Il sonnait sans arrêt. Mais ils avaient été clairs. Ne pas répondre. Rien de plus. Il avait été laissé sans autre consigne que celle-ci.
Il soupira. Ce boulot était une aubaine pour lui, petit étudiant à la situation précaire qu'il était. Il était assez bien payé par rapport au travail demandé et il ne s'en plaignait pas.
Il n'était pas le plus futé des hommes, ni le plus malin, mais au moins, il savait repérer un bon plan quand il en voyait un.
Faire gardien de nuit dans un open-space en faisait partie.
Il se leva de son fauteuil. Bon dieu ce foutu téléphone commençait à lui casser les oreilles ! Il décida de s'en éloigner en faisant une ronde. Il prit sa lampe torche et prit à droite. Le tour durait 3 minutes chrono et dessinait un beau rond sur le plan qu'on lui avait donné.
Il revint. Le téléphone avait cessé de sonner. Miracle.
Pourtant, quelque chose le titilla. Il ne saurait déterminer quoi. Rien ne semblait avoir bougé mais tout semblait avoir bougé.
Il mit ça sur le compte de sa fatigue. Il regarda l'heure pour confirmer sa pensée :
03 h 30
Ainsi rassuré, il se remit à sa place.
Quelques minutes après, le téléphone se remit à sonner. Mais pas celui qui était devant lui. Un autre. Loin là-bas dans les ténèbres de l'open-space. Dans la bouche béante du Croquemitaine.
Il soupira en grommelant. On ne lui avait pas dit qu'il y aurait d'autres lignes encore ouvertes. Il se leva, prit sa fidèle éclaireuse et alla vers le son incongru.
Il allait trouver son origine quand il s'arrêta. Il leva les yeux au ciel. Quitte à être ici autant vérifier si ce n'était pas une mauvaise blague d'un employé resté ici pour une sorte de bizutage.
Il passa son faisceau sous les bureaux, dans tous les coins possibles puis, ne trouvant rien, fini son tour et revint à son poste.
Cette fois, il pu clairement voir qu'une sucrerie avec été laissée sur son bureau. Mais avait-elle vraiment été laissée sur le bureau ou l'avait-il oubliée ? La fatigue commençait à prendre le dessus sur ses pensées.
Il regarda l'heure, machinalement :
03 h 40
Il se remit dans son siège. Curieux, il goûta la douceur. Elle fondait sur la langue, libérant ses différents parfums et son croquant.
Lorsqu'elle fut finie, le téléphone se remit à sonner.
Ivre du sucre qui intégrait son organisme, il décrocha et mit le combiné sur son oreille.
Il n'eut que le temps d'entendre : « Bravo. »
Puis les plombs sautèrent.
Désormais dans les Ténèbres du ventre du Croquemitaine, il n'avait que sa lampe pour s'orienter. Il se leva pour chercher le panneau à fusibles.
Il prit à gauche, se rappelant qu'il était plus près de ce côté.
L'espace semblait se répéter entre les groupes de bureaux. Il leva sa lampe pour se repérer.
Il ouvrit grand les yeux. Ce n'était pas qu'il se répétait, c'est qu'il était infini !
L'étendue de tables accessoirisées par des ordinateurs lui donnait le tournis.
Peu importe où se posaient ses yeux, que des bureaux, des tables, des chaises.
Il couru droit devant lui, incapable de rester dans un endroit pareil.
Au bout de l'éternité, une porte. Simple et unique pièce de bois qui apportait son salut dans l'immensité.
Il s'engouffra dedans.
Lumière.
Il se retrouvait devant son poste.
Le téléphone se remit à sonner, différemment. Une sorte de mélodie macabre en sortait. Ses yeux se posèrent sur le fil qu'il avait décidé d'arracher pour faire taire cette abomination.
Coupé.
Il regarda l'heure.
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Une douce voix grave et suave se fit entendre dans le noir de l'open-space.
- Quel est l'enfant qui a osé manger ma douceur ?