2014, 8 ans après.
Leila.
Assise à ma chaise, je regarde distraitement dehors. Il fait beau mais je ne sors pas aujourd'hui. Je ne sors plus du tout, en réalité, puisque depuis ce fameux jour où j'ai mis ma tête sous l'eau, j'ai demandé à travailler en intérieur uniquement. Il ne doit plus venir ICIdepuis des années, mais je ne voulais pas prendre le risque de le croiser une nouvelle fois, comme lorsque nous avions 17 ans. Ça m'a fait tellement mal de m'éloigner de lui, mais je ne pouvais tout simplement pas le laisser voir celle que j'étais devenue. J'avais simplement envie de lui sauter dans les bras, mais je ne DEVAIS pas le mêler à ça. On m'a volé ma vie, mais je n'ai pas le droit de lui voler la sienne en retour.
Je reporte mon ATTENTION sur ma feuille. Je voulais étudier, je le voulais vraiment, mais comme d'habitude mon esprit a dérivé et c'est un dessin de ses yeux que je retrouve sur le papier au lieu de formules de maths. Je deviendrais folle si j'arrêtais d'essayer d'apprendre. Je stagnerais, et tout ça serait bien, bien pire.
Je soupire et le range avec les (centaines) d'autres. Je me reconcentre sur le bouquin REMPLI de notions qu'on m'a gentiment procuré quand on toque à ma porte.
C'est Laura, une très belle rousse que je considère plus ou moins comme mon amie. Disons que ce n'est pas une pétasse superficielle et qu'on s'entend plutôt bien. De toutes façons, mes choix sont assez limités, alors Laura fait très bien l'affaire.
- Hé, Lei, elle me sourit. Un type te demande, je sais pas trop pourquoi. Je crois qu'il cherche une fille.
Je soupire.
- Igor peut pas lui en donner une au hasard ? Même ça, il peut pas le faire seul ? Je suis occupée.
- On a toutes mieux à faire, mais qu'est-ce que tu veux.
- Et toi, tu fais quoi ?
- Moi j'ai finis ma journée, je vais dans ma chambre si tu veux me voir après, elle propose. J'ai acheté des bonbons, ceux que tu préfères.
- Ouais, je répond.
Je descends au premier étage, où je trouve mon patron.
- Qu'est-ce qui y a, Igor ? je demande brusquement.
- Un type, il lâche distratement. il cherche une fille.
- Et qu'est-ce que j'y peux ? Tu connais toutes les filles ici, aussi bien que moi.
- Ouais mais c'est toi qu'il demande.
- Il a cru que j'en étais une, ou quoi ?
- Peut-être bien.
- On a un marché je te...
- Je sais. Et si c'est ce qu'il te demande, tu refuses et c'est tout.
Je lève les yeux au ciel en soupirant et demande où je dois me rendre. Je serpente dans plusieurs couloirs avant de déboucher à l'arrière de la MAISON, dans une pièce beaucoup trop éclairée à mon goût.
Un homme chauve, en costume gris bien PROPRE m'attends. Je ne suis même pas étonnée. J'ai appris depuis plusieurs années à me méfier des hommes aux belles allures. Ce sont souvent les pires. Je m'apprête à parler quand il s'approche de moi et me devance.
- Vous êtes bien Leila Rayos ? il demande.
Je fronce les sourcils. Le boss n'est pas censé communiquer mon vrai nom. Il ne communique déjà pas celui des filles. Peut-être que c'est un très gros client, haut placé ? Oh, et puis peu importe. J'ai juste envie de finir cette histoire et de retourner à l'étage.
- Ouais, ça se pourrait, je réponds, aussi garce que je peux. Bref. Si vous pouviez me dire ce que vous voulez. Et j'espère que ce n'est pas ça, parce que moi je ne fais pas ce genre de choses.
Il a un mouvement de recul.
- Hum, je ne suis pas là pour ça, il lâche.
- Tant mieux. On m'a dit que vous cherchiez une fille ?
Il hoche la tête.
- Il m'envoie, il souffle mystérieusement.
- C'est qui, il ?
Ce mec se croit dans un film d'action ou quoi ? Parce que je n'ai pas vraiment le temps de JOUER aux devinettes. Ni l'envie, en fait.
- Monsieur Neymar, il répond.
Je fronce les sourcils, comme si ce nom m'était étranger. Il y a bien longtemps que je ne m'attends plus à entendre ce nom dans une conversation, à part DEVANT l'écran, bien évidement. Je le regarde dans les yeux sans comprendre et lâche :
