Chapitre 21

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Bon ramadan mes amours. YAlna niou YAllah nangou té yombalal niou 💕
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Aissata

Je sors de l'aéroport et tombe net sur Ahmadou. Mes sous sont trop des traitresses. C'est Mouna et Madina qui étaient censées passer me chercher. Mais à ce que je vois, elles ont décidé de jouer aux avocates du diable.
- Salut toi.
- Salut.
Il me serre brièvement dans ses bras puis me prend ma valise des mains.
- Je suis garé au parking. Ça a été ton voyage ?
- Ouais, tranquille.
On marche en silence jusqu'à la voiture où il met la valise dans le coffre pendant que je m'installe sur le siège passager. Il me rejoint quelques secondes plus tard.
- Bisou ?
Je lui fais un bisou sans aucune énergie. Il démarre et prend le chemin de la maison.
- Tu me fais toujours la tête ?
- Non.
- Ça fait quatre jours déjà, tu ne penses pas que ça suffit là ?
- Je ne fais pas la tête, je te dis.
- Pourquoi tu es aussi froide alors ?
- Rien.
- Ôte-moi d'un doute, tu ne crois pas à ce qu'a dit cette folle de Fina ?
- Non.
- Ton non manque vraiment de conviction. Et c'est très blessant.
Que dire ? Il y a un petit malaise qui subsiste malgré le fait qu'il ait nié en bloc les insinuations de Fina. En ce qui concerne l'anniversaire, l'explication qu'il m'a donné c'est qu'il ne voulait pas créer de tensions sans raison. Il m'a également affirmé que toute leur équipe était présente, et qu'il avait fait un simple flash par courtoisie. Une version aux antipodes de celle de Fina.
Quand je lui ai rapporté tout ce que j'avais entendu, il s'est violemment emporté. Avant mon départ pour Genève, il m'a assuré qu'il l'avait remise à sa place et que dorénavant leurs rapports se limiteraient à du strictement professionnel. De ce fait, la seule explication logique, c'est que Fina m'a vue au resto et a décidé de semer la zizanie dans mon couple.
Pourquoi je suis fâchée contre Ahmadou ? Moi même je ne peux le définir. Je lui en veux c'est tout. Je le tiens pour responsable du comportement de Fina. Et pour être tout à fait honnête, toutes ces méchancetés que j'ai entendu ont réussi à m'atteindre dans mon amour propre.
- Bref. J'ai quelque chose à te dire, commence-t-il.
Je reçois un appel de Néné à cet instant, ce qui l'interrompt. Elle me fait part du décès de son beau-père, le grand-père de Taha. Oh papi... Cela fait un bon bout de temps que je ne l'ai pas vu. Aujourd'hui, je le regrette...
Je raccroche avec Néné et appelle aussitôt Taha. Il me fait savoir qu'il va bien, qu'il tient le coup. Thieuy aduna. Ku ko diap diapo si dara. (La vie est si éphémère)
Le reste du trajet, on ne se parle pas vraiment Ahmadou et moi. À la maison, il fait rentrer ma valise, me fait un autre câlin et se retire en promettant de me rappeler plus tard. Mais, cela ne se fait pas car je m'endors aussitôt après le dîner.
En arrivant au bureau le lendemain, j'ai la désagréable impression que tout le monde a les yeux rivés sur moi. Dans les couloirs, lors des réunions. Les conversations s'arrêtent quand j'arrive, les yeux me suivent. Sans aucune raison apparente. Ça m'étonnerait que ce soit à cause de ma relation avec Ahmadou. Je veux dire, ils doivent être passé à autre chose depuis, non ? Sauf que je ne vois pas d'autre explication.
Vers 13h, je croise Ahmadou au parking. Il s'apprête à aller au Salatul Jumu'ah (prière du vendredi) tandis que j'attends mes sœurs pour qu'on se rende à la levée du corps.
Il me demande comment je vais et je ne peux m'empêcher de lui rapporter mes suspicions.
- C'est moi ou il y a une atmosphère bizarre au bureau ?
- Justement. C'est de ça dont je voulais te parler hier. Disons que Fina est allée dire à tout le monde que tu me harcèles.
- Quoi ???
- Elle est malade, je te dis. Tu me crois maintenant quand je te dis que tout ce qu'elle a dit, ce n'est qu'un tissu de mensonges ?
- Mais je vais la tuer !
- Calme-toi.
- Tu veux que je me calme alors que je suis devenue une bête de foire dans ma propre entreprise ? Non mais j'hallucine ! Je vais de ce pas la mettre à la porte.
- Doucement. Vu comment elle est timbrée, elle va te poursuivre pour licenciement abusif.
- Mais je m'en fous. Qu'elle m'emmène à la cour de la Haye si ça lui chante. C'est sa dernière journée ici.
- Qu'est-ce que vous avez ? Demande Mounina en arrivant.
- Tu es au courant que Fina a lancé une rumeur comme quoi j'harcèle Ahmadou ?
- Euh ouais, Ahmadou m'en a parlé.
- Et tu ne m'as rien dit ?
- Je ne voulais pas perturber ton voyage.
- Ah. Excellent choix. Pendant ce temps, elle se pavane ici, et tous mes employés perdent le respect qu'ils ont pour moi.
- Façon, tu ne pouvais rien faire à distance. Ça n'aurait rien changé que tu sois au courant plus tôt.
- Tu as raison. Je ne pouvais rien faire depuis la Suisse. Mais je suis là maintenant.
Je tourne les talons et retourne vers le bâtiment Mouna sur mes talons. Je croise Madina en poussant la porte. Elle me demande ce qui passe mais en voyant Mounina essayer de m'arrêter, elle me suit sans attendre la réponse.
On se retrouve tous les quatre dans l'ascenseur.
- Tu ne peux pas aller faire une scène Aissata, s'indigne Mounina. Tu es PDG, bon sang.
- Vous m'expliquez ce qui se passe ? Demande Madina.
- Ta sœur veut aller attaquer Fina pour les sottises qu'elle a raconté à tout le monde.
- Quelles sottises ?
- Ah tu ne savais pas toi non plus ? Apparemment, j'harcèle Ahmadou.
- Quoi ?
- Exactement.
Les portes de l'ascenseur s'ouvrent et je sors, eux sur mes talons.
- Aissata ! Arrête toi une seconde, dit Ahmadou en me prenant le bras.
Notre groupe provoque déjà les regards curieux des rares personnes encore sur place.
- Lâche-moi.
Il encercle mes poignets de ses mains m'obligeant à lui faire face.
- Tu te calmes. Ça ne sert à rien d'aller faire un scandale. Tu es l'image de cette boîte. Toi et moi savons la vérité, c'est tout ce qui compte. Ses mensonges ne sont que ça, des mensonges, et les gens ne sont pas dupes.
- Elle ne va pas rester ici une seconde de plus, je te dis.
- Ok. Mais pas de cette manière. Respire profondément. Calme-toi.
- Je suis calme.
Oh mais je suis très calme. Si je perds mon calme, je vais enlever mes chaussures et lui enfoncer les talons dans le crâne. Mais qu'est-ce qu'elle a dans la tête cette fille ?!
- D'accord. Je vais te lâcher. Tu vas faire passer ton message posément. Avec la classe légendaire qu'on te connaît. Je peux compter sur toi ?
Je ne peux même pas lui répondre tellement j'enrage. J'entends Madina se chamailler avec Mouna en lui demandant pourquoi elle ne lui avait rien dit. Je lui en veux aussi, mais j'ai une autre priorité.
- Je ne t'ai rien dit pour que tu n'agisses pas comme une folle furieuse, s'exclame Mounina. Ici, c'est un lieu de travail pas un bar pour régler ses comptes.
Ils veulent de l'apaisement. Ok. Je me rends au bureau de Fina et la trouve au téléphone.
- Fina. Vous êtes relevée de vos fonctions. À effet immédiat. Veuillez ranger vos affaires et quitter les lieux.
- Quoi ! Mais vous ne pouvez pas me renvoyer ! Pour quel motif.
Elle ose me demander pour quel motif. Ah l'insolence de la femme.
- Watch me.
Je prends un téléphone et compose le numéro de la sécurité. Je leur demande de monter escorter Fina hors de nos locaux.
- Je vais porter plainte pour licenciement abusif.
- Ça tombe bien. Rendez-vous au tribunal. On tiendra en même temps ton procès pour diffamation.
Je tourne les talons et m'en vais. Une seconde plus tard, j'entends un bruit derrière moi.
- Ma sœur est trop distinguée pour faire ça. Pas moi, dit Madina.
Je me retourne et vois Fina tenir sa joue. Je comprends que Madina l'a giflé. Sur le coup, je ne réagis pas. Mais dès qu'on se retrouve dans la voiture, je pars dans un fou rire.
- Non tey nak fan na la (Je t'aime trop). Qui aurait cru qu'un jour tes talents me serviraient. High five ! (tape m'en cinq)
On se tape dans les mains pendant que Mouna éclate de rire en nous traitant de niak diom (sans vergogne).
- Je suis choquée, ajoute-t-elle. Quand on dit que l'amour ça change les gens, ce ne sont pas que des mots. Aissata Ba, la posée, la voix de la raison, c'est toi qui allait te battre avec une fille, dans ton entreprise, à cause d'un homme ? Ah tu as changé ma copine.
- Primo, j'allais pas me battre avec elle. J'allais lui casser la gueule.
- Ah weuyy ! Applaudit Madina.
- Et secundo, je suis humaine moi aussi. J'ai beau afficher un visage neutre, c'est pas pour autant que je ne vais pas riposter quand on m'attaque.
- Elle est gonflée en plus, dit Madina. À quel moment, tu  lances ce genre de rumeurs sur ton boss ? Les gens n'ont plus peur de rien. J'aurais dû lui mettre une autre gifle. Tchippp
- Elle s'est sûrement dit que tu n'allais pas la virer pour éviter de donner du crédit à ses propos ou par peur qu'elle te colle un procès, propose Mounina.
- Elle est malade si elle a pensé une seule seconde que ça allait passer. Je n'allais quand même pas la laisser porter atteinte à ma personne sans réagir.
- Ahmadou Dème aussi, il a travail de momon dé...
En parlant de lui, je reçois son appel.
- T beug toureum, termine Mounina. (En parlant du loup, on voit sa queue)
Il me demande comment je vais. Comment je vais ? Je suis absolument outrée par l'audace de cette femme. À quoi elle s'attendait en partageant ces calomnies ? À ce que je la regarde bras croisés ? Soit elle est psychotique, soit elle a fait confiance à un marabout charlatan. Si elle est intéressée par le gars, ce n'est pas en dénigrant la petite amie, qui est accessoirement sa patronne, qu'elle va réussir à l'avoir.
Je me demande vraiment ce que les gens ont dans la tête. Goor diar neu lii ? (Est-ce qu'un homme en vaut la peine?)
Seulement, mes sentiments vont devoir attendre. Pour l'instant, j'ai un frère à assister.



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