moi qu'il faut viser !

Ils font volte-face pointant leurs canons dans ma direction. Je sens des sueurs froides me couler le long de la nuque. Mon estomac se contracte et mes jambes deviennent molles sous mon poids. J'ai soudainement un sentiment d'impuissance devant eux. Je sais que je n'aurai pas le temps de dire "ouf" que mon corps aura exploser dans une gerbe de sang et d'éclats d'os.

Gabriel sort des buissons et pointe son arme vers l'un d'entre eux. Iris me fixe, les yeux cernés d'effroi. "fuyez" leur dis-je sans qu'aucun son ne dépasse mes lèvres. J'ai la gorge tellement nouée après tout. Gabriel hoche la tête et entraîne Iris dans les fourrés. L'un des drone les voit et se jette à leurs trousses.

- Non ! Cris-je.

L'autre me barre la route. Je suis soudainement portée par une force étrange enfouie dans mon subconscient qui me pousse à l'abri derrière le tronc d'un arbre. Les balles fusent dans l'air et déchiquettent l'écorce de mon arbre. Mes jambes me poussent à ne pas attendre et courir. L'instant d'après le tronc se fend en deux et s'effondre dans des craquements de branches raisonnant dans toute la forêt me donnant l'impression que des milliers d'os se brisent.

Les fougères me fouettent les cuisses. Je dégage avec les mains les branches me barrant le passage. J'enjambe les bottes de terre, branches et trous à une vitesse fulgurante. Je zigzague pour éviter de me prendre une balle. L'une d'entre elle siffle au dessus de ma tête. J'essaye de prendre les chemins les plus tortueux pour ralentir le drone, mais la nature se retourne contre moi à l'instant où j'escalade une pente. De l'autre côté, les arbres se font plus rares et deviennent de hauts pins, les fougères et autres buissons deviennent inexistants laissant place à un tapis d'aiguilles de pin brunes. Le drone se rapproche à une vitesse dangereuse. Les balles que j'évite de justesse, rencontrent le sol en soulevant des jets de terre çà et là. Je cherche une issue qui pourrait me permettre de ne pas me retrouver en gruyère géant. Rien que des troncs. Je ne peux même pas escalader un arbre. Et puis à quoi bon, je me retrouverais coincée et ce serai la fin.

Les instants qui suivent ne durent que quelques secondes mais sont pour moi une éternité. Une balle m'érafle la cheville, je trébuche et roule sur le sol. Je heurte de plein fouet un tronc d'arbre. L'air est chassé de mes poumons en un clin d'œil. Je fixe avec horreur le drone foncer droit sur moi, le canon pointé vers mon crâne. Je ferme les yeux attendant la balle me faisant exploser la cervelle. Mais un déclic retentit à la place du coup de feu. Le drone passe au dessus de ma tête dans un sifflement assourdissant. Il décrit un arc de cercle et s'éloigne au loin. Je reste clouée sur place, hébétée. Il n'avait plus de balle. Plus de balle! La chance est avec moi.

Je me relève en tremblant, m'aidant de l'arbre contre lequel je suis pour ne pas tomber. Je soupire de soulagement. Mais ma joie se dissipe en me rendant compte qu'il n'allait pas tarder à revenir - lui ou un autre - pour m'achever. Je me remets en marche en trottinant. Je jette des coups d'œil dans mon dos pour m'assurer qu'il ne soit pas revenu. Je remarque à une centaine de mètres que les fougères reprennent du terrain. Je m'y dirige sans attendre. Au moins là-bas je serai à couvert. Je pourrai toujours me tapir au sol si j'entends le vrombissement des drones.

Je me demande comment vont Iris et Gabriel. J'espère que rien ne leur est arrivé. Je m'en voudrai tellement s'ils périssaient par ma faute. Et Iris est la plus importante. Sans elle, la prophétie serait brisée et je n'aurai plus aucune raison de me battre. D'ailleurs que m'arriverait-il si les Coldiens me capturaient. Me considéreraient-ils comme une fugitive condamnée à mort ou bien comme une prisonnière de pirates qu'il faut sauver ? Vu comment le drone a essayé de me réduire à l'état de chaires épars, je ne pense pas que je soit la princesse en détresse mais plutôt la fugitive. Et comment je me considère? Comme une fugitive ou une rebelle? Peut-être ni l'un ni l'autre. Je ne sais pas moi même dans quel camp je suis. Mais une chose est sûre, les Coldiens ne sont pas des bienfaiteurs. Tout me pousse à me dresser contre ma patrie. Pourtant rien ne me pousse à défendre une religion en laquelle je ne crois pas. Je reste encore dans le vague mais je suis certaine d'une chose. Je ne suis plus une Coldienne.

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