Certains souvenirs flous hantent encore Soarën lorsqu'il entrouvre un œil. Comme l'avait promis Yule, il ne ressent aucun effet secondaire suite à son moment de déchéance de la veille et se redresse dans le lit sans mal de crâne, envie de vomir, ni autre de ces agaçants symptômes de gueule de bois. Il se sent même dans une forme éblouissante. Ce Miracle du Lutin préparé par le petit être fait des merveilles ! Mais bien qu'il ne regrette rien des instants qu'il a passé avec la joyeuse bande du Repaire Secret, il préfère tout de même mettre les voiles. Funest et Discorde ne lui pardonneraient jamais s'il s'éternisait dans ce genre d'endroit, loin d'eux. D'ailleurs, il n'a que trop traîné : il meurt d'envie d'aller retrouver ses Compagnons.
Le Traqueur pose son regard sur l'Elfe Sombre encore endormie à ses côtés, aussi nue que lui. Les trop vagues réminiscences de leur nuit endiablée le font sourire. Il était si ivre et drogué qu'il n'en gardera que peu de souvenirs, et il le regrette presque : jamais il n'avait couché avec une autre Elfe jusqu'à présent. Ça devait sûrement être fantastique.
Il récupère une partie de ses affaires, remarque que la moitié de ses vêtements ne se trouve pas dans la chambre et secoue la tête avec un petit rire.
— Oh. Je n'avais pas l'impression d'être ailleurs à ce point.
Résigné, c'est donc torse nu qu'il finit par regagner le rez-de-chaussée. La salle est nettement plus calme que la veille. Le Dracoïdien est toujours calfeutré dans son coin, éternellement immobile, et ne semble prêter attention à personne. Les chaises et les tables ont été déplacées, un ou deux verres se sont brisés et des bouteilles vides traînent un peu partout. Les autres Elfes Sombres ne sont plus là, comme la majorité des clients. Seuls deux Gnomes ronflent par terre dans un coin. Soarën croit se souvenir qu'il jouait aux cartes avec eux hier, mais il n'en est pas sûr. Alors qu'il commence à fouiller l'endroit, un tissu lui est jeté sur la tête.
— Eh bien, tu te remets sacrément vite ! Je ne pensais pas te voir levé avant encore une ou deux heures. Ce doit être ça que tu cherches, non ? J'ai mis tes affaires de côté, personne n'y a touché, ne t'en fais pas. Et voilà aussi un petit revigorant ! Ne t'en fais pas, tu peux en prendre sans crainte. Il est encore un peu tôt pour goûter de nouveau à mon Miracle du Lutin, haha ! À moins que tu ne comptes remettre ça de bon matin avec la demoiselle là-haut ?
Soarën enfile son haut en remerciant Yule d'un marmonnement, sidéré de le voir aussi bavard et dynamique alors qu'ils étaient tous les deux dans le même état, la veille. Le petit Lutin déambule tranquillement, debout sur son comptoir et frais comme un gardon. Après avoir poussé en direction de l'Elfe les dernières affaires qu'il lui manquait, ainsi qu'un verre de jus coloré, il saute à terre, disparaît un instant derrière le bar pour en revenir avec une pelle et une balayette, puis s'emploie à débarrasser les tables et faire le ménage en sifflotant gaiement.
— Sacrée soirée, pas vrai l'ami ? commente-t-il. Au fait, entre deux positions acrobatiques cette nuit, tu as réfléchi à ma proposition ?
— Je ne vais pas rester parmi vous, je suis navré. Non que la compagnie soit déplaisante, bien au contraire, sourit-il. Mais mes... mon Compagnon m'attend, se reprend-il juste à temps.
— Ah oui, c'est vrai ! Pardonne-moi, les Elfes Sombres n'en possèdent pas non plus et j'avais oublié ce détail, s'excuse Yule sans relever sa gaffe. C'est dommage, tu es un joyeux drille, sous tes airs de justicier sauveur ! Mais ton Compagnon pourrait peut-être se plaire ici. Quel animal est-ce, sans indiscrétion ?
— Un loup. Trop gros pour ressembler à un chien, soupire Soarën avant que le Lutin n'ait le temps de rouvrir la bouche pour revenir à la charge. Sinon, tu penses bien qu'il ne me quitterait jamais.
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Soarën [MYSTIS]
FantasyLa forêt de Telendriss est la demeure ancestrale de la communauté d'Elfes dont fait partie Soarën. Audacieux et impertinent, ce Traqueur a des rêves plein la tête. Il espère avoir l'honneur de succéder à son Maître de caste, et comme ses camarades...