L'équipe est en place, disons même en position. Depuis les péripéties de ces derniers mois, et après les dernières déconvenues politico-économiques, elle craint plus que tout l'arrivée d'Arnold Al. Buore Jr aujourd'hui. La dernière nouvelle en date ? Ni plus ni moins que l'annonce de la démission du Vice-Président par ses propres partenaires.
Le conseil restreint est donc là, toujours composé des fidèles conseillers du vice-président, les derniers conseillers devrions-nous plutôt dire. Se tiennent également quelques proches d'Alfred A. Stare Sr. Ceux-ci tempèrent leur nervosité tant bien que mal durant cette attente imposée. Relation de pouvoir oblige, celui qui attend est toujours implicitement désigné comme le dominé.
Certains échangent, somatisent, se droguent de caféine ou de cocaïne, d'autres surjouent. Les faux-semblants sont faux, certes, mais ils restent nécessaires. A. Stare et son équipe tiennent une position de grandeur détachée. Dans la grande pièce éclairée, chacun dévoile sa propre Egypte et dissimule ses plaies.
A.Al. Buore entre enfin en scène, au bout du couloir. Signe d'inquiétude pour l'équipe en présence, il est suivi par son chien. L'animal à quatre pattes n'est là que dans les moments importants, comme tout le monde le sait. Alfred Stare est le premier à saluer A. Buore. Il reste à proximité du Vice-Président, en compagnie de son conseiller, un grand homme tout de noir vêtu. L'homme sombre ne dit rien, il s'affaire à laisser en extérieur le chien du vice-président pour la réunion.
- J'interromps votre petit salon mes collègues ?
La voix d'A. Al. Buore est brutale, nerveuse, loin de sa hauteur habituelle.
- Veniez-vous pour la réunion ou pour discuter entre vous ? Après tout, au point où nous en sommes, je ne serai pas étonné que vous vous jetiez sur moi comme Brutus et ses conspirateurs sur César.
- Vous êtes shakespearien aujourd'hui mon ami, soulève avec sarcasmes A. Stare, seul apte à de telles remarques. Nos capitaux n'ont jamais été aussi proches de grimper l'Everest et vous parlez de vous en victime.
- L'argent... si cela remplit des lignes codées sur un ordinateur, jamais avons-nous vu la réputation et l'honneur s'acheter !
La maitrise émotionnelle d'A. Al. Buore cède de part et d'autre, tout le monde le remarque.
- Combien ici aimerait prendre la place de notre pauvre Vice-Président ? s'éclaffe A. Stare en tournoyant sur lui-même.
Il se reprend, fait face à A.Al. Buore, et jacte :
- Retenez César, oubliez Jules, mon ami. Retenez la grandeur du pouvoir, oubliez la petitesse de la politique.
Les membres de l'équipe restreinte sont subjugués par A. Stare.
- Un homme est un homme, corps nu dans la bataille il se fend sur la ferraille. A quoi bon ces millions si c'est pour mourir d'un amour-propre si pauvre ?
- Arnold, expire-t-il doucement, vous êtes doublement traumatisé, la tentative d'assassinat, l'échec de nos affaires commerciales pourtant si bien lancées, en l'espace quelques mois. Certes, le projet de la « Sat-électricité » a été rejeté par le Conseil consultatif, mais nous n'avons jamais connu si hautes actions sur le marché.
Ils allument leurs cigares. Le Vice-Président s'écrase dans le large fauteuil vice-présidentiel. A.Al. Buore est sidéré. Une décorporalisation le gagne. Il se sent bloqué dans son corps et observe la scène en hauteur, en inertie.
- D'ailleurs, je suppose que c'est pour cela que votre équipe est à ce point apeurée ? Je le vois, elle est minée par les affres de la guerre politique et des tranchées journalistiques.
Alfred Stare se propulse devant chaque membre de l'équipe, en face à face, jouant de la proximité et de la nervosité pour esquisser des faux sourires et des regards de pitié.
- Mais regardez mon bras droit, mon fidèle conseiller, rebondit-il d'un large signe accompagné de son cigare. Toujours là, puissant, droit, humble, d'humeur constante. Nous ne sommes pas de la plèbe, nous sommes du Capitole.
Il écrase son cigare, puis il fait signe à son bras droit, qui fait entrer trois personnes, des professionnels de la garde rapprochée.
- Ce qui a tué Jules est le manque d'informations, nous le savons ; mais nous pouvons ainsi beaucoup apprendre de César, et détenir ces informations si précieuses.
A la suite des trois personnes, entre maintenant Brent Douglas, Président des Etats-Unis d'Amérique, puis encore trois membres de sa garde, deux restent toutefois en dehors de la pièce avant de refermer la porte.
- Arnold, je suis venu dès que j'ai su, intervient d'une voix haletante Brent Douglas en direction de son Vice-Président. D'abord cette action terrible contre vous l'année passée, maintenant cet embargo politique. Je suis là pour la Convention bien sûr, je ne vous laisserai pas seul.
- La Convention ? Brent, quelle Convention ?
A.Al. Buore est surpris, sans informations et perplexe quant à la présence de son collègue politique en ce moment privé et en cette période mouvementée.
- Que se passe-t-il ?
- Arnold, oui, la Convention. Enfin... répond avec soutien le Président Douglas. La convention qui vous permet de vous retirer de la vie politique pour vous recentrer sur vous. Vous savez Arnold, je comprends parfaitement votre démission, je comprends aussi que vous n'ayez pas voulu m'en parler en amont, je ne sais pas si moi-même j'aurais osé.
A. Al. Buore comprend petit à petit la raison des comportements suspects depuis une trentaine de minutes, l'intervention d'A. Stare essentiellement.
- C'est cela... j'imagine que ceci explique la présence des journalistes à l'extérieur et les appels incessants.
- J'ai exigé la plus grande discrétion, mais il y a toujours des fuites. Quelques médias se sont déjà saisis de la nouvelle, oui.
- Ma demande de démission...
A. Al. Buore regarde la horde de journalistes qui se tient devant le bâtiment. Il se sert un verre et reprend :
- Je n'ai jamais fait ou pensé une telle chose...
Il regarde autour de lui, circonspect.
- Je n'ai pas non plus convié une réunion en cette intention.
- Comment ? s'étonne le Président. Arnold, je ne comprends pas...
- Cessez de m'appeler par mon prénom comme si nous étions amis Brent ! Président... Douglas... noie-t-il ses mots dans le liquide d'éthanol. J'ai toujours trouvé que ces deux mots n'allaient pas ensemble, vous êtes si disgracieux. Bon, qui ici peut m'expliquer cette mascarade ?
- Je crois devoir éclairer cette zone d'information pertinente encore cachée ! plaide A. Stare, d'un ton à la fois autoritaire et amusé. J'ai rédigé cette lettre pour vous, et en votre nom, mon cher Arnold. Disons que je fus votre nègre.
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