IX - Partir du bon pied

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-Thomas-


- Eh Newt, t'as pas vu Calyx ?

- Pas depuis la réunion de ce matin. Pourquoi, tu voulais papoter ? Tu sais, on est pas en vacances ici. Ces derniers jours c'était bizarre à cause de... bon j'te fais pas un dessein, mais il va falloir s'y remettre sérieusement. Surtout qu'on n'aura plus que des demi-journées de travail, va falloir charbonner, maugréa-t-il.

- Ça va je suis pas con, je suis ici depuis plus de trois mois je te rappelle. Et justement, c'est à propos de ça que je voulais la voir.

- Ben voyons.

- Newt sérieusement. Et puis arrêtes ton char, on sait tous les deux très bien qui de nous à eu un coup de cœur pour la mystérieuse guerrière sortie de la Boite. Et c'est pas moi, lâchais-je avec un clin d'œil. Ça va, tu sais que tu peux tout me dire.

- Thomas, j'ai rien à te dire. Je sais pas moi-même si ce que je ressens – je ressens rien, ok ? c'est une façon de parler. Je sais pas si c'est parce que c'est une fille ou parce que c'est... elle. J'ai l'impression d'être inexorablement attiré vers elle, tu piges ? Et vu que c'est la seule nana c'est peut-être juste mon cerveau qui me joue des tours. De toute façon, j'ai pas le temps pour ça. Et puis c'est un coup à se faire planter, ajouta-t-il sur le ton de l'humour.

Mais moi je sentais bien que quelque chose le tracassait. C'était pas comme avec Minho ou moi. Quand on parlait de Calyx, en dehors du cadre de notre joyeuse petite bande, c'était pour dire à quel point on la trouvait canon – ou effrayante, selon les jours. Newt pensait pas comme ça. Il voulait la protéger, et à mon avis quand on veut protéger quelqu'un qui serait capable de nous terrasser un à un au corps à corps, c'est pas anodin. C'est pas la protéger qu'il veut, c'est plus complexe que ça. Enfin bon, qu'est-ce que j'y connais. En parlant du loup armé jusqu'aux dents, on en vit le bout du museau. Calyx fit son apparition et le visage de Newt se fendit d'un sourire enfantin.

- Tiens ! Tu trimballes encore tes dagues alors qu'Alby te les a fait poser ce matin ? demanda-t-il.

- Alby, Alby... souffla-t-elle comme si elle avait totalement oublié son interdiction.

- Je te cherchais, je vais te faire faire le tour du Bloc. T'as du déjà en voir un peu mais ce matin on a fini d'aménager les postes d'entrainement, commençais-je en me mettant en marche. Bon, pour la course à pied on va juste faire des tours de terrain, qu'on a balisé. Dans la pleine pour le cardio, dans la forêt pour simuler un terrain accidenté. En fait on a rien installé dans la forêt, les racines et les cailloux c'est suffisant et puis on a beaucoup à faire. 

Minho fit à son tour son arrivée. En fait, il tomba plutôt sur nous alors qu'on approchait de la porte Sud. Il percuta presque Newt qui fit une grimace de dégout en essuyant la sueur que le coureur avait laissé sur son bras. Heureusement d'ailleurs, qu'il n'avait touché que son bras car au vu de la carrure de ce dernier, je ne donnais pas cher d'un Newt statique qui se le prendrait en pleine tronche.

- Non non non ! cria Calyx alors que Minho la prit dans ses bras pour la soulever dans les airs. T'es trempé putain !

- J'ai trouvé ce dont on a parlé, s'exclama-t-il trop joyeux pour se soucier de son état. Je vais vite faire un rapport. A plus les tocards.

Et il reparti en courant sans plus de détail. Je décidais de reprendre ma visite guidée en ignorant la mine déconfite que tirait Newt afin de changer de sujet au plus vite.

- Heu, oui. Bon ensuite pour les épreuves de force physique, les bâtisseurs ont fait des miracles en si peu de temps. Ils nous ont bricolé des tas de machins avec différents poids pour que chacun puisse progresser à son rythme. Il y a aussi quelques parcours d'équilibre. 

- Vous avez bien bossé les gars, souffla-t-elle d'un air admiratif.

- Et attends c'est pas fini. On t'a réservé une petite surprise.

Alors que nous dépassions le centre du Bloc, juste derrière la cabane du Conseil, Calyx écarquilla les yeux.

- Mais non ! Putain c'est génial ! Thomas c'est vraiment parfait tu te rends pas compte, ça va tellement nous aider. Si j'avais su que vous prépariez ça...

Elle passa un bras autour de mes épaules et me serra contre elle, m'étouffant presque. Je m'esquivais avant qu'elle ne puisse m'ébouriffer les cheveux et restait à bonne distance pour contempler le travail accompli. Tout le monde y avait mis la main à la pâte. D'ailleurs je ne pouvais pas croire que Calyx n'ait pas aperçu l'avancement des travaux, mais elle avait l'air sincèrement surprise. Sur le terrain devant nous se trouvaient différents postes d'entrainement particuliers. Ceux du maniement des armes. Des semblants de Griffeurs en bois attendaient de recevoir d'habiles coups de couteaux. Des ennemis en sac de pailles étaient près à se faire embrocher. Le stand de tir à l'arc avait aussi une sacrée gueule. Mais ce qui nous avait demandé le plus de boulot fut le tapis de lutte. Les sarcleurs avaient retourné la terre afin de la rendre la plus moelleuse. Nous y avions semé tout ce qui pouvait amortir les chutes – guenilles, paille, coton – et avions recouvert le tout d'un immense drap. Il s'agissait en fait de toutes nos couvertures cousues entre elles pour n'en former qu'une, et clouée aux quatre coins de la parcelle. Certains avaient rechigné à faire ce précieux don, mais vu les températures actuelles ça ne posait pas de problème. A vrai dire, il me tardait de commencer l'entrainement. Les matinées étaient douces, les après-midis chaudes mais parfois nous avions droit à une légère brise rafraichissantes. La perspective d'aller m'entrainer, et surtout dans le but de sortir d'ici m'avait complètement changé. Certes, je n'étais pas ici depuis si longtemps, mais je sentais un regain d'énergie bienvenu. Je ne me levais plus complètement crevé d'avoir réfléchi toute la nuit. Je m'endormais sereinement, parfois en laissant mon esprit s'évader au-delà des murs du Bloc, comme s'il savait d'avance ce qui nous attendait. Mon humeur générale était beaucoup plus légère. Je passais de bons moments avec les autres gars. Les quelques disputes quant à la disposition des éléments, ou bien de la répartition des tâches étaient balayées comme si ça n'avait pas grande importance. L'espoir rendait réellement la vie plus facile.

Le reste de l'après-midi fut consacré aux derniers préparatifs. Voir tout le Bloc – hormis certains matons qui se servaient de « questions logistiques » pour esquiver la basse besogne – travailler main dans la main dans un but commun était grisant. Bon, on avait déjà un but commun avant, c'est pour ça que les coureurs risquaient leur vie tous les jours. Mais l'arrivée de Calyx avait bouleversé notre quotidien. Surtout depuis que nous avions eu la preuve qu'elle était responsable de tous les coups de pouce supplémentaires que nous avions reçu. Si elle avait pris le risque de monter par la Boite, c'est qu'elle savait qu'on avait une chance. Si elle s'était elle-même tatoué le bras, c'est qu'elle savait que sa mission devait aboutir. Et ça, ça valait bien quelques heures de travail acharné. 

Le glas du Labyrinthe - Sors-les de làOù les histoires vivent. Découvrez maintenant