- Papa, on dit qu'on s'aime jusqu'aux étoiles?
- Je t'aimerai jusqu'aux confins de l'Univers, mais l'éternité ne sera pas assez suffisante tellement je t'aime à l'infini.
Il y avait 𝙚𝙡𝙡𝙚, les étoiles et cet amour incommensurable.
Il y avait 𝙚�...
- Je me sens différent voilà tout. Différent d'eux. De mon groupe. Des gens. Différent de tout. Je me sens bleu et gris. Peut-être d'ailleurs plus gris que bleu.
- Et comment pourriez-vous expliquer cela M. Kim?
- Je ne sais pas, c'est vous la psychiatre, c'est à vous de m'expliquer. Il marqua une pause. Je me sens comme dans une constellation remplie de points scintillants de la plus magnifique des lumières, et en même temps comme une étoile perdue dans la galaxie. Là avec eux mais en même temps complètement étranger à eux.
- Je vois...Ce qu'il y a à l'intérieur de vous, ce que vous ressentez, seul vous, pouvez le décoder. J'essaie de reprendre votre vocabulaire. En fait vous n'avez pas encore donné de nom à votre constellation pour la comprendre. Même si ce n'est pas encore clair pour le moment, je peux vous assurer que nous arriverons ensemble à démêler tout cela et à vous intégrer à cette galaxie. En avez-vous déjà envie? Avez-vous ce besoin actuellement ou préférez-vous rester bleu et gris? Essayez de me décrire ce que vous ressentez.
- Hum....comment le savoir? voilà qui pose problème, riposta-t-il,ses mains touchant ses lèvres en signe de réflexion.
Il soupira en expirant le peu d'air qu'il retenait encore. En temps normal, il aurait usé de ses charmes pour détourner la conversation ou la diriger comme il en avait envie pour ne pas se dévoiler. Mais pas aujourd'hui ou plus maintenant.
Ses jambes se décroisèrent, ses grandes mains manucurées se chevauchaient maintenant sur l'une de ses cuisses. Et de sa voix grave, les mots traînants à venir :
- Oui...je crois que j'en ai envie. Je crois que j'ai envie de comprendre et d'être compris. Même si j'ai l'impression que cela n'a jamais été le cas. Je ne vous parle même pas de ce surnom d'alien dont on m'avait affublé et que je n'aimais pas. Je crois à une vie ailleurs ou une vie bien plus spirituelle, mais pas au point de me sentir inhumain, non. Les couleurs m'identifient davantage je trouve. J'aime mettre des couleurs sur les mots. On m'a toujours dit que cela était étrange mais moi je les vois les couleurs sur les mots, les lettres ou ce qu'on ne voit pas, comme le vent qui peut prendre différentes teintes. Je m'égare encore n'est-ce pas? Ce que vous voulez que je vous avoue est dur à exprimer sans couleur ou sans terme d'astronomie...
Il essaya de reprendre contenance, se redressant maladroitement dans le fauteuil qu'il occupait, se touchant l'arête du nez et inclinant la tête sur le côté, les pointes de ses cheveux bruns plus longues que d'habitude et légèrement ondulées venaient maintenant frôler ses tempes.
- Je...je crois que je n'ai plus forcément envie de revenir à celui que j'étais avant. Avant tout cela. Même si je l'ai souhaité fort à un moment, même si j'aimerai effacer toutes mes erreurs passées, celles qui ont fait du mal. Car j'en ai fait du mal. Mais ce que je sais...c'est que je veux que vous m'aidiez à vivre Mademoiselle Choi.
Sa voix s'éteignit en un murmure, qui parvint tout de même aux oreilles de la thérapeute. Ses yeux se perdirent dans le vide. Son regard ne suivait plus celui de la jeune femme depuis un moment déjà.
Il avait l'air là - oui avait l'air, parce qu' "un regard de Kim Taehyung" est toujours énigmatique - et scrutait le bureau aux couleurs neutres et l'agencement plutôt agréable. La lumière du soleil qui s'infiltrait à travers les voilages de coton. Le fauteuil de cuir marron dans lequel il s'enfonçait et qu'il aurait bien vu dans son salon. Ses pieds qui s'ancraient au sol. Puis ses mains fines et baguées.
- Lorsque vous associez des couleurs à un objet, un mot ou un sentiment, on appelle cela de la synesthésie, il n'y a rien d'anormal à cela, ne vous inquiétez pas! Ce n'est pas un trouble ni une déficience, mais une différence que vous pouvez transformer en force, répondit-elle en essayant de le faire sourire et capter son attention. Vous en avez fait une très belle chanson d'ailleurs avec Blue & Grey, ou ce terme Borahae, I Purple you, qu'utilisent vos fans. Mais revenons à vous et ce que vous venez d'exprimer Taehyung-ssi. Elle pesait ses mots. Je suis fière de vous. Les mots que vous venez d'utiliser sont très forts vous savez, et représentatifs d'une nouvelle étape dans la guérison. Nous allons tout faire pour que vous soyez fier de vous également.
Un sourire sincère s'étalait sur le visage confiant de la psychiatre.
- Vous le pensez, même après tout ce que je vous ai confié? Un soupir las et confus s'échappa de ses lèvres. Je suis le pire des enfoirés, vous le savez très bien.
- Tout le monde a le droit à une seconde chance, et même à plusieurs Taehyung-ssi. Ce que vous m'avez confié ces dernières séances est selon vous la pire des attitudes ou des pensées. Je peux vous assurer que votre vision est biaisée. Moi j'y vois seulement une étoile perdue dans l'univers qui ne demande qu'à retrouver sa galaxie comme vous le décrivez si bien, et qui demande à être connue et aimée.
Un rire guttural et rauque se fit entendre. Le brun n'était pourtant pas d'humeur à rire jusque-là, mais entendre ces litanies ne pouvait que l'interpeller.
- C'est plutôt pathétique, non? Je suis connu du monde entier et aimé par des millions de fans, et vous pensez que j'en ai encore besoin de cet amour? Moi? Je ne sais même pas en donner correctement.
- Je ne m'adresse pas à V des BTS l'un des plus grands groupes musical du monde. Je ne parle pas de cet amour-là, celui des armys, de vos parents ou d'un conjoint. Je m'adresse à vous Taehyung-ssi, à l'être que vous êtes à l'intérieur. Je parle de l'amour et de l'affection que vous devez vous donner. Apprendre à vous connaître et vous respecter, à savoir ce qui est le mieux pour vous, et à vous chérir, voilà ce que c'est. Lorsque vous vous aimerez enfin, vous verrez que l'amour est tout autour de vous et qu'il suffit juste de le cueillir. Accepter de vivre, c'est aussi accepter l'amour.
Le silence se fit. Un long silence dans lequel chacun se complut et qui dura le temps d'un envol.
Le regard dans le vide, sa fameuse moue au coin des lèvres et une perle d'eau salée au coin des yeux qui n'attendait que l'autorisation de son propriétaire pour s'écouler, Taehyung n'en menait pas large.
Non Taehyung ne comprenait pas cet amour-là. Il n'était plus sûr de lui, plus sûr de qui il était, plus sûr de savoir où il en était dans sa vie et encore moins de savoir se donner de l'amour.
Et pourtant au plus profond de lui il voulait aimer si fort à nouveau. Jusqu'à s'en faire mal. Jusqu'aux jointures de sa moelle. Non pas jusqu'à en mourir parce que cela, il n'avait plus le droit, il l'avait compris maintenant. Mais aimer jusqu'à l'épuisement, jusqu'à ce que son souffle se mêle à celui d'une personne lorsqu'ils ne feraient plus qu'un. Et réapprendre à aimer parce cet amour-là lui manquait cruellement.
Si juste un instant, il pouvait envisager de se le permettre. Avec son astre qu'il avait tant convoité et tant négligé.
Alors à cet instant où il comprit, où cette révélation percuta tout son être, Taehyung se dit qu'il serait prêt à tous les sacrifices pour cette étoile qui tournoyait et scintillait autour de lui dans son univers depuis tant de temps sans jamais qu'il ne l'ait réellement atteinte.
Même si cela voulait dire, en premier lieu, offrir de l'amour à sa propre étoile, en l'occurrence lui-même.
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