Quelques années plus tôt....Il la regarde, sceptique. Allongée sur son lit sur le ventre, les jambes frappant l'air vigoureusement, la tête posée sur ses bras croisés, Iris peste :
- Je m'ennuie Achille.
Le garçon sourit de là où il est est - la chaise du bureau de la jeune-femme - tout en secouant la tête, exaspéré. Il triture les quelques stylos de la jeune-femme, éparpillés.
L'été touche à sa fin. Le soleil décline de plus en plus tôt et l'air se rafraichit. Les fleurs commencent doucement à changer de couleur. L'été touche à sa fin et l'animation estivale de Whistable se clôt aussi.- Je sais bien Isi.
Elle sourit face à ce doux surnom, imbibé de nostalgie. Achille, incapable de prononcer correctement le prénom de celle-ci lorsqu'ils étaient tous deux enfants, l'interpellait comme cela. Depuis, c'est resté. Comme eux. Comme leur amitié.
Il se lève puis va s'assoir sur le rebord de son lit. Doucement, il attrape ses jambes battant, sans interruption, l'air et les pose sur le matelas. Elle ne s'arrête jamais - il ne peut s'empêcher de penser. Une vraie boule de feu.- Et si tu faisais une liste comme tu aimes ? Il arque un sourcil, content de son idée.
Elle secoue négativement la tête.
- Tututute... - elle agite son doigt - j'adorais, nuance. On rentre au lycée. Finies les listes.
Ahuri, il la regarde les yeux grands ouverts. Il cligne plusieurs fois des yeux et ses longs cils frôlent sa peau. Il lâche ses jambes subitement et se recoiffe dans la foulée.
- Tu plaisantes là ? demande-t-il en se levant.
Dans un premier temps, Iris sursaute face à sa réaction démesurée pour une simple remarque aussi futile. Puis, Iris mord sa lèvre. Elle ne dit rien mais son comportement parle pour elle. Elle ne plaisante pas. Pour elle, le lycée se résume à tout laisser derrière : ses habitudes, ses goûts, ses amis... Achille ? Et eux deux dans tout ça ? Le mettra-t-elle de côté ? Difficilement, elle se met sur ses coudes. Elle s'apprête à se justifier mais Achille la coupe vivement :
- Et moi ? Tu comptes aussi me mettre derrière ?
Il recule les traits crispés de frustration et d'incompréhension.
- Bien sûr que non Achille. Elle fronce les sourcils, complètement sciée par cette question incongrue. Je te rappelle que tu dois m'emmener au bal de promo, avec une iris évidemment ! tente-elle d'apaiser la situation.
Mais, elle voit bien qu'Achille est fermé.
- Comment peux-tu penser ça ? demande-t-elle, plus sérieusement.
Il se tait en fuyant le regard accusateur de la jeune-femme. Il arpente la chambre. Les cardes, les posters, les dessins. Il la connaît par coeur. Il pourrait sans aucun doute la dépeindre intégralement les yeux fermés. Achille y voit ses souvenirs avec la jeune-femme - leurs bêtises, leurs fous-rires, leurs disputes -. Il y voit ses plus belles années. Il y voit sa plus belle amitié. Son regard s'arrête sur une photo d'eux deux. Bras dessus-dessous, ils sourient à pleine dent. Il se souvient de cette belle journée de printemps. Ils avaient fait un barbecue, en famille. Caroline a dû militer pendant des heures pour avoir l'attention des deux enfants le temps d'une photo. Ils passaient leur après-midi à jouer, dans leur petite bulle. Il se souvient que seul la perceptive d'une bonne limonade avait réussi à appâter les deux enfants, le temps seulement d'une photo. Achille sourit doucement face à ce cadre, ce cadre qu'il a aussi dans sa chambre. Connectés jusqu'au bout - se dit-il. Il se retourne face à Iris qui, elle, est toujours aussi bouleversée. Ses yeux vitreux fixent le mur en face d'elle. Elle semble désarçonnée.
- Non, Isi. Je sais bien que non.
Sa voix est plus suave. Il a toujours été le plus réfléchi des deux. Alors qu'Iris explose tel un volcan en feu pendant, lui se calme en un rien de temps. A chaque fois, il médite, seul, et réalise à quel point ce type d'histoire peut être insipide, sans grande importance. Alors, il revient vers Iris et tente, en vain, de la raisonner. Elle est feu. Il est glace. Elle est tempête. Il est arc-en-ciel. Elle est pluie battante. Il est rayons de soleil.
Il s'assoit auprès d'elle après quelques instants de silence. Elle lui tourne le dos, boudeuse. Il n'en démord pas, faufile sa main et la pose sur son épaule. Doucement, il remonte jusqu'à ses cheveux. Il caresse paisiblement ses boucles blondes et trace les volutes de son dos. Il adore ses cheveux longs, sauvages : ils dévalent en cascade sur ses épaules tels une rivière dorée. Ils semblent crinière qui irradie dans le noir.
Iris, elle, se trémousse, tentant de se libérer des griffes de son meilleur ami. Trop tard, il la tient déjà fermement. Il l'oblige à se retourner et à la regarder dans les yeux. Leurs iris se perdent les unes dans les autres et le temps s'arrête pour les regarder. Iris sent le souffle chaud d'Achille dans sa nuque et sa paume attrapant ses deux poignées. Sa poigne est ferme, son geste est doux. Elle entend son coeur battre et pomper dans sa poitrine. La mélodie est entrainante et s'intercale avec celle de son souffle. Elle détaille ce visage qu'elle aime tant : ces cheveux désordonnés, ces sourcils broussailleux - ceux qu'elle a essayé plus d'une fois d'épiler-, ces yeux en amande et cette bouche charnue, celle qu'elle a, plus d'une fois, effleurée.
- Promets-le moi. Il murmure si faiblement qu'Iris pense avoir rêvé. Elle relève la tête, prise sur le fait et plongent ses yeux dans les siens. Et ces yeux insistants lui suggèrent que ce n'était point une illusion : elle a bel et bien entendu cette supplique. Alors, elle hoche la tête. Elle opine. Dans cette petite chambre encore enfantine, elle lui fait la promesse qu'elle l'aura, à jamais, gravé en elle, au fond de ses entrailles. Elle lui certifie que jamais, ô grand jamais, elle ne l'oubliera. Doucement, elle rapproche son visage et pose délicatement son front sur le sien. Ils restent là, quelques instants. Achille se demande si oui on non elle honorera sa promesse tandis qu'Iris se questionne si oui ou non elle le fera. Achille se demande ce qu'il adviendra de leur amitié tandis qu'Iris s'interroge sur l'avenir de son coeur coeur. Mais à cet instant précis, leur peau collée semble sceller ce pacte et leurs questionnement se dissipent, bercés par la mélodie polysémique de leur souffle.
Pourtant, vivement, Iris sent se tordre son coeur, face à l'idée qu'il puisse disparaitre de sa vie. Mais son organe est d'autant plus douloureux lorsqu'elle s'imagine continuer sans. Elle grimace de douleur et la bile menace. Subitement, comme si son contact la brûlait, elle s'éloigne.
Achille la regarde, sceptique. Il rapproche ses doigts des siens et les lient. A son toucher, l'horreur disparait des yeux de la jeune-femme au gré d'une profonde et bienveillante tendresse. Et cette douceur est si explicite qu'Achille ne peut s'empêcher d'écarquiller les yeux. Elle vient de le cingler. Non, elle vient de le brûler. Et cette affection qui émane est si franche et brute qu'Achille en souffre. Parce qu'il sait, sent, que la passion n'est rien d'autre qu'une arme qui détruit tout sur son passage. Parce qu'il sait, sent, qu'Iris lui donnerait sa vie si elle le pouvait. Parce qu'il sait, sent, qu'il est son ancrage qui l'aide à ne pas se noyer.
Parce qu'il ne se trompe pas.
Encore un chapitre sans musique ! Je vais chercher pour peut-être trouver mais j'avais trop envie de le poster !
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Le vent sur ma peau
Teen FictionAchille et Iris se connaissent depuis petits. Les deux adolescents savent tout l'un de l'autre. Ils ne se cachent rien, se disent tout. Leurs peines, leurs joies, leurs amours. Leur amitié semble invincible, immuable face aux dommages de la vie. Pou...