8. L'ours

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L'écureuil sur lequel je viens de trébucher est blessé. Je le regarde longuement, l'inspecte de tous les côtés, pour en conclure que cette bête touffue n'est en rien un automate. Mais je dois me dépêcher de sortir de cette forêt. Je m'apprête à partir. Je me relève, je réfléchis, puis, avant d'avoir le temps de changer d'avis, je me retourne et prend le petit animal fragile dans mes mains. Je me met à courir vers les rochers annonçant la fin de la forêt. Je sens la mignonne bestiole contre mon torse. J'atteins enfin la pierre, mais la peur n'a pas fini de me ravager. Je me retourne, et, à la place des arbres qui hantaient mes cauchemars, il y a...

Un ours de deux mètres de haut, qui me regarde méchamment. Je ne sais pas comment il a pu me trouver. Je le soupçonne d'être un automate, lui aussi. Le Survivant aurait-il placé quelques uns de ses robots dans l'environnement animal? 

L'ours est beaucoup trop gros et fort pour être battu par une maigre poussière de l'univers comme moi. Ma seule solution, celle que j'ai utilisé vraiment trop souvent, c'est fuir. Alors je fuis. Une troisième fois. Je sens la bête gigantesque qui me poursuit. Alors je cours de toutes mes forces, autant pour moi que pour l'écureuil que je tiens toujours dans la paume de ma main. Je sens que j'ai vraiment besoin de le sauver. Personne ne mérite de mourir si ce n'est pas de vieillesse. Même pas un écureuil. 

Je cours toujours, jusqu'à ce que j'arrive à une impasse. Une magnifique montagne infranchissable. J'ai vraiment peur. Je peux essayer de me battre, ou alors rester là à ne rien faire. Dans les deux cas, j'ai tout à perdre. En commençant par la vie. Mais je ne fais ni l'un ni l'autre. Je regarde la forêt toujours visible, et je cours entre les jambes de l'ours, qui est complètement déboussolé. Je tourne autour de lui aussi vite que mes petites jambes humaines me le permettent, et je fais bien en sorte qu'il me suive des yeux. Il a l'air d'avoir la nausée, exactement comme je l'avais prévu. 

Je sais maintenant que Le Survivant n'avait pas prévu de faire face à une fugue. Tout ses robots sont conçus pour ressembler le plus possible à leur confrères êtres vivants. Ils ne sont pas du tout faits pour combattre une petite fille qui veut leur échapper. L'animal tombe à la renverse, évanoui. 

Je retourne sur mes pas pour aller chercher le petit être mal en point que j'ai laissé devant l'impasse. Puis je reviens vers la forêt, et je cherche un autre passage. Je trouve une petite grotte où m'abriter. Je pose l'écureuil par terre. Je veux faire ce qui est en mon moyen pour l'aider. J'arrache un bout de mon T-Shirt pour bander son petit ventre. C'est bien plus difficile que les livres ne veulent le faire croire. Je dois m'y prendre avec les dents. Quand je réussis enfin, j'attache ce petit bout sur le corps du bonhomme, pour stopper le sang qui coule. Je prend un temps pour me demander combien de litres de sang cette bête peut-elle bien avoir dans ses veines. Je la laisse se reposer. Je la regarde, et je décide de garder cet écureuil avec moi dans mon voyage. Je lui dis :

"Toi mon petit chou, je vais t'appeler Pilou."


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