La Saga des Élus tome 1 : Le Souverain Immortel

Chapitre 28

   Daran n'arrivait pas à respirer à cause du choc, à mesure que le sang de l'Empereur se répandait sur le sol. Le visage de Naaver était figé dans une expression qui montrait à la fois de la fureur et de la surprise, ultimes émotions qu'avaient pu éprouver le souverain de l'Empire Éternel. Daran ne fut pas le seul à être stupéfait : l'entièreté des individus présents dans la salle du trône impérial étaient sous le choc. Alors que Naaver leur avait paru invincible, il était finalement tombé comme n'importe quel mortel. Ou du moins, son corps. Car, comme l'avait prédit son assassin, Raveal avait bel et bien survécu, son esprit avait déjà quitté les lieux.

-Bon, ça c'est fait, dit le prince régicide d'un ton nonchalant en essuyant la lame de son épée sur la tunique de son défunt père.

-Lothar... qu'est-ce que tu viens de faire ? souffla Letïan, tout aussi choqué et confus que les rebelles.

-Vois-tu frère, j'ai débarrassé notre beau continent d'une vermine d'Artiste Noir. Il cachait bien son jeu, je l'admet, affirma triomphalement Lothar, mais maintenant beaucoup de choses vont changer.

-Qu'est-ce que vous comptez faire maintenant, Tyrall ? demanda Valar d'un ton méfiant. Je me doute que vous n'avez pas assassiné votre père sans un plan derrière la tête.

-Remarque très pertinente, messire Sarelir !

Lothar poussa négligemment le cadavre de Naaver avec son pied avant de prendre sa place devant les rebelles. Il commença alors à dévoiler ses objectifs :

-Cela va peut-être vous surprendre, mais je trouvais mon père bien faiblard dans son exercice du pouvoir. Il n'arrêtait pas de nous répéter, à mon frère et à moi, que nous devions montrer un visage de despotes éclairés, afin de rallier les gens à notre cause. Cela l'a amené à être mou envers les vermines humaines, naines, et orques. Je ne partage pas les méthodes de mon paternel. Si nous avions rasé une ville à chaque garnison elfe attaquée, cela fait longtemps que nous n'aurions plus de révoltes. Je vais également purger l'État lui-même, car nous avons toujours une taupe chez nous. Il est grand temps que les elfes montrent le visage dur et détestable qu'ils ont en chacun d'eux, pour la survie de l'Empire !

Lothat eut alors un sourire cruel, devant les visages horrifiés des humains, de Letïan et de Valar.

-Car oui, je n'ai aucunement l'intention d'abandonner le moindre territoire. Il faudra aussi s'occuper de la racaille suceuse de sang du grand nord, ces créatures impies ne nous ont que trop longtemps défiés, et je compte bien...

Il n'eut jamais le temps de finir sa phrase, pour la simple et bonne raison qu'il fut frappé par son frère d'un bon coup de pommeau sur la tempe. Lothar s'effondra, inconscient, pendant que Letïan soupirait.

-Comme papa, Lothar a toujours adoré en faire des caisses. Bon, on se tire.

Devant l'expression de confusion des rebelles agenouillés, il s'empressa alors d'ajouter :

-Ah oui, le fameux Kasca qui donnait des informations à l'AHL... bah c'est moi.

-Euh... quoi ? fit Kialandi d'une voix transpirant la suspicion, en se relevant et en mettant la main sur la poignée de son épée.

-Je viens d'envoyer mon jumeau dans les pommes, ça vous suffit pas ?

-Disons que c'est pour le moins étrange... pourquoi trahir les vôtres ?

Letïan eut soudain l'air embarrassé.

-Hum, disons que je ne suis que moyennement emballé à l'idée de conquérir tout Eian en un coup, notamment parce que conquérir une terre et la garder, ce n'est pas tout à fait la même chose. Raveal a mit la nation elfe dans une situation précaire : on commence à avoir des rébellions un peu partout, et les relations avec le Royaume des Ombres, déjà pas franchement chaleureuses, se tendent de plus en plus. J'aimerais mettre un terme à cette folie avant qu'il ne soit trop tard pour ma patrie. Je suis sûr que ma mère approuverait mon choix...