Chapitre 13

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Mon amie jette un coup d'oeil par dessus mon épaule, où se tient Catra.

-Vous allez où ? Demande ma meilleure amie avec un air dubitatif.

-À l'ancienne bibliothèque, annonce-je simplement.

-Ah oui, ton rendez-vous bizarre, réplique-t-elle. Tu es sûre que ça n'est pas un piège ? Tu ne préfères pas que je vous y accompagne ?

-Non, ça n'est pas la peine, la femme que j'ai vue ne semble pas de taille, déclare-je en me remémorant la maigreur de son visage blessé.

-Et si elle n'est pas seule ? S'inquiète Scintilla en venant prendre mes mains pour les serrer entre les siennes. Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose.

-Il ne m'arrivera rien, ne t'en fait pas, je ne suis pas seule non plus, déclare-je en indiquant mon chaton d'un signe de tête.

-Tu es sûre que tu ne risques rien ? Insiste-t-elle après avoir jeté un bref coup d'oeil vers Catra.

-Oui, je suis suffisamment forte pour pouvoir me protéger et ne sous-estime pas la férocité de ma tigresse, je te rappelle que c'est un petit caïd, ricane-je en me retournant vers l'intéressée.

-Si tu le dis, réplique-t-elle, peu convaincue.

-Bon, tu me donnes les clefs du garage s'il te plaît ? Demande-je un peu impatiente.

Elle se contente de se retourner et de prendre un trousseau sur une table basse.

-Tu me les rendras demain, annonce-t-elle en me les tendant.

Je hoche simplement la tête avant qu'elle ne m'attire contre elle et me serre dans ses bras.

-Sois prudente.

-Je le suis toujours, déclare-je avec un petit sourire avant de m'écarter d'elle.

Je lui fais ensuite un signe de la main en arborant un air rassurant. Puis je vais vers la grande porte de garage d'un pas enjoué.

-C'est qui "Fougor" ? Demande Catra.

-Tu verras, déclare-je, amusée par son apparente curiosité.

Une fois arrivées devant la grande porte blanche, je cherche le boîtier noir et appuie sur le bouton qui ouvre le passage. Dès que je peux, je m'engouffre dans le garage et repère en un coup d'œil le cadeau que m'ont fait mes parents adoptifs, pour célébrer ma majorité. Je m'avance vers Fougor et le découvre de sa bâche d'un geste. Je reste fièrement le regarder, mes mains posées sur mes hanches.

-Une moto ? S'étonne Catra en venant à côté de moi.

-Non, c'est pas "une moto", mais une magnifique moto, peinture noir métallisé, quatre cylindre, dis-je en caressant tendrement la selle.

S'en suit un long monologue où j'énumère toute les caractéristiques qui font de Fougor un des meilleurs.

-Ouais, bein une moto quoi, réplique ma colocataire en haussant les épaules.

Je pousse un soupir, c'est un cas désespéré. Je vais ensuite jusqu'à une armoire, j'y prends mon casque et celui de Scintilla (elles font sans doute la même taille) ainsi que nos manteaux et gants de protection. Je reviens vers Catra et lui enfonce le casque rose sur la tête.

-Tu rêves si tu penses pouvoir me faire mettre ça, annonce-t-elle en brandissant la veste, également rose.

-Sache que c'est soit ça, soit tu restes là, réplique-je en enfilant ma propre veste.

Elle grogne donc mais revêti tout de même la tenue que je lui oblige.

-Je me sens ridicule, râle-t-elle.

-C'est pas si terrible, arrête un peu de râler, dis-je avec un rire en la regardant.

-Quitte à ce que je doive m'habiller comme un bonbon rose, laisse moi au moins le loisir de râler ! S'offusque-t-elle en mettant les gants.

-Très bien, fais toi plaisir, déclare-je en poussant Fougor vers l'extérieur du garage.

-Mais non ! Ça perd tout son intérêt si j'ai ton autorisation, rétorque-t-elle en me suivant.

Je me contente de pousser un petit rire et ferme le garage après qu'elle soit sortie.

-Tu sais conduire ça au moins ? Demande-t-elle les bras croisés tandis que je prends place sur Fougor.

-Bien-sûr que oui, ricane-je, j'ai passé mon permis dès que j'ai pu.

Je me tourne donc pour la voir et remarque qu'elle me regarde, dubitative. Je tends alors une main vers elle, dans un geste qui se veut rassurant.

-Tu me fais confiance ? Demande-je le plus sérieusement possible.

Elle marque un temps de réflexion, au cours du quel mon geste perd de son assurance au fur et à mesure que mon cœur se serre. Tu es bête Adora, tu n'aurais jamais dû demander ça... bravo... tu as dû la mettre mal à l'aise.

-Je suis dé... commence-je.

-Qu'est-ce que tu peux être bête, me coupe-t-elle en prenant ma main avant qu'elle ne soit totalement baissée. Tu crois que je serais là, en route pour aller voir une vieille folle dans un endroit glauque si je ne te faisais pas confiance ?

-Non... enfin... je ne pense pas, balbutie-je, perdant tout mon aplomb devant ses beaux yeux vairons qui me fixe avec une telle intensité.

-Alors arrête de te faire plus idiote que tu ne l'es, conclut-elle en s'asseyant derrière moi. Essaye juste ne pas nous tuer, c'est une légende, les chats n'ont pas neuf vies.

-Oui chef, déclare-je avec un rire non dissimulé.

-Merci.

-Accroche-toi bien, annonce-je en rabattant la béquille.

Elle ne répond rien et se contente d'enrouler ses bras autour de ma taille mais pas assez fort à mon goût. Je démarre donc la moto, plus brusquement que je ne l'aurais fait d'ordinaire. Cependant l'effet escompté est là, son étreinte est nettement plus forte et elle est désormais collée contre moi. J'esquisse un petit sourire fier et nous voilà en route vers l'ancienne bibliothèque, vers nos réponses. Je m'en veux presque de tant aimer la sentir contre moi. Est-ce que c'est mal ? Après tout, c'est mon CHAT, et elle le redeviendra sans doute bientôt... je redoute tellement le moment où ça arrivera, est-ce que j'arriverai à me comporter avec elle comme je le faisais avant ? Est-ce que j'arriverai à passer outre ce que je ressens pour elle ? Ignorer ce sentiment qui grandi dans ma poitrine au fur et à mesure que je passe du temps avec elle. Je secoue alors légèrement la tête pour me reconcentrer sur ma route et sur l'instant présent, sur ce sentiment grisant que je ressens à la suite de notre proximité. Au bout de quelques minutes, je quitte les rues éclairées de ma ville et m'aventure sur un tronçon sombre, au bout du quel j'aperçois déjà la silhouette imposante de notre destination.

Tes Yeux M'ont ChangéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant