Il était tard. Elle avait bu la moitié de la bouteille, seule, dans le noir, devant son ordi pour oublier. Les images d'une vidéo défilaient sur son écran, lui faisant temporairement lâcher prise sur la réalité.
Le babyphone s'alluma, faisant entendre les pleurs du bébé. Elle soupira, se massa les yeux et se leva après avoir mit la vidéo sur pause.
Elle tituba légèrement sur la route de la cuisine et shoota dans les jouets du petit. Elle se pencha péniblement pour les ramasser et les jeta dans le coffre qui leur était dédié. Puis elle entra dans sa cuisine pour préparer le biberon. Elle fouilla dans tous ses placards, mais impossible de mettre la main dessus. Bordel...
Elle souffla, essayant de faire partir l'alcool qui lui donnait le tournis. Rassemblant le peu de pensées cohérente qu'elle avait, elle fini par prendre du lait dans son frigo et le mettre à chauffer dans une casserole. En attendant, elle chercha le biberon, le trouva et le prépara. Elle versa le lait dedans après avoir vérifié sa température.
Elle pouvait l'entendre depuis ici. Nom de Dieu, mais il allait finir étouffé cet enfant ! Elle se rendit comme elle pu jusqu'à la chambre, soupira une dernière fois et entra.
Aussitôt, les cris s'arrêtèrent.
Fronçant les sourcils, elle alluma la lumière. Plus de berceau. Plus de bébé non plus. Plus rien en fait. Juste le babyphone en plein milieu de la pièce vide. Babyphone qui était allumé et qui laissa entendre un frottement.
Elle laissa tomber le biberon qui s'explosa sur le sol. Un pas en arrière, deux, trois. Elle se retrouva collée au mur, incapable de comprendre quoi que ce soit.
La lumière dans la pièce s'éteignit seule et la porte se ferma doucement, sans bruit, mettant un voile pudique entre elle et la pièce.
Ses yeux se posèrent sur la poignée. Du sang noir et épais l'en recouvrait, gouttant lascivement sur le sol, se mélangeant au lait blanc et fluide qui s'était échappé du biberon.
L'alcool était déjà bien redescendu, mais pas assez pour qu'elle se souvienne.
Une seule question lui tournait en boucle dans la tête.
Où est le bébé ?
Une voix lointaine lui répondit, mais elle était incapable de savoir qui c'était ni où elle était ni même ce qu'elle disait.
Laissant tout en plan, elle reparti vers sa chambre prudemment. Les jouets jonchaient à nouveau le sol. Encore ces foutus jouets ! Elle se pencha pour les ramasser. Etrange. Elle aurait qu'il y en avait moins que ça tout à l'heure. Elle alla les ranger dans le coffre qui leur était dédié.
Elle fini par rentrer dans sa chambre.
Ce ne fut qu'une fois la porte fermée et qu'elle se souvint.
Elle n'avait pas de bébé. Au contraire.
Elle en voulait un. Elle voulait qu'on l'appelle « maman ». Parce qu'elle n'avait jamais pu le dire.
Son compagnon n'avait pas supporté la sentence du médecin et était parti. Elle avait passé les semaines suivantes seule, avec pour seul compagnon le babyphone sans piles qu'elle regardait avec tristesse.
Elle avait fini par sombrer dans l'alcool, buvant tous les jours à outrance et s'endormant sur le bureau en larmes.
Son sommeil était habité de cauchemars. Elle entendait la voix du médecin qui lui répétait encore et toujours que c'était impossible pour elle.
Elle entendit un bruit sourd derrière sa porte. Elle retourna et vit une petite tête la traverser pour lui sourire.