Chapitre Vingt-deux

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            Novembre
Soobin souffla, admira le nuage de cristaux qu'était devenu son souffle, et sourit.

Il avait beau apprécier l'été, l'hiver restait sa saison préférée. Sans pouvoir citer une seule raison bien précise qui le justifiait ; c'était un tout. C'était le plaisir de sentir ses pieds s'enfoncer dans la neige lorsqu'il y en avait, de tenir une boisson chaude dans ses mains congelées, d'observer un paysage clair souvent jugé trop morne, mais auquel il trouvait un certain charme. Et s'il appréciait déjà l'hiver en Corée du Sud, il serait tenté de l'apprécier un peu plus en France. Bien sûr, lorsqu'il ne faisait que travailler, rien n'était très appréciable. Mais lorsqu'il se baladait dans les rues de Paris, emmitouflé dans ses vêtements bien chauds et un bon café brûlant à la main, il se sentait bien, et rien ne pouvait venir à bout de ce sentiment de bien-être.

Pas même Choi Yeonjun.

Si ce voyage avait eu lieu quelques mois plus tôt, il aurait tout fait pour passer ses week-ends seul, et il lui était facile d'affirmer que cela aurait aussi été le choix de son supérieur. Pourtant, ils se retrouvaient à marcher dans les rues de Paris, côtes à côtes, presque comme s'ils s'étaient toujours connus. Cette semaine, ils étaient redevenus Choi Yeonjun et Choi Soobin, le patron un peu taciturne et l'assistant bon à tout faire qui suivait son supérieur partout où il allait. Ce matin en revanche, s'était créé une sorte d'accord tacite : chacun enlevait son masque et laissait leur véritable personnalité reprendre le dessus. Yeonjun lui avait exposé ses plans de tourisme, Soobin en avait accepté certains et s'était avéré réticent à d'autres. Le brun avait eu l'air légèrement contrarié ce matin lorsqu'il lui avait avoué ne pas être partant pour une deuxième longue virée au Louvre. C'était que de son côté, il estimait en avoir fait le tour, or le plus vieux lui semblait être du genre à passer un peu trop de temps dans ce genre d'endroit. Et Soobin avait beau commencer à l'apprécier, il n'était pas encore prêt à ce genre de sacrifice.

Pourtant, Yeonjun avait accepté de remplacer le musée par une simple balade. À en juger par son expression faciale, cela lui avait coûté de faire un tel choix, et le plus jeune s'était demandé si son supérieur venait tout juste de faire ce genre de sacrifice pour lui.

Il préférait ne pas trop y penser.

Seul le bruit de leurs pas dans le sol sablé du parc brisait le silence qui régnait entre eux. Il n'en n'était pas dérangeant pour autant, avait remarqué Soobin. Ainsi, il pouvait mieux entendre le chant des oiseaux, le craquement des quelques feuilles d'automne qui demeuraient sur le chemin, le rire de quelques jeunes enfants qui chassaient des pigeons...

Il prit une grande inspiration avant de soupirer. Paris avait bien des défauts, tout comme Séoul au fond. Mais il devait se l'admettre : l'idée seule de se trouver ici, dans la capitale de la France, avait le don de le faire sourire.

Ils passèrent à côté d'un vendeur de marrons chauds, et il fut saisit d'une certaine euphorie à la vue de ce met qu'il ne pensait pas retrouver en France. C'était idiot, mais l'idée de vérifier ce genre d'information ne lui était jamais passé par la tête. Si cela semblait évident pour certains que les Français grillaient eux aussi des marrons en hiver, il était tout de même heureux de le découvrir par lui-même.

— Vous en voulez ? fit-il en tendant son cornet de papier en direction du plus petit.

— Sans façon, fit Yeonjun avait un regard légèrement répugné pour le plat qu'il lui proposait. Mais... merci quand même, ajouta-t-il.

╺╸MENACEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant