CHAPITRE 19 - La Tour de Beauvier

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Ce soir-là, Luka n'est pas remonté chez lui, et je n'ai pas cherché à en savoir plus. J'ai rejoint ma mère et Valérie et on a mangé. La mère de Luka n'était pas inquiète, elle m'a dit qu'il avait des shootings à la dernière minute de temps en temps. Mais elle ne savait rien de la dispute que nous venions d'avoir...

Après le repas, j'ai filé dans ma chambre, désormais vide sans Alek... et ai cherché à m'endormir, pour arriver plus vite au lendemain. Je savais que deux jours à la fac me feraient du bien, j'avais besoin de m'éloigner, et de retrouver mon meilleur ami.

Aujourd'hui, malgré ces deux jours, je me sens encore un peu déprimé, et je sais que pour aller mieux, je dois discuter avec Luka et essayer d'y voir plus clair. Cette relation frère – sœur est compliquée à assimiler, mais un jour, chacun saura trouver sa place, j'en suis sûre.

9h00, je viens d'arriver chez Valérie. Le trajet depuis la FAC et juste après le footing a été rude, mais je suis enfin là. Il faut que je voie Luka au plus vite.

Je monte les escaliers de l'immeuble de Valérie deux par deux avant d'arriver dans l'appartement. À peine entrée, je vois Valérie dans la cuisine, le visage inquiet et soucieux.

— Valérie, vous allez bien ?

Elle lève alors la tête vers moi.

— Excuse-moi, je ne t'avais pas vu. Je suis juste un peu inquiète... ça fait un moment que Luka n'est pas rentré. J'ai l'habitude qu'il s'absente sans prévenir, mais autant, c'est rare...

Subitement, je me sens coupable.

— Comment je peux vous aider ?

Elle semble réfléchir.

— Valérie, vous m'avez dit que vous en aviez l'habitude, de cette absence soudaine n'est-ce pas ? Alors vous savez peut-être où il est ?

Son regard s'illumine alors.

— Oui, exact. Mais disons qu'il y a deux cas de figures...

Elle semble soudainement gênée.

— Valérie. Dites-moi. J'irai le chercher.

Un je-ne-sais-quoi naît alors dans ses yeux. Elle finit par me répondre, le sourire aux lèvres.

— Lorsqu'il disparaît comme ça, il est soit à la tour de Beauvier, dans la réserve du lac de ton département, soit...avec une fille.

— Je vois... et bien croisons les doigts pour qu'il soit à la réserve ! lui réponds-je avec un clin d'œil se voulant rassurant.

Elle me sourit et me remercie, tandis que je pars me préparer pour aller chercher mon frère, là où je ne suis pas sûre qu'il soit...

Samedi 13 mai, 09h30, je descends du bus qui me dépose à quelques mètres de l'entrée de la plage. Je suis souvent venue ici, mais d'aussi loin que je me souvienne, je n'ai jamais dépassé la plage. Mais il y a un début à tout comme on dit.

09H35, je quitte la plage et suis ce qu'indiquent les panneaux touristiques. Je traverse un pont avant de faire face à un chemin fait de cailloux et de gadoue. À la fin de ce chemin, je marche dans une allée d'herbes hautes. Quand elles ne barrent pas le passage, elles l'étrécissent ; quand elles ne nous collent pas la peau, elles sifflent. Cette allée est un lieu qui, seule en pleine nuit, pourrait sûrement m'effrayer.

Sortie des hautes herbes, j'arrive dans un magnifique sous-bois. Mes pieds foulent la terre lisse, transformée quelque fois en gadoue. Le chemin est assez net et agréable. On se retrouve seul et en paix avec soi-même. Au cours du chemin, la route se sépare quelques fois en deux. C'est l'un des meilleurs moments de la route. C'est un moment où tu peux te poser une simple question, avec deux réponses possibles. La séparation que tu choisis symbolise l'une des réponses à la question que tu t'es posé.

Au Delà de la TourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant