Obscuras Tome 4 : L'indomptable.

17. Rancune tenace.

Le couronnement de Ronan s'était passé sans encombre. Nous étions de retour dans la Scaremountain sans avoir rencontré le moindre contretemps. Mais ce n'était que le début. La première étape. Ronan était peut-être reconnu comme le roi légitime désormais, mais les menaces planaient toujours autour de nous et ne le reconnaissait pas forcément comme tel.

La question de l'endroit de demeure du roi s'était posée. Traditionnellement, un souverain régnait dans un château, entouré de membres de la royauté, de cavaliers et d'Obscuras affectés au lieu. Cependant, se soumettre à cette règle était prendre un risque non négligeable. Nous étions officiellement en guerre contre les Darknils et ceux se pliant à leur cause. Demeurer dans un palais était dangereux. Les Darknils avaient, depuis des années, réussi à infiltrer les milieux royaux en toute discrétion et on ne pouvait pas se permettre de perdre le roi légitime à cause d'un manque de précaution. La Scaremountain n'était peut-être pas un endroit approprié pour un roi, mais elle était cachée et personne ne savait où nous trouver. C'était plus sûr. Bien que Ronan eût conscience de toutes ces choses, le fait d'être un roi qui se cachait de ses ennemis et vivait à l'écart de son peuple lui laissait un goût amer. Il n'avait pas voulu de la couronne et voulait par-dessus tout éviter d'être un dirigeant répétant les erreurs de ses prédécesseurs. Il voulait être proche des habitants, se battre pour eux et leur offrir le meilleur avenir qu'il était capable de leur donner. Il voulait mettre fin aux injustices. C'était ambitieux, mais nécessaire.

Cependant, la route était encore longue. Nous n'avions avancé qu'un pion sur l'échiquier de cette guerre, la fin de la partie était encore loin et la victoire beaucoup trop incertaine.

- Nous ne pourrons gagner tant que ce Minos sera en vie, fit constater Zahir, l'Alpha des Lycanthropes.

Nous étions tous réunis dans une pièce de la Scaremountain, jusqu'ici, dans le plus grand silence. Seuls Evilash et ses alliés proches manquaient à l'appel.

- Ce type a des points faibles ? demanda Bleizian.

Ses yeux de lave se posèrent sur Arachné en quête d'une réponse. L'arrivée des deux Animalis n'enchantait pas grand monde, ils subissaient la méfiance de tous. Mais lorsqu'il fallait adresser la parole à l'un des deux anciens alliés de la reine, étonnement, les rebelles préféraient se tourner vers Arachné, probablement parce que notre relation atypique avait attisé la curiosité. Et peut-être, aussi, que les rebelles avaient fini par se fier à mon jugement tout comme j'avais appris à leur faire confiance.

Arachné croisa les bras contre sa poitrine dans une grimace. Elle ne semblait pas prête à lui répondre. Elle ne mettait pas vraiment du sien pour se faire accepter...

- On ne peut pas tuer Minos, répondit Titus à sa place.

- Quoi ? s'agaça Zahir. Il n'est pas immortel à ce que je sache ! Il doit bien avoir un point faible.

- Il n'est peut-être pas immortel, mais il est extrêmement puissant. Essayer de le tuer reviendrait à du suicide. Personne ne fait le poids contre lui. Sans compter qu'il possède un pouvoir omniscient, il aura toujours un coup d'avance sur nous. Le meilleur moyen pour le neutraliser serait de lui faire avaler un nombre incalculable de pouvoir jusqu'à le rendre fou, mais cela reviendrait à sacrifier plus de la moitié de la population.

La nouvelle fut dure à digérer. Certains Obscuras se lancèrent des regards dépités. C'était compliqué de garder le moral lorsqu'on avait la sensation de se précipiter droit vers un mur.

- Si je comprends bien, grinça Orso d'un ton amer, le seul moyen d'éliminer ce monstre c'est de tuer des innocents pour le tuer psychologiquement. C'est impensable !