EPSILON, un Nouveau Destin [T1]

Chapitre 17

Un silence envahit le vaisseau après la tempête. Fonctionnant avec le dernier et unique moteur, la puissance du Iota est affaiblie mais le vaisseau les propulse assez loin de Roegan, laissant les ennuis derrière eux. Pourtant, l'atmosphère reste tendue. Aucun des agents de la Tour n'a osé prendre la parole le premier. Des explications sont nécessaires, mais elles apportent leur lot d'agacement avec. Après ce qu'ils viennent de traverser, ils souhaitent chacun un peu plus de calme.

Les mains sur le manche de pilotage, Adam ne quitte pas des yeux l'horizon, prenant au sérieux sa mission actuelle. Piloter un vaisseau de plaisance sur Jocaste est facile, mais le Iota n'est pas une mince affaire. Les commandes sont triplées, les écrans affichent un langage étranger au soldat, et l'engin est plus difficile à contrôler par son imposante taille. Son cœur continue de battre à mille allures, mais sa concentration n'est pas troublée. Il veille à ce que le vaisseau prenne peu à peu de la puissance. Le compteur affiche une vitesse constante, mais ce n'est pas assez pour voler en vitesse-lumière. Il pousse sur le manche d'accélération, retenant la position pendant plusieurs secondes afin que le moteur reçoive l'information. Dès que Adam ressent une poussée, il lâche la commande pour ne pas brusquer le réacteur et risquer de le perdre.

Assit sur un siège derrière Adam, Théo étend sa jambe sur une serviette ensanglantée. Krystal rejoint le reste du groupe dans la cabine de pilotage avec une trousse de secours. Elle y sort une poche de froid qu'elle donne à Iwona. Ses maux de tête persistent, et ils ne sont pas aidés par la fatigue qui envahit son corps. Allongée par terre, la blonde peine à garder les yeux ouverts. Son corps lui paraît lourd, si lourd qu'elle ne parvient plus à bouger ses jambes. Iwona plaque la poche sur son front, tandis que Mia surveille son état, assise à ses côtés.

De son côté, Krystal enfile des gants en latex, sous les yeux terrifiés de Théo. La balle logée dans son mollet lui procure une douleur insoutenable, mais la peur prend le dessus. Krystal sort une pince qu'elle stérilise en le recouvrant d'alcool dans une attitude que le jeune homme juge trop calme. Elle semble savoir ce qu'elle fait, mais il n'a pas connaissance de ses talents de médecin. La confiance qu'il met en ses compétences est partielle, il préférerait presque se soigner seul. Comment être certain qu'elle ne fera pas de sa jambe une boucherie ? Il visualise déjà les dégâts.

― Tu es sûre de ce que tu vas faire ? panique-t-il.

― Parce que tu préfères garder la balle ?

La voix sèche de Krystal suffit à faire taire Théo. Elle est loin d'être rassurante, mais Théo n'a pas le choix. Il ne veut pas attendre d'arriver à Jocaste pour soigner sa blessure.

Sa respiration s'accélère alors que Krystal n'a toujours pas touché à sa blessure. Sentant l'anxiété monter, il plonge une main tremblante dans la poche de sa veste. Sa petite boîte de médicaments en main, il récupère un cachet contre ses crises d'angoisse qu'il avale sans eau. Aussitôt, il tourne la tête de façon que son mollet ne soit plus dans son champ de vision. Le contact de la peau froide de Krystal sur sa jambe le fait sursauter sans raison. Elle n'a toujours pas touché la zone sensible que Théo craint le pire. Quelques secondes se sont seulement écoulées, mais l'impatience est si forte qu'il regarde à nouveau sa blessure.

― Arrête de bouger, grogne-t-elle.

Les mouvements incontrôlés de Théo agacent la Martienne, incapable de voir ce qu'elle soigne. Elle empoigne le haut de son mollet afin de l'empêcher de bouger une bonne fois pour toute, ignorant les plaintes de son coéquipier.

Voilà ce qu'il craignait. Qu'elle agisse par surprise.

Elle verse la moitié de la bouteille d'alcool sur sa blessure. Une douleur fulgurante déchire sa jambe. Théo pourrait croire qu'on verse de l'acide sur sa peau, la sensation est du pareil au même pour lui. Son cri résonne dans la cabine de pilotage. Il tente de ramener sa jambe contre son torse, mais Krystal le retient assez fort pour l'en empêcher.