𝐗𝐗𝐕𝐈𝐈𝐈. Lᴜɪ

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Lui,

Il a vécu quinze printemps, il a vécu quinze hivers, il a vécu quinze concerts,

Il était accro à la musique, il s'y noyait et n'en ressortait pas, il y a des rêves qu'il gardait dans son cœur quand il faisait tourner ses CD sous ses doigts.

Il aimait l'été, en avait vécu quinze, il aimait l'odeur des rires et le goût de la mélancolie, il se glissait dans la peau d'un fou atteint par une overdose d'euphorie lorsque ses paumes se coloraient de peinture,

Il gardait ses peines sous scellé pour ne pas risquer d'abîmer les autres, il trimballait d'l'espoir au fond d'son sac à dos,

Il s'habillait en jean-converse et se noyait dans la foule, passant inaperçu, un sourire accroché aux lèvres, comme s'il se réveillait après une mort d'une nuit.

Flashs d'engueulades, de fous rires et de crises d'angoisse, parfois l'écriture du silence dans les bras de la nuit,

Il le fixait de loin, maladroit, sans trop savoir quoi lui dire, les yeux remplis d'étoiles,

Les mots semblaient bloqués au creux de sa gorge, balayés par les vagues de sa pomme d'adam, et le rougissement de ses joues s'amusait à le trahir, comme pour le pousser à cesser le silence,

Et si son cœur s'affolait, ce n'était pas grave, car pourquoi donc prêter attention à un jeune artiste un peu paumé ? Celui vers qui ses pensées le poussaient ne devait sûrement même pas le connaître.

Et pourtant son image le hantait, le hantait si fort, le hantait tout le temps, le hantait tant et si bien que c'en devenait insupportable.

Lui, il tentait de l'oublier en courant dans les champs de coquelicots, criant et riant à s'en casser la voix,

Mais tout le lui rappelait, de l'odeur du soleil jusqu'aux larmes des nuages, et chaque pétale de rose lui piquait le cœur comme si c'était une épine.

Il se noyait dans la foule, il était un parmi tant d'autres ; l'univers aurait très bien pu fonctionner sans lui, et rien ne changerait si son visage disparaissait de la surface de la terre.

Mais il était là, manifestement. Il était là, et ça voulait dire quelque chose, non ?

On a qu'une vie, faut la vivre, la saigner, la rire, la traverser, la danser, la chanter, l'aimer. Faut être libre.

Un beau jour, il prit son courage à deux mains, il se présenta un peu trop maladroitement au garçon,

Il l'invita à aller marcher, boire un verre, parler du beau temps, et pourquoi pas des ailes de leurs esprits, qui voletaient haut dans les nuages ?

Ses lèvres formaient des mots invisibles à une vitesse folle, trébuchant sur quelques syllabes, s'arrêtant pour laisser la parole à l'autre...

Puis elles étreignirent celles du garçon, au détour d'une rue, au détour du carrefour des cœurs.

Au détour du carrefour des cœurs, y avait tout : mots, maux, brisures, cris, rires, bonheur, larmes, musique et amour.

Et deux garçons, main dans la main, sourire aux lèvres, âme contre âme et rire grondant au creux du ventre.

𝐔𝐍𝐄 𝐕𝐎𝐈𝐗 𝐃𝐀𝐍𝐒 𝐋𝐄 𝐍𝐄́𝐀𝐍𝐓 ⸺ poèmes & textesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant