3. Deuil.

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Le calme. Les cris. Le silence. La tempête.

L'ambiance paraissait lunatique. La situation me semblait étrange. J'avais l'impression d'avoir quitté la réalité pour plonger dans un monde parallèle. Peut-être était-ce dû au choc des derniers événements ? Peut-être ne voulais-je pas digérer ce qu'il s'était produit et depuis, je me sentais déconnecté de tout ? J'avais l'impression de vivre dans une vulgaire blague, rien n'avait de sens, tout manquait de cohérence.

En réalité, j'avais même du mal à mettre des mots sur ce que je ressentais. J'avais la mauvaise habitude de tout enfouir au fond de moi, de créer un bouclier entre moi et mes émotions lorsque les choses dérapaient beaucoup trop. C'était pour me protéger. Mais par moment, j'avais la sensation de ne plus exister. D'être parti hors de mon corps, ne laissant derrière moi qu'une coquille vide, un être de chair ayant perdu son âme, un robot continuant machinalement de fonctionner. Heureusement, cela ne durait jamais longtemps.

Et il y avait bien longtemps que je n'avais pas ressenti cette déconnexion. Jusqu'à maintenant. Mais cette sensation commençait enfin à s'estomper. J'avais mal au cœur. Comme sujet à un mal de mer.

— Qu'est-ce qu'il fiche ici celui-là ! s'écria une voix.

Je me détachai de mes pensées pour replonger dans le présent. Orso venait de se jeter sur Shaytan alors que ce dernier entrait dans la pièce où la majorité des rebelles étaient regroupés. Sans que l'Ogre n'ait le temps d'esquiver, l'Animalis lui envoya son poing. Le visage de Shaytan vola sous le choc, mais il se ressaisit bien vite, ne pouvant ressentir aucune douleur. Son unique œil s'écarquilla de frayeur devant un Orso enragé.

On avait beau tous se côtoyer depuis maintenant un long moment, l'entente entre les deux ne s'étaient jamais améliorée, bien au contraire. Plus ils se voyaient et plus leur rapport se détériorait. Orso n'avait jamais avalé la mort de Naïa et en reposait toute la responsabilité sur les épaules de Shaytan qui se contentait d'encaisser les coups aussi bien verbaux que physiques en glapissant de terreur.

Cette fois-ci, ce fut Bleizian, Hell et Martial qui s'élancèrent vers les deux Obscuras pour les séparer. A force, ce genre de disputes devenaient coutumières.

Martial enlaça Orso par le dos pour le faire reculer, mais ce geste ne plut pas à ce dernier qui se changea en grizzly et fit valser le Guerrier au sol. Shaytan poussa un cri de stupeur et avant que quiconque ne puisse réagir, Orso se jeta une nouvelle fois sur l'Ogre pour lui faire payer ses actions passées. Un jet de cendres le projeta contre le sol et Evilash se matérialisa aux côtés de son allié avec mauvaise humeur.

– Dois-je me répéter encore une fois pour que l'information intègre une bonne fois pour toute les esprits ? s'agaça-t-elle, celui qui se permettra de toucher à l'un de mes bras droits se verra subir de lourdes représailles. La prochaine fois que cet ours mal léché touchera à Shaytan, il aura intérêt à courir vite avant que je ne lui fasse rejoindre sa chère Naïa.

Martial déglutit bruyamment alors que Bleizian fusillait du regard Orso qui avait l'air de ne pas être le moins du monde affecté par cette menace. Evilash s'éclipsa aussi vite qu'elle était venue, entraînant avec elle son équipier. Orso ignora les regards qui pesaient sur lui et parti rejoindre Sanjana, installée au fond de la pièce, les jambes serrées contre sa poitrine, indifférente à ce qu'il se passait autour d'elle.

On ne pouvait pas dire que l'ambiance des lieux étaient réjouissantes... C'était maussade, triste, tendu... Les plans d'Evilash ne nous étaient partagés qu'au compte-goutte, on se sentait inutile et l'atmosphère électrique qu'avait envahi la pièce ces derniers temps donnait plus envie de prendre ses jambes à son cou. Tout le monde était de mauvaise humeur. Et au vu des derniers évènements, cela pouvait aisément se comprendre. Mais c'était écrasant...

Obscuras Tome 4 : L'indomptable.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant