Chapitre 11

373 48 1
                                    

    Une fois rentrées , douchées et à l’aise dans nos pyjamas pilou, nous nous jetons sur mon lit. Noémie était trop fatiguée pour reprendre la route alors je l’ai invitée à rester et lui ai prêté un de mes ”tue l’amour ” comme elle dit.
    Après un petit moment de silence, j’entends Nono renifler.

- C’est encore à cause de Bertrand ? L’interrogé-je.
- Oui et non, murmure-t-elle. Ce qu’il y a c’est que j’ai l’impression de stagner dans ma vie. Je parle pas du boulot, hein ! J’adore bosser avec toi, c’est juste que je vais avoir trente balais, je n’ai ni mari, ni enfant, ni chien ni maison. Le temps ne s’arrête pas de défiler et j’ai peur de rester à jamais seule.
- Justement ! Tu n’as pas encore trente ans, tu as le temps !
- Quand je t’ai dit pour la ”lune de miel”… j’ai minimisé. Honnêtement, je me voyais déjà dans notre maison entourée de barrières blanches à la ” Wystéria Lane ” avec deux enfants et un clebs dans le jardin. Il était l’homme parfait pour moi… Beau, mûr,  dégageant de l’assurance… Un homme , un vrai quoi ! Tu vois ?
- Je vois… un vieux quoi ! Aïe ! Ça fait mal, me plaigné-je en frottant mes côtes où elle vient de me mettre un coup de coude. Comme quoi, même les vieux ne sont pas toujours matures.
- Mouais…
- Nono…
- Hum ?
- Moi non plus je n’ai pas été tout à fait honnête…
- C’est-à-dire ?
- Adam…
- Tu ne l’as pas émasculé ? Rit-elle.
- Si, enfin… c’était un accident. Il m’a prise dans ses bras et ne voulait plus me lâcher. Alors j’ai fait semblant de céder pour ensuite m’enfuir, mais…
- Mais ? Me relance-t-elle intriguée.
- L’espace d’une seconde… d’une milli-seconde… d’une nano…
- Bon t’accouches ? !
- …j’ai eu envie de… céder… pour de vrai. Sur le coup j’ai tout mis sur ma colère envers lui et ce qu’il m’a fait dans le passé  mais…
- Ouh la ! J’y crois pas ! Tu vas pas retomber amoureuse de ce connard, Christine ! Gronde-t-elle.
- Non non, impossible, en plus avec leur jeu de débiles…
- Christine ! Hurle-t-elle.

    Deux fois qu’elle prononce mon prénom en entier, ça va barder .

- C’est bon je t’assure, ce n’était qu’un microscopique moment d’égarement.  Et maintenant il y a Julien… ou pas.
- Allez cocotte, dodo ! Après  une bonne nuit, euh demi-nuit vu l’heure,  on aura les idées plus claires .
- Oui t’as raison, bonne demi nuit ma Nono.
- Idem.


♡♡♡

    Aïe, aie, aie ! Je n’ai rien dormi de la nuit. J’ai eu beaucoup me tourner et me retourner, mon cerveau n’a pas voulu se mettre sur pause. Je me suis imaginée retourner au Cube pour voir Julien. Il était seul derrière le bar, souriait en m’apercevant, puis une fois proche il me tendait la carte argentée. Je l’acceptais et le suivais dans les escaliers de verre. Une fois en haut,  il déverrouillait une porte puis me prenait par la main pour m’y faire entrer. Il me prit par la taille et m’entraîna sur le lit, recouvrant mon corps du sien. Nos visages si proches, je fermais les yeux dans l’attente qu’il m’embrasse. De douces lèvres frôlèrent les miennes. J’ouvris les yeux et je découvrais… Adam ! Bordel de merde ! Je déraille complètement, il faut que j’arrête le délire immédiatement.

    Je bondis du lit et fonce prendre une douche, fraîche la douche.  Rien de tel pour me remettre les idées en place. Dans la précipitation, je n’ai rien pris pour m’habiller. Crotte ! J’ai horreur de sortir de la salle de bain à moitié nue et moite, c’est qu’on se les gèle dans le couloir ! Tant pis, je m’enroule dans un drap de bain et prends mon courage à deux mains. À l’ouverture de la porte, la fraîcheur du couloir me file des frissons. Je fonce dans ma chambre  et manque de peu de percuter Noémie.

- Wow, tu pètes le feu ce matin dis-donc !
- Je pète de froid oui ! J’ai oublié de prendre des vêtements.
- Pas moi, me dit-elle en me montrant un tas dans ses bras . Allez à mon tour de prendre une douche. Je prendrai un café long sans sucre.
- Oh tu te crois à l’hôtel ?
- Oui, répond-elle avant de claquer la porte de la salle de bain .
- Saleté ! Râlé-je.
- Entendu, pouffe-t-elle bien à l’abri derrière la porte.

    Je fouille dans mon placard à la recherche de vêtements chauds et douillets quand la sonnette de mon appart’ résonne. Je regarde l’heure sur mon portable, 11h28. Qui peut bien venir me déranger un dimanche matin. Ma seule amie est dans ma salle de bains. Rebelotte, ça insiste ! Merde je suis toujours encore en serviette ! C’est peut-être quelque chose de grave. Tant pis j’y vais. J’ouvrirai un tout petit peu la porte et cacherai mon corps derrière elle.

- C’est bon j’arrive ! Hurlé-je pour que ce tintamarre cesse.

    J’ouvre mes trois verrous, entrebâille la porte et je me retrouve avec un énorme bouquet de fleurs sous le nez. Ce même bouquet se baisse et la tête de mon voisin apparaît, l’air gêné.

- Bertrand ?!
- Euh… désolé de vous déranger…
- Ah, on se vouvoie à nouveau ? Quoique… je crois que le droit de me tutoyer tu l’as perdu en même temps que ma meilleure amie a perdu son sourire ! Que me vaut le déplaisir de ta présence ?
- Je voulais m’excuser pour hier, enfin non, m’expliquer plutôt. Pour Noémie. Il y a eu un malentendu.  En fait, est-ce que je pourrai lui parler…
- C’est qui ? Hurle la concernée en sortant de la salle de bain.
- Personne ! Lui réponds-je en assassinant Bertrand du regard.
- S’il te plaît, me supplie-t-il. Il faut vraiment que je vous explique pour hier. Laisse-moi une chance…
- Alors pourquoi tu tiens la porte ouverte, nous interrompt Nono en m’écartant de celle-ci afin de voir ce qui se trame. Putain ! Qu’est-ce qu’il fout là lui ?! S’énerve-t-elle.
- S’excuser d’après ce qu’il m’a dit, réponds-je de manière sarcastique, toujours pas convaincue du bien fondé de son action.
- Noémie ma puce, écoute-moi…
- Ah non ! Il n’y  plus de puce qui tienne, salopard ! C’est quoi cette fois, celui qui remet ça double son score ?! Dégages et tes fleurs tu peux te les mettre...

    Oh bon sang ! Il est suicidaire le Bertrand ! Il vient de lui sauter dessus en balançant ses fleurs par terre et l’embrasse comme un sauvage pour la faire taire. Compte à rebours lancé. 3… 2… 1… Euh, ce baiser s’éternise un peu là non ?! Et moi qui suis toujours à moitié à poil. Oh c’est pas vrai, voilà que je n’y comprends plus rien. Ils sont en train de se bouffer la tronche devant mon entrée. J’abandonne et retourne dans ma chambre pour me trouver enfin des vêtements.
    De la chambre, j’entends des gémissements. Je me dépêche d’enfiler un jeans et un t-shirt à manches longues afin d’aller rallumer les neurones de ma meilleure amie qui semble avoir oublié ce qu’il s’est passé ces dernières heures.
   Quelle n’est pas ma stupéfaction lorsque je rejoins l’entrée, Noémie accrochée à mon voisin tel un koala à son eucalyptus.

- Hum-hum, Toussé-je exagérément pour attirer leur attention. Noémie !
- Euh oui, hum, se ressaisit-elle difficilement en reposant ses pieds au sol.
- Je suis vraiment désolé pour hier, mais je n’étais pas en train de jouer à leur jeu ! Se justifie-t-il. C’est pour ça que je n’ai pas compris ta réaction.
- Si je peux me permettre, l’interromps-je, François m’a dit que tu y participais !
- Oui et non, dit-il embarrassé.  Pour ce qui est des notes, je l’avoue, j’y participe, mais il n’y a rien de méchant à ça. Par contre je n’ai pas de carte ”spéciale ”, ça ne m’intéresse pas. Hier soir, c’était exceptionnel, c’est…
- … Adam qui te l’a prêtée, me souviens-je. Admettons…

    Noémie qui n’a toujours rien dit, lâche un soupir de soulagement. J’observe le condamné et me dit que, peut-être, faudrait-il lui laisser le bénéfice du doute. Nono me scrute pour voir ce que je pense de ses explications. C’est qu’il a l’air vraiment désolé le voisin, et même sincère.

- J’aimerai vraiment que l’on se revoit, enfin, si ça ne te dérange pas de sortir avec un ”papi”, ironise-t-il un peu vexé de l’appellation que lui avait donné Nono hier soir.
- Je suis aussi désolée pour… enfin… pour mon emportement. Je ne le pensais pas, c’était…
- C’est bon, arrêtes ma puce. Alors je peux t’inviter à dîner ? Hésite-t-il en ramassant le bouquet et en le lui tendant .
- OK ! Accepte-t-elle  en s’en saisissant avec un sourire jusqu’aux oreilles. Quand ?
- J’aurai bien aimé ce soir, malheureusement la batterie de ma voiture est effectivement HS. J’irai la remplacer demain, donc…
- Je peux prendre ma 206 !
- Non, non, surtout pas, se hâte-t-il. Enfin, je veux dire…

    Noémie et moi éclatons de rire en voyant sa mine horrifiée. Apparemment, la conduite sportive de ma meilleure amie l’a traumatisé !

- C’est bon,  petite nature, se moque-t-elle.
   
    Elle saisit un Post-it ainsi qu’un stylo sur le petit meuble de l’entrée et inscrit son numéro avant de le lui donner.

- Super, ok, bon, bégaie-t-il. Je t’appelle dès que mon carrosse est réparé.

    Les deux se regardent d’une manière si intense que je préfère m’éclipser.

- Bon à plus Bertrand ! Lui dis-je sans attendre la moindre réponse car je suis devenue transparente.

    Je rejoins la cuisine pour me faire couler un café. Je suis accueillie par un concerto de ”pouic ”de la part de mes deux petites cochons d’inde qui sont en manque de foin. Naturellement, pendant la nuit, elles ont encore tout foutu par terre et fait pipi dessus. De vraies cochonnes ! Elles portent bien leur nom, tiens ! À peine ai-je rempli leur râtelier qu’elles sautent dessus comme si leur vie en dépendait. De vraies gloutonnes.
    Je récupère ma tasse de concentré de caféine au moment où Nono me rejoint. Je la regarde en fronçant les sourcils.

- Oh c’est bon, je sais, je suis une faible femme, se plaint-elle.
- Franchement, Noémie, t’aurais au moins pu le faire poireauter un peu ! T’es vraiment un cas désespéré !
- Je sais, geint-elle. Mais il était si mignon avec sa petite bouille de coupable.
- Pff… Mouais. J’espère qu’il est sincère, sinon il risque de finir eunuque ! Je m’en occuperai personnellement.

    Nous éclatons de rire en même temps. J’espère sincèrement qu’elle ne va pas regretter sa décision et que Bertrand va assurer cette fois

Shaky LoveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant