Chapitre 4 - Maison close

75 6 24
                                    


Le temps passe à une vitesse effarante : il est déjà midi. J'invite Olga à manger et elle m'emmène dans un restaurant du bord de mer.

- Tu vas venir voir ma maison ? me demande-t-elle au moment du dessert.

- Bien sûr !

Je n'avais jamais envisagé la suite autrement. Même si nous avions dû repartir chacun de notre côté après ce déjeuner en tête à tête, je serais allé lui rendre visite de ma propre initiative. Je règle l'addition puis nous allons à ma voiture. Je lui tends la main pour grimper à l'avant du pick-up.

- Tu me guides ? lui dis-je.

Elle fait un signe discret à une berline noire qui démarre lentement.

- Tu n'as qu'à suivre cette voiture.

Je m'exécute et nous nous éloignons rapidement du centre-ville et de ses maisons collées les unes aux autres pour nous diriger vers des terrains plus aérés près de la forêt.

- Je ne reconnais plus rien, fais-je remarquer. La ville a tellement changé.

- C'est normal, me répond-elle, tout change toujours en dix-sept ans.

- Non, pas tout, dis-je en soutenant un instant son regard ensorcelant.


La villa est splendide, tout en pierre blanche, avec son toit de tuiles ocres. Je suis la voiture noire à travers le grand portail, jusque dans une cour recouverte de graviers blanc nacré et rose pâle. Elle rentre dans un garage privé, et Olga m'indique une place de parking entourée de grands buissons épineux.

En descendant de la voiture, elle prend mon bras, et la conductrice de la berline qui assure sa protection, une grande femme aux cheveux courts aussi noirs que ses lunettes, nous rejoint et débarrasse Olga de son sac à main. Elle nous ouvre la porte arrière de la bâtisse, et devant nous, s'étend un jardin paradisiaque.

Un labyrinthe de massifs de roses savamment entretenus est entouré de tous côtés par un péristyle antique, lui-même agrémenté de rosiers grimpants aux fleurs discrètes sur nombre de ses colonnes, apportant ombre et fraîcheur sur les allées pavées. Un minuscule pont de pierre enjambe une rivière artificielle qui s'écoule autour des statues langoureuses de la fontaine centrale. Dans un angle de verdure ombragée, deux filles qui papotent sur un banc modèrent le volume de leur rire joyeux en voyant passer leur patronne.

Je laisse Olga me guider à travers cette maison des merveilles. D'abord un grand bar, avec des serveuses sexy et des murs d'eau rafraichissants, où il ferait bon passer du temps, puis un escalier qui nous mène à l'étage de l'aile droite.

Olga me conduit dans son vaste appartement au style un peu désuet, un peu coquet, mais épuré et aéré. Elle ne s'attarde pas en simagrées et nous nous retrouvons rapidement dans sa chambre. Elle me fait asseoir sur le lit, un sourire accroché sur ses lèvres, et je reste là comme hypnotisé, je pourrais la regarder pendant des heures.

Elle se penche, laissant sa chevelure ondulée ruisseler sur le côté de son visage, puis elle fait glisser ses mains le long de ses jambes pour retirer ses bottes à talons aiguilles. Elle redresse vivement la tête, rejetant ses cheveux en arrière, pour que mes yeux plongent directement dans son décolleté. Mais petit à petit, alors qu'elle remonte ses doigts le long de ses cuisses avec des œillades incitatrices, je me rends compte de ce qu'elle est en train de faire. Elle me joue un numéro d'effeuillage appris par cœur, répété des dizaines de fois, avec des dizaines d'hommes. Je refuse d'être un simple client.

- Pas de ça avec moi.

Je me lève, la prends par la taille et la fais reculer jusqu'à ce qu'elle se retrouve prisonnière entre moi et la coiffeuse en bois. Elle m'attire encore plus près d'elle et j'embrasse sans retenue sa bouche rouge. Je rêve de ce baiser depuis le jour où je l'ai rencontrée, de ses lèvres pulpeuses, de sa langue savoureuse. Ses mains passent sous ma chemise, caressent mon torse, mon dos. Elles rencontrent mon pistolet.

Les roses et l'océanOù les histoires vivent. Découvrez maintenant