Mémoire 2

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Le peuple de la capitale

Je marchais dans les rues de la capitale le lendemain de cette soirée. Une activité que plusieurs trouveraient banale. Personne ne se déplacerait uniquement pour assister à ça. Cependant lorsqu'il s'agissait du prince impérial, tous étaient au rendez-vous.

La scène m'est encore facile à me remémorer aujourd'hui, puisque pas grand-chose n'avait changé dans le pays. Du moment que je sors et qu'on me reconnait, je suis le centre de l'attention.

Enfin, je divague.

J'étais parti du palais ce matin-là assez tôt pour aller chercher mon passeport au ministère. Déjà, une foule considérable de curieux se rassemblait le long de l'avenue Saint-Impérius, le chemin principal se rendant aux portes principales du château et passant devant le lieu de travail des fonctionnaires et secrétaires de l'empire. Étant l'héritier, je ne pouvais pas entreprendre un déplacement majeur sans leur approbation et celle de mon père par la même occasion. D'où le besoin d'un passeport alors que je ne changeais pas de nation.

Pour obtenir cette autorisation, j'avais légèrement déformé la réalité de mes intentions à l'époque. Je leur avais dit que je souhaitais partir à la rencontre de mes futurs sujets pour apprendre à les connaître et me présenter comme leur prochain empereur, tandis qu'en vérité, je désirais seulement m'échapper de la résidence impériale. J'étouffais tellement que j'étais prêt à mentir pour pouvoir la quitter ne serait-ce qu'un temps, preuve que je me trouvais sur le bord du désespoir.

Par chance, comme je le décrivais précédemment, l'excuse quelque peu mensongère avait passé avec comme dans du beurre. La famille régnante, ma famille, ne sortait presque jamais de Laurios, la capitale, et même avec les trains, notre image et nos mots semblaient très distants pour les régions éloignées. Le ministère avait accepté volontiers de me laisser y aller et, contre toute attente, mon père avait signé le passeport et les documents officiels sans broncher suivant leur décision.

Puisqu'il connait certains de mes stratagèmes déjà utilisé par le passé, j'aurais cru qu'il refuserait, mais non. Je ne savais pas à cette date s'il avait décidé de me faire confiance ou s'il était simplement désillusionné et sans énergie pour me retenir. Personne ne m'a encore révélé qu'est-ce qui lui était passé par la tête ce jour-là.

Mais cela ne possédait aucune importance pour moi à ce moment. J'étais un homme un peu plus libre.

Le passeport en main, je devais désormais aller prendre le train.

Un mur de gardes impériaux longeait la route menant à la gare. Ces soldats retenaient la masse de gens se massant derrière eux. Tous voulaient avoir la chance de me voir et de me dire quelques mots et l'enthousiasme était presque incontrôlable. Comme si ce n'était pas assez, deux employés du ministère m'accompagnaient à ma droite et à ma gauche.

Durant ce cortège, Je pouvais entendre des morceaux de ce qu'on disait sur moi dans la foule :

« Notre prince est si intelligent et beau! » dit quelqu'un.

« Il prend ses tâches et ses sujets au sérieux. Ce sera l'empereur le plus empathique de tous. » fit un autre.

« Regardez ses vêtements, il a toujours eu de bons goûts. Je me demande à quoi ressemblera les réceptions qu'il organisera. Y serons-nous enfin conviés? »

« Avec sa sœur pour l'épauler et bientôt une épouse, il est très bien entouré. »

« Il ne se laisse pas contrôler par ses émotions. Il a l'étoffe des nobles guerriers d'autrefois dont le sang coule dans ses veines. »

Mémoires d'un reflet sur les flotsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant