Chapitre 8

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Charline Castile ● Vendredi 28 février 2020 ● Toulouse


Ce matin, le réveil me pique particulièrement. Est-ce le fait du manque de vacances ou tout simplement le fait d'avoir veillé si tard hier soir ? Sans doute les deux. Mes dernières vacances remontent à fin octobre et après le rush que nous avons dû affronter, Laure et moi, mon corps me le rappelle très souvent. Nous avons eu un record de fréquentation aussi bien en studio qu'en boutique et malgré le fait que nous soyons allées chercher du renfort pour les fêtes, nous n'avons pas trouvé de candidat adéquat pour venir nous épauler lors de cette grosse période. Nous avons donc dû nous serrer les coudes et travailler sans relâche pour tenir les délais. Laure venait 2 heures plus tôt le matin pour pouvoir faire les retouches photos sans être dérangée par les clients. Nous ne prenions que très rarement un repas le midi et le soir, je restais toujours après la fermeture pour pouvoir également m'avancer. Je travaillais de chez moi le dimanche sur les retouches photos et très souvent le lundi, nous nous organisions pour pouvoir traiter les commandes de nos clients. À cette période, Théophile venait tous les soirs après l'école directement me rejoindre sur mon lieu de travail, accord que j'avais fait avec ma patronne pour pouvoir tout de même être présente pour lui. Et on l'a fait, de septembre à décembre, non sans mal d'ailleurs. Nous nous sommes accordées chacune une semaine de congés pour nous permettre de tenir la cadence. Heureusement, dans 15 petits jours, je serai enfin en vacances. Depuis quelque temps, le décompte des jours avant ce repos bien mérité est devenu la carotte qui me fait sortir de mon lit si douillet. Puis je me suis rappelée que le midi, je devais rejoindre Max-Emilian pour un café, ce qui m'a motivée davantage à sortir du lit. Lors de ma dernière séance avec Noa, il m'a conseillé de m'ouvrir aux autres, que c'était le moment pour moi de sortir de ma zone de confort et de rencontrer des gens. Il m'a réprimandée sur le fait que depuis plus de 6 ans, il n'y ait personne dans ma vie et que je n'ai fait que très peu de rencontres. Ce qui n'est pas tout à fait faux. Alors quand l'ami de Noa est venu hier et m'a proposé de prendre un café, j'ai de suite saisi l'occasion. Entre nos échanges de messages et l'appel téléphonique que nous avons eu hier et le fait d'accepter un rendez-vous, c'est nouveau, je n'en ai absolument plus l'habitude. Je suis rouillée, je ne sais plus trop comment me comporter avec les autres. J'ai parfois peur d'être trop froide ou d'en faire trop. J'ai encore énormément de lacunes quant au regard des autres et le jugement est une chose qui m'effraie au plus haut point. Je pense à ce café toute la sainte matinée et quand l'horloge indique 12 h 30, je me jette littéralement sur la porte pour la fermer avant qu'un potentiel client puisse me mettre en retard. Laure me demande si je suis sûr de ne pas être malade, car elle me trouve particulièrement bizarre aujourd'hui. Je lui réponds le plus évasivement possible que j'ai des petites courses à faire pendant la pause-déjeuner pour éviter un interrogatoire inutile. Je mange sur le pouce le sandwich que j'ai fait hier soir et une fois fait, je prends ma veste ainsi que mon sac tout en saluant ma patronne. Une fois dans la rue, j'allume ma cigarette tout en me dirigeant vers le café. Lorsque j'arrive près de celui-ci, j'aperçois Max, un léger sourire habille son visage au moment où ses yeux se posent sur moi. Je m'approche de lui tout en le saluant et nous prenons place à une table en extérieur, le serveur vient prendre notre commande et nous informe qu'il revient d'ici peu avec nos boissons.

- Ta matinée s'est bien passée ? s'informe-t-il.

- Plutôt oui, c'était assez calme. Et toi, tu avais une visite ce matin, du moins, il me semble ? réponds-je tout en l'interrogeant.

- Je devais avoir une visite oui, mais les acheteurs ne se sont pas pointés au rendez-vous. Du coup, j'ai perdu 1 heure de mon temps, mais bon, ça fait partie du métier.

Le ton dans sa voix semble à mi-chemin entre l'énervement et la tristesse et je ne peux que comprendre le point de vue de mon ami. - Les gens comme ça, c'est ma hantise. Avoir un imprévu ça arrive, mais tu préviens même si c'est au dernier moment. Tu préviens, c'est tellement un manque de politesse.

Echoes of the pastOù les histoires vivent. Découvrez maintenant