Chapitre 31

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Maddie

- Tout va bien ?

Je regarde Lee. J'aimerais lui répondre par l'affirmatif, le rassurer. J'aimerais vraiment pouvoir lui assurer que je me porte comme un charme mais en lisant ces deux petites phrases, je ne suis pas sûre d'aller bien. Tu parles et tu te sens forte...Mais plus pour longtemps... Est-ce une menace ? Une simple plaisanterie ? Je n'en sais strictement rien mais cela ne me plaît pas.

Je peine à reprendre à mon souffle et acquiesce lentement.

- Arrête de mentir, Madeleine Grace. Je vois bien qu'il y a quelque chose. Qu'est-ce qui se passe ?

Je ne veux pas lui dire. Il ne sert à rien de l'inquiéter pour des broutilles. Seulement, il ne me laisse pas le loisir de décider ou non de lui exposer les faits. Il se penche vers moi et lit par dessus mon épaule. Son léger souffle dans mon cou me fait presque oublier cette histoire. La distance presque inexistante entre nos deux corps me plonge dans un état second. Quand il s'écarte, je reviens à la réalité. Je baisse les yeux vers mon T-shirt et observe la phrase que j'ai écrite un peu plus tôt dans la journée. Quelqu'un est sûrement contre tout cela et essaye de me déstabiliser. Mais pourquoi ne pas me le dire en face ? Et comment a-t-il pu avoir mon numéro de téléphone ? Les questions se pressent dans mon esprit. Je n'y comprends rien.

- Putain ! C'est quoi cette merde !?

Il se lève et fait les cent pas. Certains lycéens nous regardent. Je baisse la voix pour lui dire :

- C'est sûrement une blague.

Il lève les yeux au ciel.

- Pff ! Tu parles ! Tu trouves ça drôle, toi !? Parce que, moi, je trouve ça complètement con !

Peut-être est-ce Walter ou Fleur qui me font une blague. Voilà, c'est sûrement mes amis. Ou alors...C'est Sarah. C'est tout à fait plausible quand on y pense. Elle aime Lee. Peut-être est-elle jalouse ?

Je presse mes doigts contre mes tempes. Je commence à avoir mal à la tête. Ce message ne me rassure pas.

Lee s'apprête à me dire quelque chose mais il est interrompu par une fille qui s'avance vers nous. Deux nattes encadrent son visage. Son teint hâlé me fait jalouser. Même en plein été, je ne bronze pas.

Un petit sourire vient effleurer ses lèvres. Elle paraît timide. Elle doit être en première. Ses mains serrent les bretelles de son sac.

- Bonjour, dit-elle d'une voix claire et basse, Agathe.

Elle hoche la tête pour nous saluer. Pour ma part, je ne sais comment réagir. Elle m'a l'air très sympathique mais que nous veut-elle ? Lee lui sourit et me regarde. Il ne comprend pas plus que moi la venue de cette fameuse Agathe. Je finis par me présenter afin de briser le silence qui prend ses aises.

- Je suis Maddie et voici Lee.

Elle acquiesce en baissant la tête.

- Je sais qui tu es. Je suis la petite sœur de Jane.

Mon cœur s'arrête l'espace d'un instant. Toute la culpabilité que j'ai essayé d'étouffer revient, me frappe de plein fouet. J'ai l'impression qu'il y a écrit "coupable" sur mon visage. J'échange un regard avec Lee, il est comme moi. Aussi gêné que je le suis.

C'est simple, nous aurions pu aider Jane mais nous n'avons rien fait. Nous avons regardé sa descente aux enfers. Nous avons continué notre vie comme si de rien n'était. Nous avons préféré fermer les yeux parce que c'était plus simple. Plus simple de faire semblant que cela ne nous concernait pas. Mais la réalité est bien plus complexe que cela. Nous étions tous concernés. Nous sommes tous concernés. Même si ce n'était pas notre amie, c'était un être-humain et nous l'avons laissé souffrir. Nous avons laissé Dorien et ses amis l'humilier. Nous avons laissé les gens lui faire croire que c'était de sa faute et qu'elle n'aurait pas du prendre ces photos. De notre mutisme, nous l'avons condamné à hurler en silence.

Confessions d'un féministeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant