Chapitre 2

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Il suffit d'un sourire pour que l'âme entre dans le palais des rêves

-Victor Hugo

Un an plus tôt...

Paris, France

La tête baissée vers de petits caractères noirs je suivais les lignes parfois inégale que formait les presses d'imprimerie de mauvaises qualités. Lorsque je tournais les pages, le papier translucide palissait sous la lumière qui entrait à flot par les grandes fenêtres du hall d'entrée. Parfois un son provenant de la tranquille rue Madame me tirait quelques secondes de ma lecture et j'observais les passants chapeautés ou les voitures qui apparaissait puis disparaissait derrières les fenêtres. Cela m'arrivait beaucoup moins maintenant. J'avais appris à lire et étudier sans être distraite par le bruit. Je préférais néanmoins le calme de ma chambre ou d'une bibliothèque.

Le hall d'entrée de l'hôtel où je passais la majorité de mes journées n'égalait pas les salles de lecture de la bibliothèque nationale mais avec son petit lustre suspendu sur les plafonds en bois à caisson, son plancher au forme géométrique et ses arômes de pot pourris à la cerise il y régnait un ambiance feutré propice au calme. Lorsque la journée était tranquille j'avais le temps de lire ou d'étudier.

La petite clochette de la porte d'entrée tinta. Je posai mon livre à côté de moi sur le comptoir et leva les yeux vers le client qui venait d'entrer.

-Guten Tag, Herr Dan.

Monsieur Dan était un homme grand et mince à la silhouette aussi droite qu'un porte manteau. C'était un client régulier qui traversait le Rhin tous les étés pour venir profiter des plaisirs de Paris. Et de sa maitresse. Ça se voyait aux traces de rouge à lèvre qu'il ne réussissait jamais à faire disparaitre sur son col. J'en avais même fait le personnage de l'un de mes textes que je gardais précieusement dans mon carnet de cuir.

Il sourit en passant devant le comptoir puis se glissa dans le couloir menant aux chambres. Le claquement de ses semelles fut atténué lorsqu'il posa les pieds contre le tapis de l'escaliers en colimaçon.

Je repris le livre qui m'attendais et glissa mes doigts contre le revers des pages. Grâce à l'immense bibliothèque de mon père je ne manquais jamais de lecture mais celui-là était le premier ouvrage qui n'avait appartenu qu'à moi. Un recueil de poésie de Victor Hugo offert par ma mère. J'y avais même ajouté mes propres notes dans les marges. La calligraphie tantôt élargie et tremblante tantôt droite et gracieuse m'indiquait à quel période de ma vie chaque mot avait été ajouté et me rappelait le nombre incalculable de fois que j'en avais fait la lecture.

-Encore la tête dans un livre?

La silhouette de Claudine venait d'apparaitre dans la fenêtre ouverte à ma gauche. Comme toujours elle était magnifique avec ses boucles blondes impeccablement coiffées et ses formes mises en valeur dans sa robe longue et moulante. Je su qu'une fois de plus je passerais la soirée à siroter mon verre de punch pendant que mon amie danserait au bras des beaux garçons. Marcher au côté de Claudine c'était bien souvent être invisible.

Je déposai à nouveau mon livre et lui sourit. Elle ria et courra jusqu'à la porte. La clochette tinta puis elle avança vers le comptoir.

-Alors tu es prête Laure?

Sa voix était pleine d'entrain.

-Oui, maman doit venir me remplacer dans quelques minutes.

Elle pencha la tête sur le côté et passa sa main dans ses cheveux.

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