Chapitre 3 : Mazel Tov !

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3 Janvier 2011, 5 ans après.
 
Je n'oublierai jamais ce jour. 
Il avait COMMENCÉ tellement normalement. Il était autour de 11h, j'étais affalé devant Fifa et je chantais des chansons brésiliennes à tue-tête. Mon téléphone a sonné et je me suis tordu le cou pour voir qui m'appelait. En lisant le nom de Carolina, j'ai mis sur pause et j'ai saisi mon portable, que j'ai calé sur mon épaule pour pouvoir CONTINUER à jouer.
 
- Mmh allô? j'ai dit distraitement.
- Ney, c'EST Carolina, elle a commencé d'une voix tremblante.
- Je sais. Ça ne va pas, il y a un problème ? j'ai demandé en fronçant les sourcils.
- Oui, je... Bordel, tu vas tellement péter un câble...
- Qu'est-ce que t'as fait ? T'as pété la voiture ? C'est pas grave allez, ça se répare Caro...
- Non, non, c'est pas ça... elle m'a coupé d'une toute petite voix.
- Eh ben quoi alors ? Accouche bon sang, je l'ai pressé sans me rendre COMPTE DE ce que je disais.
 
Elle a éclaté en sanglots.
 
- Justement Ney, je crois que je suis enceinte...
- QUOI ?
 
Mon téléphone est tombé, je l'ai ramassé et je l'ai remis à mon oreille en vitesse.
 
- Tu crois ou tu es sûre ?
- Je... Je suis sûre, elle a pleuré.
- Oh, putain. C'est pas possible.
 
J'ai cru que j'allais faire un malaise. Mes mains sont devenues toutes molles, je me suis mis à respirer beaucoup trop vite. Et bien que ça puisse être égoïste, c'est à elle qu'est allée ma première pensée.
J'avais longtemps hésité avant de me mettre en couple. Premièrement, parce que j'étais mort de chagrin, ensuite parce qu'aucune fille ne me plaisait. Et puis Carolina est arrivée. Je ne vais pas dire que j'ai eu le coup de foudre, mais elle me plaisait, c'était indéniable. Au départ, c'était simplement une amie, mais au final, je reste un homme, et il s'est passé ce qu'il s'est passé. Ce qui ne veut pas dire que j'oubliais Leila, bien au contraire. Elle était dans mes pensées, tout le temps. Je l'aimais, et elle me manquait, tellement. Même si je tenais à Carolina, personne ne remplacerait jamais Lei.
Et voilà que je me retrouvais père.
Ça n'aurait pas dû se passer comme ça. J'aurais dû CONTINUER ma carrière, avec elle à mes côtés. Et, dans quelques années, alors qu'on aurait été mariés et pleinement heureux, alors là, nous aurions eu un enfant. Ce n'était pas censé arriver avec une autre fille, dont je n'étais pas amoureux, par accident et aussi tôt.
J'avais le sentiment affreux de l'avoir trahie, d'avoir tout raté. Mes promesses, mes projets, mon futur qui était devenu présent bien trop tôt. J'avais l'impression de l'avoir trompée, de l'avoir rendue encore plus malheureuse qu'elle ne l'était déjà. Des larmes silencieuses se sont mises à couler sur mes JOUES.
Une fois encore j'étais impuissant, spectateur de mon PROPRE destin, et encore une fois, j'avais tout foiré.
 
- Je suis désolé, Carolina, je le suis tellement...
- C'est notre faute à tous les deux, Ney, a-t-elle sangloté. On n'a pas fait ATTENTION, on est trop bêtes...
- Tu n'as que 17 ans, j'ai gâché ta vie...
- Arrête Neymar, arrête... On n'a tout les deux merdé, c'est pas ta faute.
- Si, oh si, c'est ma faute, j'ai gémi. Je suis un con, je foire toujours tout... Tout...
 
J'ai passé cette nuit-là à sangloter recroquevillé dans un coin de ma maison bien trop grande pour moi tout seul, tellement étrangère. Mes yeux rougis par l'alcool et les larmes étaient hantés par tous les souvenirs que j'avais pris soin d'enfouir tout au fond de ma mémoire, et qui refaisaient surface brusquement. Ces moments, pourtant si heureux, me poignardaient violemment et ne faisait que rendre plus réelle son absence. Ils défilaient, tous, DEVANTmes paupières effrayées par la vie, et sans que je ne puisse rien y faire, ils m'assaillaient de toutes parts.
Et parmi eux, le plus douloureux d'entre tous.
 
2009, 3 ans après.
 
Il était tard, 9h à peu près, et je rentrais de l'entraînement. Je n'y pensais pas, pas à ce moment-là en tous cas. Je venais de RENCONTRER Pelé, et je ne pensais à rien d'autre qu'à ce qu'il m'avait dit. Un jour, un jour Neymar, tu seras un grand footballeur. Il n'y a pas de doutes là-dessus. Le Santos a de la chance de t'avoir.
Je souriais seul dans le noir en faisait tourner mon ballon sur mon doigt, quand il est tombé. Il a dévalé la rue en pente jusqu'à un endroit de la favela où je n'allais jamais. Bien décidé à récupérer mes affaires, je suis descendu jusqu'à une sorte de parvis en contrebas, entre plusieurs maisons abandonnées. Alors que je me penchais pour le ramasser, j'ai vu une ombre s'étaler sur le sol et je me suis relevé, peu rassuré. Une jeune fille m'a percuté de plein fouet, bam !
 
- Hé ! Fais attention mon gars ! elle a lâché.
 
Son odeur a frappé mes narines et avant même que mon cerveau ne comprenne, quelque chose en moi l'avait reconnu, mon cœur peut-être, ma raison, probablement.
 
- Leila ! ai-je lancé comme un cri du cœur.
 
Elle m'a regardé en fronçant les sourcils et a voulu s'échapper, mais j'ai saisi son avant-bras. J'étais à présent persuadé que c'était elle.
 
- Lâchez-moi ! a-t-elle hurlé.
 
Et puis elle a croisé mon regard, et elle a dû reconnaître mes yeux, parce qu'elle m'a souri, d'un sourire démesurément grand.
 
- Junior, c'est vraiment toi ? elle s'est exclamée. Mais qu'est-ce que tu fais là ? Et c'est quoi cette coiffure !?
- Leila, j'ai soufflé. Mon Dieu, si tu savais comme je suis heureux !
 
Elle était tellement belle. Ses cheveux étaient plus longs, ses boucles tombaient jusqu'à la moitié de son dos ; ses cils également, ourlaient ses yeux d'un marron profond à la perfection ; sa bouche était rouge, et je ne crois pas qu'elle était maquillée, et de toutes petites tâches de rousseur parsemaient son nez. Elle avait un corps de femme à présent, et j'étais fasciné par ce qu'elle était devenue. J'arrivais encore à reconnaître la petite fille avec qui je jouais, mais difficilement tout de même.
 
- Si tu savais ! ai-j CONTINUÉ. À quel point tu m'as manqué, comment je t'ai cherché ! La vie sans toi est... Horrible. Personne ne me comprend autant, je me sens seul, si tu savais... ! Combien de fois j'ai voulu que tu sois avec moi, pour te parler, pour rigoler, ou pour nous battre comme on le faisait ! Mais qu'est-ce que tu fais là ? Si tu peux sortir, pourquoi tu ne t'échappes pas ?
 
Elle a froncé les sourcils et son sourire a disparu, elle qui était toujours tellement joyeuse.
 
- Junior... Lâche-moi, a-t-elle dit en frémissant.
- Pourquoi ? Leila, c'est moi ! Tic et tac, tu te rappelles ?
- Les putains d'enfoirés d'écureuils adorables, a-t-elle souri.
- C'est ça ! ai-je jubilé. Toi et moi contre le reste du monde ! Combien de fois je me suis demandé si t'étais ne serait-ce qu'en vie ! Mais ça va aller MAINTENANT Lei, ai-je dit, je vais t'amener à l'abri !
 
Elle a SERRÉ les dents et a retiré son bras brusquement.
 
- Je suis à l'abri. Et vivante. Tu es rassuré maintenant, alors oublie-moi Junior, s'il te plaît, elle a soufflé, les larmes aux yeux.
- Quoi ? j'ai demandé, choqué.
- Il faut que tu m'oublies, Ju, je t'en supplie. Oublie ce qu'on s'est dit, ce qu'on s'était promis, ce qu'on a vécu.
- Tu veux que j'oublie plus de 8 ans d'amitié ? Même si je voulais, ça serait IMPOSSIBLE. Et je ne veux pas. Je ne veux pas t'oublier ni oublier tout ce qu'on a fait.
 
Des larmes coulent franchement sur ses JOUES à présent, et j'ai envie de la prendre dans mes bras, mais elle me repousse.
 
- Leila... je COMMENCE. Tu sais bien que je t'...
- Tais-toi ! elle me coupe en posant sa main sur ma bouche. Tais- toi, s'il te plaît.
- Je t'aime, je finis.


Moi aussi Junior, et tu m'as tellement manqué. Ça fait tellement longtemps, mais ça ne change rien à mes sentiments pour toi. Voilà ce que je m'attendais à entendre. Mais au lieu de ça, c'EST d'une voix froide qu'elle lâche :
 
- Comme c'est dommage pour toi.
 
Elle profite de ma surprise pour se dégager et partir. Pendant un instant, je reste immobile. Putain, un peu de fierté, je me dis. Tu vas vers elle et elle t'envoie bouler comme une merde. Pourquoi lui COURIR après ? Tu peux avoir toutes les filles que tu veux.
Et puis d'un coup, je me réveille C'est Leila. C'est vraiment elle, en chair et en os. Je veux m'élancer vers elle, mais elle a disparu. ESPÈCE d'abruti, trop fier pour la rattraper ! Seul dans l'obscurité, je crie :
 
- Regarde la télé, Lei, regarde la si tu peux ! Un jour tu me verras, je te promets !
 
Son rire percute mes oreilles comme une insulte.
 
- Grandis un peu, Junior, elle lance au loin. Tu as 17 ans, il est temps d'arrêter de croire aux contes de fée.
 
Et sa voix s'évanouit, me laissant seul dans l'ombre de la favela. Aujourd'hui encore, j'ai du mal à considérer cet épisode comme une discussion entre elle et moi. C'était plutôt comme un rêve, un fantôme du passé venu me rendre une brève visite avant de disparaître à NOUVEAU. Une fois qu'elle s'était fondue dans la nuit, la scène avait cessée d'être réelle à mes yeux.
Sûrement parce que ça fait trop mal de me dire que je l'ai laissé partir une deuxième fois.

Fiction sur NeymarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant