40 - Manque d'information

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Elrohir marchait d'un pas vif.
Il traversait à nouveau la cité repoussant loin les tourments de son cœur.
Cette bataille avait été éprouvante. Les visions, le brasier, la blessure d'Isil... Tout avait été si intense.
Elrohir grimaça, une douleur se réveillait dans son épaule gauche et ses pensées repartaient sans cesse vers Isil.
Alors qu'elle s'allongeait une rune s'était activée sur son front, la plongeant dans un profond sommeil. Elrohir ignorait pourquoi Gandalf avait tenu à l'endormir, peut-être pour la garder dans la cité ?
Elle ne serait sans doute pas restée sagement à l'infirmerie. Ce n'était un secret pour personne.
Elrohir était resté à ses côtés tandis que les Soigneurs bandaient son bras et nettoyaient sa plaie à l'arrière du crâne. Ses blessures étaient minimes au vu de la violence de l'attaque, elle allait le hanter pour un moment.
Elrohir secoua la tête pour chasser cela de ses pensées. Il restait tant à faire.
Il franchit les portes défoncées, remontant le long convoi des blessés pour rallier les plaines. Il n'eut pas à aller bien loin pour retrouver les autres. Seules silhouettes debout dans ce champ de ruine.

– Comment va Isil ? S'enquit Elladan en venant à sa rencontre.

– Rien de cassé, c'est l'essentiel. Elle se repose à l'infirmerie.

– Elle a acceptée d'y rester ? S'étonna Legolas.

Elrohir ne put s'empêcher de sourire, l'Elfe sylvain la connaissait bien.

– Nous avons croisé Gandalf, il a apposé une rune de sommeil sur Isil. Elle dort donc.

– C'est plutôt une sage précaution, releva Gimli. Avez-vous des nouvelles de Le Warg ?

– Je suis allé le voir, son état semble stable mais ses blessures sont sévères. Son sort reste incertain.

– C'est une bête robuste, fit Aragorn le regard au loin. Au moins autant qu'Équinoxe.

Comme pour appuyer ses dires, Équinoxe et Eomer arrivèrent. Le Rohirrim s'arrêta tout près d'eux mais le cheval piaffa, visiblement mécontent.

– Les troupes ennemies ont fuis de l'autre côté du fleuve, fit Eomer. Ils se carapatent chez eux. Risquent-ils de se regrouper sous le couvert des Ténèbres ?

– C'est une possibilité, répondit Aragorn soucieux. Il leur faudra du temps pour se réorganiser mais nous devons rapidement décider de la suite.

– Combien de temps ? Demanda Eomer. J'ai très envie de les pourchasser jusqu'aux confins de leur lugubre royaume mais les Hommes et les chevaux sont fatigués, et le Gondor...

– Ils sont en déroute, termina Gimli s'attirant un regard désapprobateur d'Aragorn.

– Ils ont souffert de cette guerre qui tire en longueur, reprit-il. L'envie d'aller à la rencontre de l'ennemi ne me manque pas mais nous devons nous aussi nous réorganiser. Le Rohan restera-t-il ?

– Aussi longtemps qu'il le faudra, assura Eomer. Je souhaiterai juste prendre le temps d'examiner la blessure d'Equinoxe.

Le cheval piaffa à nouveau, tournant sur lui-même pour montrer son désaccord. Aragorn lui attrapa la bride et le tint pour permettre à Eomer, toujours en selle, d'examiner la blessure.

– C'est une belle entaille, un peu de repos ne te fera pas de mal. Nous allons rentrer et....

Soudain Equinoxe rua puis se débattit obligeant Aragorn à lâcher prise. Le cheval piaffa de plus belle, manquant de faire chuter Eomer qui se rattrapa à son encolure, puis s'immobilisa en direction de l'Osgiliath où l'on repoussait encore les Orques.
Eomer reprit les rênes et tenta de le faire se tourner vers la cité mais Équinoxe baissa brusquement la tête faisant passer ses rênes par-dessus son encolure. Le cheval frappa le sol de son lourd sabot puis releva le museau en direction du fleuve. La seule direction vers laquelle il voulait aller.

– Je suppose que je n'ai pas vraiment le choix, soupira Eomer. Es-tu certain de vouloir retourner au front ?

Pour toute réponse Equinoxe gratta le sol de son sabot. Sa décision était prise.

– Ta détermination est tout à ton honneur, fit Elrohir en reprenant les rênes. Mais n'en fait pas trop, Isil ne voudrait pas que tu t'épuises dans les combats.

Équinoxe se tourna vers l'Elfe et lui asséna un coup de museau peu délicat qui fit grimacer Elrohir. Tout en se massant l'épaule, il refit passer les rênes par-dessus la tête du cheval et les donna à Eomer.

– Faites attention à vous.

Eomer se contenta d'un hochement de tête puis talonna Equinoxe qui bondit en avant. Ils les regardèrent s'éloigner puis soudain Elrohir sentit un froid insidieux les envelopper. Il reconnaissait cette sensation et ne fut pas surpris de voir l'armée des Morts apparaitre devant eux.
Le Roi des Morts s'avança et se plaça face à Aragorn qui se contenta de le fixer. La plupart des Hommes présents avaient reculés, horrifiés par cette apparition mortuaire, mais pas eux.

– Libérez-nous.


Aragorn parut hésiter et Elrohir le comprenait, aussi étrange soit-elle cette armée avait joué dans la balance de la victoire.

– Mauvaise idée, fit alors Gimli. Très pratique ces aides de camps mais s'ils sont morts.

Le Roi des Morts tourna le regard vers le Nain avant de revenir sur Aragorn.

Vous nous avez donné votre parole.

Aragorn se détendit puis avança d'un pas.

– Je considère votre serment accomplit. Allez, soyez en paix.

Le soulagement envahit la figure morbide du Roi des Morts puis lentement les Morts s'effacèrent, redevenant un simple souvenir immatériel.

– Ce n'est pas là une chose que l'on voit tous les jours, chuchota Elladan à son frère.

– Nous avons vu bien des choses durant cette bataille...

– C'était la meilleure décision à prendre, Aragorn.

Elrohir se retourna pour voir Gandalf et surtout Pippin. La vue du Hobbit en armure du Gondor, ajusté à sa taille, le fit sourire mais déjà le semi-homme s'agita.

– Où est Merry ? fit-il en regardant tout autour d'eux.

– Merry ? s'étonna Aragorn. Il n'est pas ici, il est resté au Dernier Camp au Rohan.

Un malaise envahit Elrohir, les autres n'étaient bien sûr pas au courant, et Pippin ne se démonta pour autant.

– Je suis certain qu'il est ici. Si Eowyn y est, Merry aussi !

Aragorn tiqua avant de reprendre.

– J'ignorais la présence d'Eowyn...

– Mon frère, n'as-tu rien à nous dire ? Demanda alors Elladan.

Il se tourna vers Elrohir qui sentit son malaise s'accroître. Autant tout révéler...

– Eowyn et Merry faisaient bien partie de cette bataille... Isil leur a prêté Symbel pour les mener aux combats.

Elladan leva les yeux au ciel mais se passa de commentaire tandis qu'Aragorn se contenta de hocher la tête.

Tome 3 - La lune ardente de FangornOù les histoires vivent. Découvrez maintenant