Chapitre 22

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JaeMin courait de toutes ses forces, le souffle rapide et les yeux brouillés par les larmes. Il avait affreusement mal au cœur, le sentiment de trahison qui le brûlait de l'intérieur était pire que tout. Il ne comprenait même pas pourquoi il pleurait, pourquoi il était aussi atteint. JeNo n'était qu'un stupide guerrier engagé par ses parents pour le protéger, il ne devait attendre rien d'autre de lui. Pourtant, l'entendre avouer à sa sœur qu'il n'était rien de plus qu'un moyen de parvenir à ses fins lui causait tellement de douleur qu'il avait l'impression de mourir.

L'oméga sanglotait, il ne voyait plus où il mettait les pieds. Tout ce qu'il souhaitait était mettre le maximum de distance entre cette maudite ferme et sa propre personne. Il irait de lui-même chez son futur mari, il n'avait besoin de personne.

Il trébucha sur une pierre qui sortait du sol et fit plusieurs roulades avant de s'arrêter au bas d'une colline, le corps aussi meurtri que son cœur. JaeMin se redressa sur ses coudes, pleurant toujours. Il ne parvenait pas à s'arrêter, la souffrance était infernale. Il n'avait même pas pris le temps de s'habiller avec ses vêtements de voyages, il était resté avec sa tenue de nuit et s'était juste glissé dans ses chaussures avant de s'enfuir. Le jeune homme regrettait de s'être faufilé au rez-de-chaussée pour espionner la conversation de son protecteur, s'il n'était pas descendu il n'en aurait rien su et il n'aurait pas aussi mal.

JaeMin n'avait pas réfléchi, il était un jeune homme impulsif. Dès que les paroles de son protecteur l'avaient heurté il s'était enfermé dans une sorte de semi-conscience protectrice avec comme seule pensée qu'il devait de mettre de la distance entre eux. Alors il s'était glissé hors de la ferme avec toute la discrétion dont il pouvait faire preuve, le souffle retenu de peur de se faire surprendre par quelqu'un, puis il s'était enfui dans la nuit. JaeMin ne savait pas le chemin qu'il devait emprunter pour se rendre chez son futur époux, il aviserait plus tard.

Il se releva en reniflant. Il avait mal aux genoux et ses paumes de mains étaient abîmées avec sa chute. Un hoquet douloureux fit se soulever son torse et il essuya sa tenue tant bien que mal. Il était complètement perdu, JeNo avait toujours été son pilier mais il devait faire sans à présent. Il avait compris en écoutant la discussion entre son protecteur et NaEun à quel point sa famille leur avait fait du tort, à quel point il avait fait du tort et combien ils le détestaient. Il ne voulait plus être une charge.

Il ne savait pas depuis combien de temps il courrait mais il avait les jambes lourdes et une crampe au mollet lorsqu'une forêt se dessina devant lui. JaeMin marcha lentement, un peu inquiet. Il ne s'était jamais rendu dans un bois tout seul et celui-ci lui semblait particulièrement effrayant. L'oméga essuya ses joues en reniflant, indécis.

La nuit était toujours noire, mouchetée d'étoiles brillantes. JaeMin, plus calme, regretta alors d'être parti sur un coup de tête mais sa fierté lui interdisait de faire le chemin inverse. Il avait pris sa décision, il serait indépendant. Il n'était pas moins capable qu'un autre, il allait traverser cette ridicule plaine boisée, trouver un village et demander son chemin.

Un pas après l'autre, son cœur battant lourdement dans sa poitrine, l'oméga pénétra dans la forêt. Il y faisait plus frais et il frissonna. Il n'était parti qu'avec sa tenue de nuit et ses bottes, rien de très chaud ou protégeant de l'humidité. Le noiraud se frictionna les bras, autant pour se réchauffer que pour se rassurer. Les bruits et points lumineux dans les bois étaient terrifiants, il avait l'impression d'être observé de toutes parts.

— Je peux très bien me débrouiller tout seul, marmonna l'oméga. J'ai pas besoin de lui, c'est qu'un tas de muscles idiot.

Entendre sa propre voix l'aidait à garder son calme, d'autant que la fatigue et ses émotions à fleur de peau lui faisaient voir toutes sortes de choses. Il avança encore un long moment, ce qui lui semblait être une éternité, pourtant l'aube ne pointait pas lorsqu'il s'arrêta au pied d'un arbre. Assoiffé par sa marche, il se laissa glisser contre l'écorce en gémissant. Il avait encore envie de pleurer comme un enfant et de rentrer se cacher dans les jupons de sa mère.

Blasphème [NoMin]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant