Chapitre 10 (réécrit)

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   Daran avait gardé le silence tout le long du trajet, se contentant simplement de marcher sans prononcer un mot, le regard vide. Ils avaient pu confier la jeune fille abusée par les soldats elfes à des réfugiés fuyant la ville. L'adolescent avait refusé de les suivre, estimant qu'il avait de meilleures chances de survivre en compagnie de la Destructrice, au grand dam de cette dernière, qui avait accepté de lui frayer un chemin à lui et à la fille pour les faire sortir de la ville, en tuant aisément tout les ennemis qui s'interposeraient.

Le jeune garçon avait néanmoins cru sa dernière heure arriver quand un mur de flammes bleues s'était répandu sur tout Kelmar. Mais, à sa grande surprise, le feu ne lui avait strictement rien fait, ni à lui ni à aucun des Humains présents, de même pour les bâtiments intacts. En revanche, là où se trouvaient les fantassins de l'Armée Éternelle, il n'y avait plus que des tas de cendres fumants.

«Ces flammes ne brûlent que ce que le Mage veut qu'elles détruisent, ce qu'elles font vite et bien. Tu as bien vu ces elfes réduits en cendre en à peine une vingtaine de secondes, ce qu'un feu normal serait incapable de faire» lui avait plus tard expliqué Iz'geth.

Cette dernière s'était protégée derrière une barrière de flammes noires-rouges par précaution, connaissant la volonté de Kialandi Nogafir d'exterminer tout les Démons. Les Flammes du Purgatoire consumaient vos ennemis, même si vous ignoriez leur présence. Par la suite, elle avait essayé d'envoyer Daran dans un groupe de réfugiés quittant la ville mais il s'accrochait à ses basques.

Et depuis ils marchaient en silence, l'un encore sous le choc de sa première bataille, l'autre ne parlant pour ainsi dire jamais. Au bout de quelques heures, ils avaient fini par pénétrer une forêt, où Daran demanda une pause après quelques minutes.

Je devrais déjà m'estimer heureuse qu'il ait marché si longtemps... et dire que son putain de père ne m'a même pas donné l'argent...

Le noble désormais fugitif s'assit alors sur une vieille souche et repensa aux récents évènements : son père était mort, l'Armée Éternelle avait sans doute fait main-basse sur un Fort-Vermeil désert, sa mère, ses sœurs et le reste du château ayant, selon les dires d'Haren, fuit probablement vers le bastion de Telhard, où l'Ordre de la Lame d'Ehaniel accordait l'asile aux nobles exilés. Lui-même, qui n'avait jamais eu besoin de rien, avait dû tuer pour survivre, et en était réduit à s'accrocher à une guerrière invincible pour espérer vivre encore au moins une semaine.

Un évènement revint soudainement dans sa mémoire : il avait pu projeter des soldats en armure contre un mur en même les effleurer. Il regarda alors ses mains, qu'il revoyait encore pleine du sang de ses deux victimes.

Qu'est-ce qui s'est passé ?... À ce moment là, c'est comme si j'arrivais à saisir... comme la vraie nature de l'univers, que tout s'imbriquait parfaitement.

-Tu as vu la gamine se faire violer ? demanda Iz'geth, qui avait visiblement lu dans ses pensées.

-Hein ? Euh... oui, fit-il d'une petite voix, cette scène atroce lui revenant sans cesse dans la tête.

-Il est possible de devenir sensible à la Magie après un profond traumatisme, lui répondit-elle de son habituelle voix neutre.

-Ah ? Du coup, je pourrais apprendre les Arts ?

-Avec un prof ou tout seul, ouais. Mais je te déconseille d'essayer de jouer les autodidactes si tu ne veux pas devenir un Mage Noir.

-Pourquoi ça ?

-Un professeur t'enseigne les limites et les tabous des Arts, tu risques ainsi moins de dériver vers les Ténèbres. Après, je ne te caches pas que je trouve qu'il s'agit là de restrictions stupides fondées sur une morale de moutons.

La Saga des Élus tome 1 : Le Souverain ImmortelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant