Chapitre 2 : L'enfance

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Six années plus tard...

- Je vais avoir six ans aujourd'hui ! Maman ne cesse de me répéter qu'à mon âge, les petites filles sont censées commencer la danse et la musique, mais moi, je n'en ai pas envie ! Quand je vois Leroy et Nathanaël, les fils de Messire Hubert, monter à cheval et apprendre l'escrime, comment je pourrais vouloir m'ennuyer à mourir derrière un instrument ? Maman dit qu'on a beaucoup de chance d'être ici, en vie et que l'on doit beaucoup à Messire Hubert. Elle m'a raconté que mon papa était fou amoureux d'elle mais qu'il a dû partir à cause de son travail. Je ne comprends pas pourquoi on n'est pas partis avec lui... Et quand je pose la question à maman, elle prend son regard triste et nostalgique qui me fait mal au cœur. Alors à la place, je fais le clown et ça la fait beaucoup rire ! Bon après elle me dispute gentiment en m'expliquant que ce n'est pas comme ça que doit se comporter une petite fille mais au moins, je peux revoir son sourire trôner fièrement sur son visage. Je ne veux pas lui dire mais, quand je serai plus grande, je partirais à la recherche de Papa, et je le forcerai à revenir avec nous. C'est uniquement pour ce projet que j'exerce quand même la musique et la danse car maman dit que plus tard, je vais impressionner tout le monde grâce à cela. Et moi, ce que je veux, c'est que quand j'aurais retrouvé mon papa, je lui montre à quel point je suis talentueuse et qu'il soit fier de moi. Comme ça, je ne serai plus la raison qui l'éloigne de maman...

Je fais une courte pause dans mon récit à Trouy, mon ours en peluche, pour sécher une larme qui coule le long de ma joue. Maman m'a déjà dit plusieurs fois que je n'étais pas la raison de leur séparation mais, il était déjà parti quand je suis arrivée. Reposant Trouy sur mon lit, j'entends la porte de ma chambre claquée et ma gouvernante entre, toute pimpante. C'est le genre de dame vêtue toujours de vêtements strictes et ternes, faisant plus âgée que son âge parce qu'elle a des traits sur le visage. Je ne l'aime pas du tout, elle crie tout le temps et ne me laisse jamais faire ce que je veux. Mais Messire Hubert a dit à maman que je devais me montrer exemplaire avec elle, car je suis la seule enfant de servante à avoir le droit à une gouvernante. Je préférais ne pas en avoir si ça ne tenait qu'à moi !

- Mademoiselle Lyra, vous êtes prête pour votre leçon de piano ? MADE-moiselle Lyra pourquoi pleurez-vous ? Ce n'est point un comportement de jeune femme respectable ! Vous vivez sous le toit de Messire Hubert de la Deuxième Terre, vous ne pouvez point vous permettre d'être triste de la sorte !

Son air « grande dame » comme dit maman m'énerve énormément, et je ne peux m'empêcher de prendre ma tête des « mauvais jours » en la regardant, sourcils froncés.

- Et pourquoi ne pourrais-je pas ? Les garçons peuvent pleurer eux, quand ils tombent de cheval ou se prennent un mauvais coup ! C'est injuste !

- MADEMOISELLE LYRA ! SOUHAITEZ VOUS QUE J'APPELLE VOTRE PAUVRE MAMAN QUI A DEJA TANT A FAIRE ? Dit-elle, son visage devenant rouge écarlate, signe qu'elle est très en colère.

Elle sait pertinemment qu'évoquer ma maman est mon point faible, je baisse alors le regard et fait non de la tête, mes cheveux d'un brun sombre et déjà long pour mon âge tombant devant mes yeux.

- Non Mademoiselle Adelaïde... Je suis désolée...

- Je préfère ça ! Suivez-moi.

Tête baissée, mains croisées devant moi telle une servante, je suis la méchante femme jusqu'à la salle de réception où se trouve le grand piano. C'est une salle immense dans laquelle j'adorai courir à toute vitesse en jouant à chat avec les autres enfants du château, grimpant sur la grande table de réception ou nous cachant derrière les grandes statues de chevalier, si on en avait le droit. A côté des grandes baies vitrées et du piano, j'aperçois Leroy et Nathanaël, accompagnés de leur père qui leur fait la leçon, les grondant comme jamais maman ne l'a fait sur moi. Je n'écoute néanmoins pas ce qu'il dit, croisant le regard de Nathanaël. Nathanaël a un regard au couleur azur que maman adore. Il n'est pas beaucoup plus grand que moi et ses cheveux sont de la même couleur que les miens. On se lance tous les deux un regard désolé pour l'autre, alors que je lui fais le signe 2 de la main. C'est notre code secret ! Le 1, ça veut dire qu'on n'est pas disponible aujourd'hui. Le 3 veut dire qu'on a faim. Le 4 qu'on a sommeil et le 5 qu'on a envie de jouer. Le 2, lui, signifie qu'on a besoin de se confier. C'est un code qu'on a inventé dès qu'on a su parler. Ici, personne n'écoute ce que les enfants ont à dire. Maman essaye de temps en temps mais elle est tellement prise par son travail de servante qu'elle a à peine le temps de se reposer. Et je sais qu'elle n'aura pas le temps de me fêter mon anniversaire aujourd'hui, ce qui me rend très triste même si je ne lui dis pas.

Tersia, Terre des DûhOù les histoires vivent. Découvrez maintenant