18 - Un phare dans la tempête

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Iris n'a pas le coeur à la fête aujourd'hui. Sa visite avec Achille l'a bouleversée, à vrai dire. Elle essaye, en astiquant, à s'en abîmer les mains, le comptoir de Jo, d'effacer ses tourments. Le bois sous ses doigts est immaculé mais la jeune-femme n'en démord pas.

Il faut que ça brille. Il faut que tout soit parfait.

Elle se convainc, s'accroche, corps et âme, à l'idée qu'en nettoyant ce bout de bois, elle ira mieux. Elle repartira à zéro. Comme si rien n'avait existé. Comme s'il n'avait pas existé. Comme si sa peine n'était que mirage. Comme si elle avait disparu. Subitement.

- Ça va ? demande Jordie, en arrivant derrière elle.

- Oui, oui, parfaitement, ment-elle, les yeux rivés sur le plan de travail.

Joe, toujours dans son dos, l'observe un instant. Il fronce ses sourcils tout en plissant son tablier.

- Tu sais que tu peux tout me dire, hein ? demande-t-il sans grande conviction.

Il sait bien qu'elle ne lui dira jamais rien.

Iris interrompt son mouvement. Elle ouvre la bouche et s'apprête à dire quelque chose mais se ravise au dernier moment.

- Tu peux prendre ta journée, Iris. Il n'y a pas grand monde aujourd'hui.

Iris refuse en remuant la tête mais Joe pose sa main sur son épaule et la presse doucement.

- Lâche prise, murmure-t-il.

Iris, finalement abdique. Elle en a bien besoin de cette journée. Elle a plein de choses à faire. La jeune-femme pose son torchon et dénoue son tablier qu'elle va accrocher au porte-manteau. Elle n'ose pas se tourner, par peur de craquer, si elle croise le regard du patron.

- Merci, chuchote-t-elle, en franchissant le pas de la porte.

Elle sait qu'il l'a entendu mais il ne répond pas. Le café est désert à cette heure de l'après-midi, en pleine semaine qui plus est. Chaque parole résonne, tout comme le vent qui frappe sur les parois de l'établissement. Chaque murmure se fait entendre. Même les noms dits se perçoivent entre les parois du café. Jo la regarde partir, sans un mot, mais il n'en pense pas moins. Il voit bien qu'elle souffre mais il ne sait pas quoi faire. Tout comme la jeune-femme, il est perdu, décontenancé face à la situation.

Dehors, l'air frai happe Iris. Ses joues rougissent au contact du vent glacial. Elle serre le pan de son manteau autour d'elle et enfile ses mains dans ses poches. La jetée est superbe aujourd'hui. Quelques rayons du Soleil miroitent sur l'eau translucide. La houle est paisible et apaise quiconque posant les yeux sur la mer. Mais pas Iris. Elle est beaucoup trop agitée aujourd'hui. Une vraie tempête la dévaste au fond d'elle. Elle a besoin de savoir. Elle doit savoir. Il n'y a pas d'autre possibilité. Alors, rapidement, elle se dirige vers le premier endroit qui peut la mener à la vérité. Sans regarder en arrière, sans jeter un oeil au café, elle s'engouffre dans les rues de Whistable.

Quelques minutes plus tard, elle est enfin arrivée. La maison qui lui fait front est remplie d'aménité. Un peu banale, certes, avec son portail blanc, ses fleurs et même son nain de jardin, mais bourrée de charme. Ce sont peut-être les fougères qui sillonnent une des parois ou bien le grand chêne à sa droite qui rendent cette maison si jolie. Elle a dû mal à deviner. Mais, une chose est sûre, cette maison est étrangement très rassurante. 

- Je peux vous aider ? l'interpelle un homme, d'une trentaine d'années.

Elle ne l'avait pas remarqué, en train de l'observer, sur le perron. Elle ne sait pas qui c'est. Une chose est sûre, ce n'est pas l'homme qu'elle recherche.

Le vent sur ma peauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant