WHISPERS T3 The Whisper of my past [Terminée]

17 | Nokomis

Je l'avais fait.

Sans remords.

Sans doute.

Pour le sauver.

D'elle, de lui.

De son pouvoir.

Mes mains tremblaient et les cris d'Arzhel se répercutaient autour de nous. Il hurlait. Je n'avais pas fait ça pour le priver de sa vue, juste pour le protéger. Parce que je savais de quoi Rivqa était capable.

Elle le soignerait.

Et je l'entrainerais mieux.

Un mal pour un bien. Un mal pour un bien.

Je me le répétais. Une litanie. Encore et encore. Pour justifier cet acte désespéré.

Personne ne me prendrait Arzhel. Personne ne me prendrait l'homme que j'aimais. Surtout pas elle.

SURTOUT PAS ELLE !

Pas tant que je respirais.

Pas tant que je vivais.

— Ton pouvoir, je le sens, ma fille. Je le sens qui couve. Pas toi ?

Elle m'atteignit de plein fouet et plongea dans mes yeux.

Plongea en moi.

Je la laissai venir.

Je la laissai se glisser dans ma tête, se parer de mes membres.

Je la laisser tenter de me grignoter.

Elle me voulait ? Elle m'aurait.

— NOKOMIS !

Le cri d'Arzhel. Si vivace, si terrifiant. M'en voudrait-il ? Me haïrait-il pour ce choix ?

— Pour protéger ceux qu'on aime, il faut parfois être prêt à commettre des atrocités, tu ne crois pas ?

La voix de Liam.

La fiole.

Protéger.

Protéger.

Protéger.

Pour continuer à vivre.

Pour continuer à aimer.

Mes mains se refermèrent autour des poignets de la Prima.

J'inversai la tendance et cette fois, ce fut mon pouvoir en elle.

Elle hurla. Elle hurla et une nouvelle vague de pouvoir nous ramena à l'endroit initial. Des bruits de combat. Evy qui luttait contre Artesidas.

Et mon pouvoir qui recouvrait celui de la Prima.

J'étais plus forte.

Je suis plus forte.

Je me concentrai sur elle, uniquement sur elle. Je sentis sa peur.

Sa terreur lorsqu'elle comprit que je la dépassais.

Que je pouvais l'annihiler.

Totalement.

Je vis des morceaux d'elle.

Je tirai sur ses forces et l'aspirai.

Mes yeux me brûlèrent.

Ma tête tambourina.

Je criai, elle aussi.

— NOKOMIS !

Une explosion d'ombres. Partout. Dans le ciel, sur terre.

Elles jaillirent et foncèrent sur l'ennemi. Je lâchai la Prima qui tituba en arrière.

Une boule de ténèbres se forma tout près de nous et je vis des silhouettes.

Elijah, Amalia, Liam et Zarkan.

Les Chasseurs et le Seeker.

Liam fit un pas et son pouvoir – ses ombres – se massèrent derrière lui, comme prêtes à être lâchée.

La Prima siffla. Elle me fixa quelques secondes.

Une promesse entre nous.

La prochaine fois, l'une de nous deux écraserait l'autre.

Les ombres se jetèrent en avant, mais déjà, nos ennemis disparaissaient les uns après les autres.

Je n'entendais que mon souffle.

Et mes yeux, qui me brûlaient, me brûlaient et me brûlaient encore.

Les lycans levèrent la gueule vers le haut et hurlèrent.

Ils pleuraient les morts.

* * *

Rivqa se redressa du corps endormi d'Arzhel. Les marques ne partiraient pas, mais au moins, il verrait.

Il verrait.

— Tu es sûre que tu ne veux pas que...

Je secouai la tête, avant de me rappeler qu'elle ne pouvait pas me voir.

— Je crois que... ça ne partira pas.

Des marques couraient autour de mes yeux et je savais que c'était en partie dû au début du drainage de la Prima.

Ça ne me faisait pas mal.

Il régnait dans la demeure d'Acelin un triste silence. Il avait perdu beaucoup des siens et il les pleurait, il les pleurait avec douleur.

Rivqa posa sa main sur mon épaule au moment où la porte de la chambre s'ouvrit sur Achilles. Il attrapa la télécommande et alluma la télé.

Je vis Aslander et le Prime, prêts à faire une annonce qui changerait la face de ce pays.

Pour toujours.

Les doigts d'Arzhel dans les mieux, je tentai de respirer ou au moins de retrouver mon souffle.

« — Cette décision n'a pas été simple. La situation est grave. Nous sommes en guerre, dit l'Empereur des lycans. Nous sommes en guerre et nous devons protéger tous ceux qui peuvent l'être. C'est pourquoi nous avons décidé que dès cette nuit, ceux qui n'ont pas la capacité de se battre dormiront. Un sommeil qui durera le temps nécessaire. Mettez en sureté ce qui peut l'être, laissez le reste. Je sais que nous vous demandons beaucoup, je sais que vous avez peur et je comprends cette peur, parce que moi aussi il m'arrive de douter. Mais pas cette fois. Nous serons forts dans cette épreuve. Quoi qu'il advienne. Humain, lycan et Seeker. Ensemble. Nous ferons face. Comme nous l'avons toujours fait. »

Je n'écoutai pas la suite. Ma joue contre le torse d'Arzhel, j'écoutai son cœur.

J'écoutai sa vie.

Son amour.

Sa force.

J'ignore combien de temps je restais là, mais lorsque la nuit fut profonde et le pays silencieux, des alarmes se déclenchèrent dans tout le pays. Et juste après, une vague implacable de magie s'écroula sur l'Australie.

Et ceux qui devaient dormir sombrèrent.

Ce fut indolore et rapide.

Un mal pour un bien.

Je me le répétais et j'écoutai le cœur d'Arzhel.

La guerre commençait. Aujourd'hui, cette nuit.

Elle nous tendait ses bras et promettait d'être terrible.

Mais nous ferions face.

Car à chaque mal, son remède.