19 Un sentiment de déjà vu.

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Le séjour de Lexie touche à sa fin, et avec toutes ces heures passées ensemble, une certaine complexité s'est installée entre elle et Peter.

- Je te laisse avec maman, Lexie. Je dois aller au village.
- Je peux venir avec toi ?
- Je serai pas long. Et ya rien d'intéressant pour toi là bas.
- S'il te plaîîîît !

Le berger soupire, désespéré par son manque de volonté devant cette petite tête blonde.

- Tu seras bien sage ?
- Promis.
- D'accord alors. Mais tu m'écoutes bien.
- Ouiii ! Trop bien ! Merci tonton Pet. Je serais bien sage. Promis.

Après s'être affranchi de ses obligations, le jeune homme reprend vite le chemin du retour, suivi de près par une fillette sautillante. Johan passe alors à côté d'eux.

- Bonjour Peter. C'est qui cette gamine ?

Mais le chevrier passe son chemin, sans fournir de réponse.

- Pourquoi tu lui a pas répondu ? demande Lexie, après quelques minutes.
- C'est un méchant.
- Ah bon. Un vrai méchant, comme dans les livres ?
- Pas vraiment. Mais je préfère l'éviter quand même.
- Mais si c'est pas un méchant c'est un gentil alors ?
- C'est pas un vrai méchant, mais c'est pas non plus un vrai gentil.

Voyant l'air interrogatif de la petite, le jeune homme essaye tant bien que mal de l'éclairer.

- Tu sais c'est pas si simple. Tu peux pas vraiment dire des gens qu'ils sont méchants ou gentils, souvent ils sont un peu des deux. Des fois les gentils ont l'air méchants, et les méchants gentils. Ou les gentils deviennent méchants et les méchants gentils. Ou certains sont un peu méchants et un peu gentils. Même les vrais gentils ont un peu de méchant en eux, et les vrais méchants un peu de gentil. Ou encore des gentils font des choses méchantes à des gens méchants.
- Et mon papa alors ?
- Je peux pas te dire si quelqu'un que je connais pas est gentil ou non.
- C'est bien compliqué tout ça.
- Tu comprendra quand tu sera plus grande.
- Ah non ! Je déteste qu'on me dise ça !

Il sourit, amusé de sa réaction.

- Ça serait bien que ça soit aussi simple que dans les livres.
- C'est sûr, malheureusement les livres pour enfants et la réalité sont très différents.
- Pourquoi tu dis pour enfants ?
- Dans les livres pour adultes c'est encore pire qu'en vrai. Dans un de ceux qu'on a vu à l'école, un livre pas pour les enfants, il y avait un vrai méchant, mais il oublie qu'il est méchant, alors il devient un vrai gentil.
- J'ai rien compris.
- Moi non plus, s'esclaffe Peter. T'es contente de rentrer chez toi ?
- Pourquoi tu dis ça ?
- Ça va bientôt faire deux semaines que t'es arrivé.
- Déjà ? Mais nonnn !
- Ta maman te manque plus ?

À l'évocation de sa mère, un sourire timide se dessine sur le visage de la fillette, effaçant quelque peu l'inquiétude qui s'est emparé de ses yeux quand elle a compris qu'elle allait bientôt repartir.

- Si. Je suis croo contente de revoir maman. Mais je veux pas partir. À la maison je suis toujours toute seule. Et je peux jamais aller dehors. C'est mieux ici.

Pendant un instant, rien qu'un court instant, en voyant les yeux de la petite s'embuer dangereusement, Peter songe partir dans ses montagnes avec elle, là où ils ne les retrouveront pas. Elle ne retournerait jamais à sa vie triste et morne. Seulement, comme il lui a expliqué, la vie n'est pas un compte pour enfants, elle est bien plus compliquée, et il ne peut pas se mêler à ce point de la vie de la fillette. Elle doit repartir. Alors à la place, il interrompt sa marche, et serre la fillette dans ses bras, comme si ce serait suffisant pour la retenir.

- Tu m'étouffes tonton Pet' !

Après un long moment, le jeune homme relâche son étreinte. Et reprend sa marche en silence.

Juste la montagne, toi, et moi. [En Cours]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant