Les mots de la semaine de la langue française V2

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Bon, je vous résume le commentaire du correcteur : "ça ressemble plus à un essai de biologie prospective qu’à une nouvelle. Intéressant mais hors sujet”.

Son idée : repartir sur l’histoire du biochimiste qui serait par exemple embauché par une société privée et créer un développement  de ce point de vue. Il concevrait une nouvelle créature, capable d’aider l’humanité dans son évolution (aider les handicapés, soigner les malades, sauver les accidentés). Mais les dirigeants de la compagnie voudraient rentabiliser rapidement cette découverte et en faire un arme de guerre vivante, à monnayer auprès des pays les plus belliqueux (business is business). Mais refusant de voir son invention pervertie, notre inventeur rentrerait en conflit, secret dans un premier temps, sachant qu’il encourt un risque mortel à contrarier son employeur... C’est un scénario assez classique qui regroupe certains mythes bien connus : Prométhée volant le feu aux dieux pour le confier aux hommes, le Dr Frankenstein créant une créature dont le pouvoir maléfique lui échappe… Mais voilà ce qu’on attend de vous : une histoire, structurée, avec conflit, rebondissements, suspense et dénouement.

whaaaa sérieux ? Pourquoi j’ai l’impression d’avoir déjà vu ça 50x dans des téléfilms bons marchés ???

Bon, en gros, je fais un vieux classique archi vu avec des bons sentiments dans un bel emballage et ca passe.

Ben on y va alors...

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Homo Climaticus

Hubert Gransky avait un esprit vif et aiguisé et sa renommée dans le milieu scientifique était faite. Pourtant, rien n’est définitif. Certains s’étaient vu retiré toute crédibilité pour avoir tenté une hypothèse réformiste sur l’évolution d’homo sapiens. Cette concurrence malsaine était pénible pour Hubert qui avait toujours préféré voyager hors des sentiers battus.

il avait perdu ses “amis” au fil du temps, quand il avait quitté la branche appliquée de la biologie pour des recherches théoriques en biologie prospective ou quand  il avait publié ses recherches en biochimie hypothétique. Il s'était mis en tête de remettre en question les causes du vivant et de démontrer qu’une évolution biochimique pouvait exister dans des conditions inconcevables pour le commun des mortels. Ses ressources venaient de crédits ministériels qu’on menaçait de supprimer tous les deux mois. Finalement, ses derniers “amis” lui avaient tourné le dos quand il avait accepté un poste ailleurs, comprendre par là du côté obscur, dans le privé, quoi.

Un homme l’avait abordé à la sortie du travail avec un dossier épais comme ça portant une étiquette à son nom. Il avait fait défiler les pages sous ses yeux de façon à ce que Hubert reconnaisse le contenu, et avait commencé par lui passer un sacré paquet de pommade, et dans le sens du poil. L’homme avait retracé le CV du biologiste, lui avait dit toute son admiration pour son travail et sans lui laisser le temps d’en placer une lui avait déclaré qu’il allait changer sa vie pour que lui, puisse changer le monde. A quelques conditions près, bien sûr.

— Monsieur Gransky, je vous parle d’un accès à tout ce qui vous est nécessaire pour l’aboutissement de vos recherches, un budget intarissable et des moyens physiques de dernière génération.

— Et par quel miracle comptez-vous trouver ces millions d’euros qui sont hors de portée d’un État ?

— Mon employeur est un philanthrope qui croit en vous. Ne vous en déplaise, vous n’êtes pas le seul à imaginer le futur. Il se trouve qu’il y a des hommes qui ont les capacités de le changer et d’autres qui en ont les moyens. Ce serait criminel de ne pas les faire collaborer.

— Ben voyons.

— Toutes vos découvertes porteront votre nom mais seront soumises à approbation de votre bienfaiteur. Vos recherches nous appartiendront et vous ne direz jamais pour qui vous travaillez ou pour qui vous croyez travailler. Vous ne parlerez pas de vos travaux à quiconque.

Tout en énonçant les conditions de travail qui formaient une sorte de règlement intérieur sans concession, l’homme ouvrit négligemment le dossier qu’il avait à la main pour montrer quelques pages où Hubert se voyait chez lui, au restaurant avec sa femme ou au club de squach. Il resta un instant bouche bée puis tourna la tête pour chercher les indices d’un canular.

— C’est une blague ou quoi ?

— Ce n’est pas le genre de la maison Monsieur, croyez-moi.

— En gros je vous appartiens, c’est ça ?

— Ne voyez pas les choses sous cet angle. Dites-vous que la personne qui va dépenser énormément d’argent pour vous, souhaite avoir toutes les garanties que c’est un bon investissement.

— Admettons. Comment ça se passe ?

— Un laboratoire est déjà construit. Une équipe est en cours d’être rassemblée. Voici un contrat à votre nom. La rémunération est en page sept. Je suis surpris que vous n’en ayez pas parlé, mais cela confirme ce qu’on dit de vous. Je vous contacterai dans une semaine pour avoir votre réponse.

Quatre ans plus tard, Hubert vivait jour et nuit pour son projet. Ses travaux avaient pris un essor inespéré. Les deux premiers mois furent consacrés à l’équipement du labo. Il n’avait qu’à faire une lettre au père noël et la semaine suivante, il recevait ses colis, quel que soit le prix ou la rareté du matériel demandé.

Il ne rendait de comptes qu’à l’homme qui était venu le chercher. Une fois par mois, celui-ci réunissait toute l’équipe pour un état d’avancement. Il repartait avec les comptes-rendus et parfois il revenait avec une directive du professeur X, comme tout le monde l’appelait, pour interdire une voie de recherche ou en favoriser une autre. 

Aux premiers jours, on lui avait signifié les grands axes de ses recherches, la vision de son employeur : milieu chaud, sec et atmosphère saturée de CO2, pour imaginer ce qui pourrait y vivre de façon pérenne et quelles seraient les caractéristiques du génome de ces êtres. Plus tard, il dût imaginer comment obtenir ces caractéristiques à partir de l’existant. Il ne suffisait pas d’imaginer des êtres différents, mais d’en transformer des biens réels. Depuis le début, X, avait orienté les recherches, de manière de plus en plus précise et ne souffrait aucune discussion. Ce comportement irritait Hubert qui avait commencé à remettre en doute les compétences de son mécène. Il écarta ses œillères et se mit à réfléchir sur le but de tout cela. Entre collègues, les discussions étaient loin d’être débridées. La prudence était toujours de rigueur. Les multiples postes de contrôles d’identités, les fouilles, les capteurs dans toutes les pièces et le personnel en armes y étaient sûrement pour quelque chose.

Un jour, une anomalie du protocole excita tout le labo pendant une semaine. Un bulletin de livraison. Une simple feuille restée dans un carton de microscope high-tech à destination de Sigi Corp. C’est le bout du fil qu’ils s'efforcèrent de remonter.

Quelques clics ont suffi. L'entreprise était incontournable dans différents secteurs de recherches : la chimie, l’espace, les télécommunications et quelques apparitions dans des études climatiques avec projections avant-gardistes, mais absolument rien sur la biologie fondamentale. Sigi Corp avait lancé six satellites en dix ans, et avait financé des industries très différentes dont le seul lien commun était leur impact massif sur le climat. Il poussait à un réchauffement, à une concentration de gaz à effet de serre et pendant quatre ans, Hubert et toute son équipe lui avait donné les clés pour rendre l’espèce humaine compatible avec ce cataclysme de manière que le professeur X serait capable bientôt de décider qui fera ou ne fera pas parti de l’humanité 2.0, optimisée selon ses désirs, pour survivre à ces changements brutaux et avoir le loisir d’observer des clairs de terre rouge brûlants. 

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Bon, finalement, après le moment d'agacement, j'ai eu une petite idée à travailler et j'ai réussi à caser tous les mots imposés.

J'espère que vous trouverez cette version à votre goût.

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