Tes Yeux M'ont Changée

Chapitre 15

Quand je reprends connaissance, j'ai mal dans pratiquement tous mes membres et ai encore quelques frissons. Lorsque j'ouvre les yeux, je suis d'abord aveuglée par une violente lumière avant de distinguer une silhouette au dessus de moi.

-Je suis morte c'est ça ? Demande-je sans trop réfléchir.

J'entends alors un doux rire résonner à travers mon être, comme un vent chaud et réconfortant. Sa propriétaire ne fait aucun doute.

-Qu'est-ce que tu peux être bête, répond Catra en me pinçant la joue.

-Aïe ! Râle-je en me relevant lentement, gênée par mes muscles endoloris.

Je parviens finalement à m'assoir, ça ne fait aucun doute, je suis bien vivante...

-Il s'est passé quoi ? Demande-je en massant ma peau, toujours douloureuse du dernier contact que j'ai eu avec ma colocataire.

-Tu es devenue complètement cinglée, comme possédée, annonce-t-elle. Donc pour éviter que tu fasses la grosse bêtise de toucher ce truc, la vieille sorcière t'as un peu... électrocuté.

Je marque un temps afin de digérer les nouvelles et mes souvenirs reviennent, petit à petit, mais surtout, le sentiment qui m'avait envahi me revient en pleine face, je lève alors à nouveau les yeux vers ce grand cristal, cherchant intérieurement à retrouver ce sentiment enivrant. Mais rien ne vient, je ne ressens rien de spécial à part de l'administration devant sa beauté. C'est sans doute mieux, je ne tiens pas à perdre à nouveau le contrôle de moi-même. C'est seulement à ce moment là que je remarque la présence de l'inconnue du bar.

-Euh... bonjour, hésite-je en la détaillant du regard.

-Bonsoir, répond-elle en me faisant légèrement grincer des dents. Je m'appelle Ténébra.

-Je suis Adora, annonce-je en me relevant tant bien que mal, suivie par Catra.

-Moi c'est Catra, ajoute-t-elle.

-Et voici le Grenanoir, déclare-t-elle en pointant de la main le grand cristal. Mais il me semble que tu l'as déjà rencontré.

-Qu'est-ce que c'est ? Demande-je très intriguée par l'effet qu'il a eu sur moi.

-Je ne sais pas trop, avoue-t-elle avant de se retourner pour aller s'asseoir à un grand bureau dans un coin de la pièce. Ça fait des années que je travaille dessus, il est rempli de magie très puissante, inculquée en elle par d'anciens druides. C'est sûrement pour ça qu'il a eu tant d'attraction sur toi.

:Quel est le rapport avec moi ? M'étonne-je en la suivant.

-Tu en es une Adora, tu es une des dernières survivantes de ce peuple de mages en tout genre qu'on surnomme Fondateur, annonce-t-elle, me laissant perplexe.

Ça n'a aucun sens, d'accord je ne connais pas mes parents... mais la magie a disparu depuis des centaines d'années. C'est insensé.

-Comment vous pouvez le savoir ? Demande-je, cherchant à trouver la faille dans son mensonge.

-Je l'ai ressenti, j'ai passé tellement de temps avec ce cristal ancien qu'il a apparemment déteint sur moi, annonce-t-elle en se penchant pour poser ses coudes sur son bureau en bois. Et les restes animales de... Catra, ont confirmé mon intuition.

-Quel est le rapport avec moi ? S'étonne-t-elle.

Je vois alors le regard de Ténébra dévier jusqu'à mon amie, elle la dévisage de haut en bas par dessus ses lunettes.

-Tu as sûrement remarqué que tu n'étais plus un animal, déclare-t-elle finalement. C'est Adora qui a fait ça.

-Quoi ? Disons-nous en chœur.

-Moi ? M'étonne-je en fixant la femme.

-Oui, c'est le pouvoir des Fondateurs, chaque famille de sang avait le pouvoir de donner forme humaine à un animal, donc l'emblème de ta famille était le chat, c'est pour cette raison que tu as été en mesure de faire changer d'aspects à ton chat.

Wow... ça va trop vite là... je suis une "Fondateur" ? J'ai... des pouvoirs ? Hérités de ma famille disparue ? Et c'est moi qui ai changé Catra ? Ça semble impossible... et pourtant ça expliquerait tout... notamment l'attirance que les chats ont toujours eu pour moi... j'essaye de garder la tête froide mais le fils incessant de mes pensées me donne le tournis, je me baisse afin de prendre appui sur le grand bureau en bois. Je sens rapidement une main se poser sur mon dos et une autre vient encercler mon bras.

-Ça va Adora ? S'intéresse Catra.

-Oui oui... acquiesce-je en me redressant tant bien que mal. Je suis désolée... de t'avoir pris ta vie.

-C'est bon, ne t'en fais pas, répond-elle alors que je lui porte mon attention.

Elle me regarde d'un air attendri, faisant retarder mon cœur d'un battement. Dans un autre endroit, à un autre moment, dans une autre vie, je l'aurai embrassé à cause de ses yeux là... d'où me vient cette envie irrésistible de faire ses lèvres miennes ? Je me mords donc l'intérieur de la joue et détourne les yeux pour chasser au plus vite ces pensées de mon esprit, c'est mon chat.

-Comment je peux lui rendre son apparence ? Demande-je en levant mon regard vers Ténébra.

-Il suffit que tu le veuilles, du plus profond de ton être, c'est déjà comme ça que tu l'as changée la première fois, répond-elle en croisant les bras tandis que je sens Catra lâcher le mien.

Je me contente de hocher la tête en signe d'approbation. Je voulais qu'elle soit humaine ? Drôle d'idée.... qu'est-ce qu'il te passe par la tête Adora ? Il faut que je pense à aller voir un psychologue. On pose alors quelques autres questions à Ténebra, elle parvient à répondre à la plus part. Avant de partir, j'avais préparer un questionnaire, il n'en reste cependant pas grand-chose. On repart ensuite de là-bas, après que Ténébra m'ait dit de revenir quand je voulais ou si j'avais d'autres questions. Mais pour être franche je ne meurs pas d'envie de la revoir. J'ai déjà du mal à digérer ce qu'elle vient de me dire. J'en ai appris plus sur moi et ma vie en une entrevue avec elle que dans le reste de ma vie. Je suis une des dernières survivantes de mon peuple ? Qu'est-il arrivé à mes parents ? Ils étaient des "druides" ? Eux aussi avaient des pouvoirs ? Comme les miens ? Ai-je envie de m'en servir ? Si oui, comment et pour quoi faire ? Et si tout était faux ? Si Ténébra avait menti ? Après tout, je ne la connaissais pas, elle peut très bien se moquer simplement de moi. D'un coté son histoire colle en tous points et explique énormément de choses. Mais en même temps ça semble si gros cette histoire de pouvoir, peut-être même trop gros pour avoir été inventée. C'est donc en silence, perdue dans mes pensées qui dévalent comme un torrent déchaîné, pouvant être si dévastateur s'il devie de son chemin, que je referme la porte du garage derrière nous avant d'enfoncer la clé dans la poche de ma veste.