Je reste un moment à fixer mon ami. J'hésite. Pour l'aide inespérée qu'il m'apporte, je lui ferais volontiers un gros câlin. Mais son idée de me faire travailler avec son père me tétanise. Certes, je ne suis plus ce gamin de seize ans, tremblant de le sentir derrière moi, mais Vincent Dase reste à mes yeux l'incarnation de la virilité, et un véritable fantasme. Sans compter que je ne doute pas un seul instant qu'il soit toujours aussi beau et élancé. D'un autre côté, j'ai face à moi la preuve vivante que cet homme est hétérosexuel, donc, en un sens, à part souffrir le martyr, je ne risque pas grand-chose. Mais je doute quand même que ce soit une bonne idée, en particulier pour ma santé mentale.
_ ... à huit heures trente !
_ Pardon ? » sors-je de mes pensées.
_ Qu'est-ce que t'as pas compris ? Faut que je te note l'adresse ?
_ En fait... J'ai rien écouté. Je suis désolé, Thomas.
_ Hey, fait pas ça à mon père, hein ! Il a horreur de répéter ! Donc, je disais que t'as rendez-vous avec lui lundi matin à huit heures trente, parce qu'il veut quand même te voir avant que tu commences !
_ Mais Thomas, mes dates de stage, ce sont pas les même que les tiennes ! » trouve-je l'argument imparable.
_ Ouais, ben ça tu verras avec lui ! Comme dit, je crois que les dates de son assistant sont modifiables, en plus ! Donc ça devrait rouler !
_ Sauf si lui non plus n'aime pas mes piercings. » ricane-je en me détournant, simulant de me resservir un verre d'eau.
_ Cléo ! Mon père, ce qui l'intéresse, c'est d'avoir quelqu'un de compétant, et toi t'as des supers notes ! Et puis, il t'aime bien !
Je fais un sourire contrit et hoche la tête. Je ne suis pas sûr que sa dernière phrase soit faite pour m'aider.
Conformément aux indications de mon ami, je me rends au rendez-vous fixé par son père. J'ai fait un nombre important d'entretien pour mes stages ou même mes jobs d'été, et pourtant, jamais je n'ai eu autant la boule au ventre.
L'immeuble où est basée son entreprise n'a rien des immenses buildings qu'on voit dans les films, et sa localisation en pleine zone d'activité, et non au centre ville, lui retire le peu de sexy qu'un bâtiment peut avoir. J'en fais le tour, et localise l'entrée indépendante des bureaux de Monsieur Dase. Je prends plusieurs respirations, vérifie que je suis juste assez en avance pour être ponctuel sans déranger, et je passe la porte. Un homme d'une quarantaine d'années lève les yeux de son ordinateur, et je fais un pas vers lui en me présentant.
_ Ah, oui ! L'ami de Thomas. Juste un instant, s'il vous plait.
Il décroche son téléphone, et, par politesse, je détourne le regard, m'intéressant à la décoration, mais ne perdant pas une miette de ce qu'il lui dit, de la façon dont il s'adresse à lui. J'ai appris, durant mes stages, que la façon dont un employé s'adresse à son employeur est assez révélateur du comportement de ce dernier, et je souhaite en apprendre le plus possible sur le type de patron qu'est Monsieur Dase avant de le rencontrer.
_ Oui, Vincent ? ... Votre rendez-vous de huit heures trente est là. ... Très bien. » raccroche-t-il. « Jeune homme ? Il va vous recevoir. Vous voulez un café ?
_ Non. Merci. Je viens d'en prendre un.
Ou plutôt : j'ai mis une chemise blanche et je mourrais de honte si je venais à renverser le café dessus, ce qui ne manquera pas d'arriver tant je tremble de le revoir. L'homme m'indique un siège et je prends place, avant de fermer les yeux, inspirer à fond et décompter de dix à zéro autant de fois que possible le temps d'expirer. Je rouvre les yeux juste à temps pour voir le père de mon ami passer sa porte, et si je suis toujours sous son charme, lequel est accentué par ses cheveux à présent totalement gris-blanc, au moins ne tremble-je plus.
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Le Père de mon Meilleur Ami [Terminée]
RomanceA vingt ans, Cléo n'a pas exactement les mêmes centres d'intérêts que les autres garçons. Déjà, les filles, très peu pour lui, et si ses amis ont son âge, hors de question pour lui qu'il en soit de même pour ses relations amoureuses. D'ailleurs, il...