Méléagre

63 1 0
                                    

Le roi de Calydon, en Etolie, de son nom OEnée, avait une femme nommée Althée qui donna le jour à un fils dont la destinée fut étonnante.

Un jour, la reine dormait d'un sommeil agité. Il lui sembla que quelqu'un marchait dans la chambre où elle reposait. Lorsqu'elle entrouvrit les yeux, elle vit comme dans un rêve trois silhouettes penchées sur le berceau de son enfant. C'étaient les Moires, les déesses du destin.

L'une d'elles, agenouillée près du feu, mettait une bûche dans les flammes,qui redoublèrent d'intensité.

«Tu vivras aussi longtemps que ce morceau de bois,» dirent-elles, prédisant l'avenir du nouveau-né, «et ta vie sera celle de cette bûche.»

Ayant prononcé des paroles, elles disparurent. La mère terrifiée se leva immédiatement, sortit la bûche du feu et l'arrosa d'eau. Puis elle cacha la bûche fatale dans un coffre.

Son fils fut nommé Méléagre. Il grandit dans le palais royal, entouré de ses trois sœurs. Il devint beau et fort, et lorsqu'il eut l'âge de participera des joutes athlétiques, personne ne put le vaincre tant il était agile.

Le père de Méléagre avait de très grands vignobles, des champs fort étendus et de riches vergers. Lorsque la récolte était faite, il avait coutume de remercier les dieux par de somptueux sacrifices. Les moissons étaient offertes à la déesse Déméter, le vin au gai Dionysos et l'huile d'olive à Athéna. Chaque dieu avait sa part de la moisson, seule Artémis était oubliée.

Or les créatures célestes peuvent elles aussi se mettre en colère et le courroux divin est bien plus redoutable que celui des hommes. Aussi Artémis, vexée par la négligence royale, frappa-t-elle d'une punition le royaume d'OEnée.

Elle envoya dans les forêts d'Étolie un sanglier gigantesque. L'animal était plus grand que le plus puissant des taureaux, ses yeux de feu injectés de sang étincelaient, son crin ressemblait à des lances saillantes et les défenses pointues qui jaillissaient de ses mâchoires baveuses étaient aussi longues que celles d'un éléphant. Partout où il passait les feuilles, les buissons et les arbres jaunissaient sous son souffle dévastateur. Il piétinait le blé mûr, déchiquetait les vignobles, écrasait le raisin avec ses sabots. Il détruisait les vergers, déracinait les arbres, cassait les branches alourdies par les fruits. Il attaquait les troupeaux, tuait les bergers et les chiens. Le bétail dispersé parcourait sans gardien le flanc des montagnes.

Le peuple s'enfuyait des campagnes et, chassé par la peur, se réfugiait derrière les murs de la capitale. Quiconque quittait la ville risquait de ne jamais y revenir. Le chagrin s'abattit sur tout le pays, menacé par la famine et la mort.

Lorsque Méléagre vit ce désastre, il prépara ses armes et invita tous les héros de la Grèce à prendre part à la chasse au sanglier. Nombreux furent ceux qui se rendirent à son appel. Les plus célèbres étaient Jason, qui avait conquis la Toison d'or, Thésée, le vainqueur du Minotaure et Admète, le mari de la fidèle Alceste. Les hommes les plus courageux de la Grèce vinrent, parmi eux, les oncles de Méléagre, les frères de sa mère. Atalante, l'intrépide chasseresse, faisait aussi partie de l'expédition. Le père d'Atalante avait souhaité avoir un fils. Lorsque sa fille naquit il l'emporta dans les montagnes pour qu'elle soit la proie des bêtes sauvages. Une ourse prit l'enfant sous sa protection et l'emmena dans sa tanière.

Ainsi la petite fille grandit en pleine nature parmi les animaux et devint une audacieuse chasseresse. Elle avait souvent déjà prouvé son courage et sa force. Cette fois encore elle allait aider les braves guerriers, son carquois d'ivoire jeté sur l'épaule, un arc à la main.

Méléagre la remarqua tout de suite et crut reconnaître en elle Artémis, déesse de la chasse. Il ne pouvait détacher son regard de son ravissant visage.

Mythes GrecsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant