Chapitre 24 : Café

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Les semaines se succèdent, et les seules nouvelles que Vincent et moi avons de Thomas, nous les obtenons par Léa. S'il a arrêté de vociférer contre nous, à ses yeux, je suis toujours celui qui l'a trahi, et son père n'a pas le droit à beaucoup mieux.

Alors, au bout d'un mois à attendre qu'il accepte de nous parler, un mois pendant lequel je me sens coupable dès que je suis entre les bras du quinquagénaire, je craque.

_ Tant pis. » m'installe-je à genoux sur le canapé, contre lui après un nouveau message peu engageant de Léa.

_ Comment ça, tant pis ? De ce que je connais de toi, ce n'est pas ton genre d'abandonner.

_ Je n'abandonne pas, Vincent. » cale-je ma tête sur son épaule. « Et la situation continue de me peser. Mais je refuse qu'elle gangrène notre relation. Je refuse de continuer à me sentir coupable d'une faute que je n'ai pas commise. Oui, je ne lui ai pas dit que celui que je fréquente, c'est toi. Mais c'est lui qui en fait toute une histoire. Tu serais n'importe quel autre homme, il s'en moquerait ! Alors oui. Tant pis s'il refuse d'accepter que, toi et moi, on veut construire un truc. Je ne vais pas aller pleurer chez lui, parce qu'il n'a pas digéré les infidélités de sa mère à ton égard et qu'il reporte tout ça sur nous !

_ Il n'a rien à digérer. Mes problèmes avec sa mère ne le concernent pas.

_ Je suis désolé de t'apprendre qu'il les a pris personnellement. » redresse-je le visage vers lui, tout en parlant avec les mains. « Il lui en veut de t'avoir fait souffrir, que vos problèmes l'aient fait souffrir. Et comme c'est une chose qu'il n'a jamais extériorisé, en particulier face à elle, il reporte tout ça sur nous. Ça me fait mal, mais tant pis pour lui. Je ne vais pas arrêter de vivre pour ménager sa susceptibilité.

Il reste silencieux, et je le regarde, réalisant ce que je viens de dire.

_ Mais je comprendrais que, pour toi, la réaction de ton fils soit un frein.

_ Je ne vais pas te dire que sa réaction me fait plaisir. » fixe-t-il un point au-dessus de la télé. « La seule chose qui me satisfait, c'est qu'il n'a pas eu de réaction homophobe. Si ça avait été le cas, j'aurai totalement échoué en tant que père. Mais ce qu'il rejette, ce n'est pas tant toi ou moi que notre relation. Et ça, je le déplore. Comme tu l'as dit, nous serions chacun avec quelqu'un d'autre, il est à parier que ça ne lui poserait aucun problème.

_ Je ne sais pas ce qui me désole le plus. » joue-je avec les boutons de sa chemise. « D'avoir perdu mon ami, ou que notre relation t'éloigne de ton fils.

_ Notre relation ne m'éloigne pas de lui, Cléo. Il fait ça tout seul.

_ Il n'empêche. » me redresse-je un peu, le regard sur mes doigts. « Noël, c'est dans un mois et demi. Et mon petit doigt me dit que le repas du réveillon risque d'être tendu entre vous.

_ Que fais-tu à Noël ?

_ Comme tous les ans, je pensais aller voir mes parents. » hausse-je les épaules.

_ Me prendrais-tu dans tes bagages ?

Il me sourit, mais je reste sans voix, les yeux rivés aux siens, la bouche entrouverte.

_ Tu ne leur as rien dit.

_ Si... Enfin non... Enfin... Ils savent que je suis gay... Ils ont même été les premiers à qui je l'ai dit. Et je leur ai dit que j'avais quelqu'un...

_ Mais pas que ce quelqu'un avait leur âge.

_ C'est ça... » soupire-je. « Un peu comme pour Thomas, j'ai peur de leur réaction. Quand je leur ai dit pour mon homosexualité, je savais qu'ils le prendraient bien, parce qu'on avait déjà évoqué le sujet... Mais, même quand je sortais avec des hommes qui n'avaient que quelques années de plus que moi, je ne les leur ai jamais présentés. Sur ce point-là, je ne sais pas comment ils vont réagir. Et je t'avoue qu'avec ce qu'on vit actuellement avec Thomas, je ne suis pas pressé.

Le Père de mon Meilleur Ami [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant