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– Je n'ai pas dragué Sonia. Franchement, Em', tu m'as déjà vu draguer une seule femme dans ma vie ? T'es ridicule.

Une légère culpabilité me fait pincer les lèvres. Je ne suis pas tout à fait sincère... il y a bien eu cette Écossaise dont je me souviens à peine et que la honte m'a empêché d'évoquer avec Émilie.

– Ça, c'est clair que draguer, tu sais pas faire. Même pas avec moi. Franchement, on serait pas ensemble si je n'avais pas pris les choses en mains !

Elle a probablement raison. Même si depuis des années, ma mère et mon père me poussaient dans ses bras, convaincus que nous étions plus que ce que nous voulions bien leur montrer, je n'imaginais pas réellement sortir avec elle.

Notre relation amicale fusionnelle m'avait toujours convenu. Nous mettre ensemble... je ne sais pas. Tout le monde trouvait ça si naturel, je ne me suis pas posé de questions. Et puis, je l'aime comme jamais je n'ai aimé quelqu'un.

Seulement... il manque un truc entre nous. Une étincelle, une passion, un rouage qui nous empêcherait de nous prendre le bec à tout bout de champ. Des paillettes.

Même le sexe ne nous réconcilie pas : je n'ai pas la moindre idée de comment la faire grimper au rideau et... il faut bien avouer que c'est réciproque. Entre nos deux corps, ça ne matche pas.

Comme je n'ai pas envie de me risquer dans cette conversation minée, je choisis de plutôt recentrer la conversation sur le sujet principal.

– Bon, on le monte, ce sapin ? m'exclamé-je en pointant le carton du menton.

– C'est clairement ce qu'il y a de mieux à faire en pleine dispute !

Je me pince l'arrête du nez. Elle ne m'aide vraiment pas, là.

– C'est ce qu'on fait toujours, non ? Le premier décembre, on décore le sapin dans la joie et la bonne humeur en mangeant de la junk food ! Cette année, une pizza !

– Tu parles bien de la pizza au lactose, celle que je ne mangerai pas ?

– Tu peux bien faire une entorse ce soir quand même !

– Impossible.

Elle croise les bras et me lance un regard assassin.

– Sérieux ?

– Sérieux. Mange-là tout seul.

Les épaules crispées de fureur, je fouille dans ma poche, en extirpe mon téléphone et recompose le numéro de la pizzéria.

Elle a gagné.

Inutile de tenter de désamorcer les mines quand chaque pas en déclenche quinze. Elle veut en faire exploser une ? Elle va avoir mon explosion !

Au moment même où les mots franchissent mes lèvres, je sais que je vais les regretter. Et pourtant, c'est plus fort que moi.

Je suis à bout !

– Excusez-moi, Corentin Florentin, j'ai commandé une quatre fromages il y a même pas cinq minutes et... je suis navré, mais ma femme est une foutue chieuse patentée pas foutue de faire un effort pour avaler une foutue pizza au fromage à cause d'un foutu délire de régime sans lactose. Ce serait possible de modifier la commande ? ... Peu importe, juste sans lactose... Merci... Oui, tout à fait, c'était à mon nom : Corentin Florentin.

Lorsque je raccroche, Émilie est blême de rage, mais contre toute attente, elle ne hurle pas. Elle se contente de tourner les talons, les poings serrés, pour se précipiter dans la salle de bains et s'y enfermer.

Des paillettes pour Noël (BxB) (BxG)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant