Chapitre 2

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Point de vue Loup Blanc

Nous nous progressons un long moment dans des couloirs sombres. Ayo s'y oriente avec facilité alors que je suis complètement perdu. Le sol pavé finit par se transformer en terre et je comprends que nous sommes sortis du palais. Le chemin se fait petit à petit plus étroit, plus sinueux, et mes jambes me font défaut. Faire un tel effort juste après une cryogenisation est difficile. Je glisse sur un caillou et me rattrape de justesse au mur. La femme se retourne, elle me regarde, sans expression. Ses yeux sont creux, comme vidés de toute essence. Comme s'ils avaient vus beaucoup plus que ce qu'elle ne peut endurer. Comme les miens quand je deviens le soldat de l'hivers... Elle m'attend en silence alors que je reprends mon souffle. Je me redresse et elle reprend la route.

Nous marchons ainsi encore un long moment, jusqu'à ce nous débouchions dans une forêt.

- Encore un effort, nous y sommes presque, me dit-elle.

La végétation est dense et je suis incapable de dire de quel côté du palais nous sommes sortis. Il semble que nous en soyons toutefois assez éloignés car aucun bruit ne nous parvient. Nous avançons encore un peu et j'ai besoin d'une nouvelle pause. Sans un mot elle me tend une bouteille noire. Je ne la prends pas. J'ai pour habitude de ne pas accepter de boire ou de manger ce que des inconnus me proposent. Vieux réflexe. Elle n'insiste pas, mais la ride entre ses sourcils se creuse une nouvelle fois. Je regrette immédiatement, mais je ne laisse rien paraître. Je me relève et fait un dernier effort jusqu'à ce que nous arrivions dans une clairière coincée contre une immense falaise et une rivière. Ayo se dirige vers une petite hutte au toit de paille.

- Nous allons vivre ici, m'explique-t-elle sur le pas de la porte, aussi longtemps qu'il le faudra. Il n'y a ni électricité ni eau courante. Nous ne devons en aucun cas dépasser le champ à l'est ni le chemin de terre au sud, c'est la limite de la barrière électromagnétique. Prends tes marques, repere le terrain. Tu es chez toi.

Chez moi ? Je pose mon sac à terre et explore les alentours. L'endroit était totalement isolé. Une seule hutte, adossée à une immense falaise, un jardin potager, quelques arbres fruitiers, un feu de camp et un tronc d'arbre pour s'asseoir devant, un billot et sa hache, un établi et un râtelier. Derrière un récupérateur d'eau et ce qui devait être une douche et des sanitaires. Rien à voir avec les locaux high-tech du palais.

Je rejoins la femme dans la hutte. Murs en chaux, sol en bois, ni fenêtre ni portes, juste de grandes ouvertures. L'unique pièce est dépouillée. Mon cerveau enregistre de lui-même tous les éléments, on ne sait jamais. A droite de l'entrée une armoire, à gauche un meuble d'apothicaire, une petite table et sa chaise, au centre l'âtre d'un feu, une paillasse de chaque côté et au fond une immense bibliothèque, complètement démesurée au milieu de cet aménagement spartiate. Instinctivement, je men approche. J'y reconnais des classiques, certains de mon époque, et d'autres dans un dialecte que je ne connais pas, du wakandais.

- Tu vis ici ?

- Plus ou moins, me répond-elle. Disons que c'est un refuge.

Je garde le silence, pensif. Puis je lui demande :
- Une barrière électromagnétique ?

- Une mesure de protection. Contre l'extérieur, précisa Ayo, nous sommes recherchés. Toi comme moi.

Monsters Searching For Redemption [1] - Le Loup BlancOù les histoires vivent. Découvrez maintenant