Lyra
Perdue. Perdue dans mes pensées. Perdue dans mon monde. Perdue dans ce vaste univers où je ne suis que des cendres d'étoiles.
Je tournai la page. Une énième page que je ne lisais pas, me contentant de la parcourir des yeux. Bien sûr, plus tard, je reviendrai en arrière, trop maniaque pour me permettre de lire un livre sans en connaître les moindre détails. Même s'il s'agissait d'interminables descriptions de lieux.
Mon cerveau n'aura de répit qu'une fois qu'il se sera imprégné de tous ces lieux. Mais pour l'instant, le seul livre auquel je portais de l'intérêt, était entre les mains du beau jeune homme, plongé dans sa lecture.
Je le constatais à ses yeux qui s'émerveillaient ou au sourire qui s'affichait sur ses lèvres de temps en temps. Et je trouvais fascinant, la manière dont de simples mots pouvaient provoquer autant de sensations ou d'émotions. Lorsque je pense à tous ces moments où j'ai pleuré des nuits entières pour des personnages qui n'existaient que par la force de mon imagination, et celle de l'auteur.
Il lisait Orgueil et Préjugés et les passages qui animaient son visage m'intriguèrent. J'aurais pu m'approcher de lui, jeter un coup d'oeil à sa page et le savoir ou même le lui demander. Mais je n'arrivais déjà pas à aligner deux mots sans bégayer. Je n'arrivais d'ailleurs jamais à engager de discussions. D'abord à cause de cela, je ne trouvais jamais d'approches intéressantes. Même lorsque j'avais lu le livre en question une dizaine de fois.
Mais ce qui m'empêchait de l'aborder était surtout ma timidité et mon amie de toujours l'anxiété.
J'avais cette tendance à trop réfléchir. Tourner et retourner les situations dans tous les sens afin de trouver les pires débouchés et ne jamais faire ce qui me plaît. Et ça ne s'arrêtait pas à aborder un beau jeune homme dans une bibliothèque, demander une direction, commander dans un restaurant, acheter du pain. Enfin toutes ces situations du quotidien m'handicapaient malgré leur banalité. Bien sûr, j'en étais consciente, aucun boulanger ne rentre chez lui pour se plaindre d'une adolescente de dix-sept ans qui n'a pas su prononcer trois mots sans bégayer ou rougir. Ou peut-être si ! enfin mon père n'était pas boulanger, je ne pourrai donc jamais le savoir.
Je fermai le livre dont je n'avais rien compris. Et ma manie de me déconcentrer pour un simple papillon n'aidait pas. Même si le papillon d'aujourd'hui était plutôt charmant.
"Crime et châtiment" un livre que je n'aurais certainement pas lu, si ma prof de philosophie n'était pas obsédée par Dostoïevski et toute cette bande de détraqués mélancoliques. C'était à se demander, s'il ne s'agissait pas d'un cri de détresse qu'elle nous lançait.
Je me levai pour filer d'ici et ses yeux se décrochèrent de son livre pour me regarder. Aussitôt, mon cœur tripla la vitesse de ses battements et les papillons, dont je parlais tout à l'heure, se mirent à valser dans mon ventre.
Je n'osais relever le tête. J'avais sûrement rougi et il ne devait surtout pas voir ma tranche de tomate. Alors je fis volte-face et m'éloignai de lui. Ce moment semblait durer des plombs.
J'espérais tellement qu'il vienne derrière moi, mais aussi qu'il ne puisse jamais me rattraper. Heureusement, la bibliothèque n'était pas très grande et je parvins à en sortir assez vite,pour ne plus penser à cet instant embarrassant. Même si la grande distance qui me séparait de ma maison m'avait permis de le faire pendant la route du retour.
Il m'avait regardé.
Des feux d'artifice fusaient dans ma tête et dans mon ventre. Dans quelques minutes il quittera cette bibliothèque et je ne le reverrai plus jamais, comme chaque autre beau garçon que je n'osais aborder. Mais ça n'empêchait pas cette échange de regard d'être le meilleur de toute ma journée, et je me faisais force pour ne pas sourire comme une idiote dans la rue, ou danser ou crier ou peu importe comment mon bonheur voulait se manifester.
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Nos Cœurs Cendrés
أدب المراهقين« Un coup de soleil sur la tranche, la brise dans mes cheveux, de la musique qui remplit l'habitacle, et une autoroute infinie. Voilà ce à quoi j'aspirais. Voila ce à quoi se résumait mon bonheur. » Lyra est une jeune fille pleine d'espoir, d'ambit...